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Ce serait la première fois en sept ans que le Canada et la Chine tiendront des discussions de fond entre leurs plus hauts dirigeants.
Lors d'une réunion à haut risque vendredi, le premier ministre Mark Carney et le président chinois Xi Jinping s'assiéront face à face pour recalibrer les relations entre leurs pays, à un moment où les États-Unis ont mis le Canada sur la touche dans les négociations commerciales.
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News.
La réunion aura lieu en marge du sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique à Gyeongju, en Corée du Sud. Selon un haut fonctionnaire du gouvernement, ce sera la première fois en sept ans que le Canada et la Chine tiendront des discussions de fond entre leurs plus hauts dirigeants.
«Nous explorerons les possibilités qui s'offrent à nous», a déclaré M. Carney en début de semaine aux journalistes qui l'accompagnaient en Asie. «Il s'agit de notre deuxième partenaire commercial et de la deuxième économie mondiale.»
M. Carney a tempéré les attentes quant à la signature d'un accord entre les deux pays. En ce qui concerne la levée des droits de douane canadiens sur les véhicules électriques chinois, M. Carney a affirmé que les relations devaient d'abord «s'approfondir».
«Il n'y a pas d'offre prédéfinie. C'est la différence entre une relation et une transaction», a-t-il affirmé lundi.
Le Canada procède actuellement à un réexamen de sa décision, prise sous le mandat de l'ancien premier ministre Justin Trudeau, d'imposer des droits de douane de 100 % sur les véhicules électriques fabriqués en Chine. Cette mesure, prise de concert avec les États-Unis, a provoqué la colère de Pékin, qui a riposté en imposant des droits de douane de 100 % sur l'huile et la farine de canola canadiennes et de 75,8 % sur les graines de canola. La Chine a également imposé une taxe de 25 % sur certains produits de la mer.
Dans une entrevue exclusive accordée à l'émission Question Period de CTV, l'ambassadeur de Chine au Canada, Wang Di, a déclaré que la Chine lèverait les droits de douane sur le canola si le Canada abandonnait ses droits de douane sur les véhicules électriques.
L'année dernière, l'industrie du canola a généré plus de 43 milliards de dollars d'activité économique et employé plus de 200 000 personnes, selon le Conseil canadien du canola.
Alors que les droits de douane imposés par Trump pèsent principalement sur les emplois dans le secteur manufacturier en Ontario et au Québec, les mesures de rétorsion de Xi pénalisent les agriculteurs de l'Ouest. Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, et celui du Manitoba, Wab Kinew, ont demandé au gouvernement fédéral de supprimer ses droits de douane.
Le chef conservateur Pierre Poilievre s'est dit opposé à la levée des droits de douane sur les véhicules électriques chinois, mais il demande à M. Carney de faire davantage pour soutenir les agriculteurs et obtenir de la Chine qu'elle supprime ses droits de douane sur le canola.
«Mark Carney va rencontrer le président Xi. Il doit revenir avec la suppression des droits de douane sur nos agriculteurs et nos pêcheurs. Il est temps qu'il tienne ses promesses», a affirmé M. Poilievre mardi devant les journalistes.
Mais certains analystes craignent que le Canada ne tombe dans un «piège» qui oppose les agriculteurs aux travailleurs de l'automobile.
«Il doit s'agir d'une décision stratégique qui tient compte de nos ambitions à long terme en matière d'économie et de stratégie industrielle», a déclaré Vina Nadjibulla, vice-présidente de la Fondation Asie-Pacifique.
Mme Nadjibulla estime que les négociations avec les États-Unis sur l'automobile doivent être prioritaires.
«L'avenir de notre secteur automobile doit être décidé ici, au Canada, et dans le cadre de discussions avec les États-Unis. Ensuite, nous devrons voir ce que nous pouvons faire avec la Chine en matière de véhicules électriques», a souligné Mme Nadjibulla.
«Cette décision ne doit pas être prise uniquement parce que nous subissons des pressions de la part de la Chine.»
Selon Statistique Canada, le commerce total entre les deux pays s'élevait à 118,7 milliards de dollars en 2024. Sur ce montant, environ 30 milliards de dollars correspondaient aux exportations canadiennes.
La rencontre entre Carney et Xi a lieu un jour après que le dirigeant chinois ait rencontré le président américain Donald Trump en marge de l'APEC.
Trump a déclaré que la Chine avait accepté de reporter son contrôle strict sur l'approvisionnement en minéraux rares, tandis que les États-Unis réduiraient les droits de douane sur les produits chinois d'environ 10 %. Mais Pékin n'a pas confirmé ces développements.
L'ancien ambassadeur du Canada en Chine, Guy Saint-Jacques, affirme que le premier ministre doit «de toute urgence» rétablir les relations avec la Chine, car «(le Canada) est loin de parvenir à un accord avec les États-Unis. En fait, la situation est devenue plus compliquée».
Jeudi dernier, Trump a brusquement mis fin aux négociations commerciales avec le Canada à cause d'une publicité anti-droits de douane commandée par le gouvernement de l'Ontario, qui utilisait la voix de l'ancien président républicain Ronald Reagan.
Trump a en outre menacé d'imposer des droits de douane supplémentaires de 10 % en plus des droits existants pour punir le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, d'avoir décidé de diffuser ces publicités pendant les deux premiers matchs de la Série mondiale avant de les retirer.
Alors que les États-Unis sont devenus un allié peu fiable, M. Saint-Jacques affirme que M. Carney doit être lucide quant aux antécédents hostiles de la Chine.
«Nous avons affaire à un pays qui a un plan très clair pour dominer le monde avec ses produits. Il n'hésitera pas à vous espionner, à voler votre technologie et jusqu'à récemment, il était très actif en termes d'ingérence au Canada.»
M. Saint-Jacques estime que M. Carney doit être précis avec M. Xi et lui dire ce qui ne sera pas toléré : «En toute bonne foi, nous attendons des Chinois qu'ils jouent également leur rôle et agissent de manière appropriée.»
Les relations entre le Canada et la Chine se sont considérablement détériorées en 2018 après que le Canada a arrêté la dirigeante de Huawei, Meng Wanzhou, au nom des États-Unis pour des accusations de fraude bancaire.
Quelques jours plus tard, la Chine a détenu séparément les Canadiens Michael Kovrig et Michael Spavor pour des allégations d'espionnage, accusations qu'ils ont niées. Les deux hommes ont finalement été libérés après avoir passé plus de 1000 jours dans une prison chinoise, peu après que Meng elle-même ait été libérée de son assignation à résidence.
Depuis qu'il est devenu premier ministre, Carney a fait part de son intention d'approfondir les relations avec la Chine dans certains secteurs. Le mois dernier, il a rencontré le premier ministre chinois Li Qiang, deuxième personnalité la plus importante de Chine, en marge de l'Assemblée générale des Nations unies, tandis que la ministre des Affaires étrangères Anita Anand a rencontré des responsables chinois au début du mois.
Avec des informations de Spencer Van Dyk, de CTV News.