Chroniques

Un vaste chantier… qui n’a rien d’excitant

L’adaptation aux changements climatique est devenue un impératif qu’il n’est plus possible de pelleter par en avant.

Mis à jour

Publié

(La Presse canadienne)

Les inondations d’en fin de semaine dans la grande région de Montréal nous ont, encore une fois, rappelé que les événements météorologiques extrêmes sont de moins en moins exceptionnels. L’adaptation aux changements climatique est devenue un impératif qu’il n’est plus possible de pelleter par en avant. Politiquement, ce n’est pas très sexy… et ça va nous coûter cher.

Vous savez quand vous avez des rénovations plates à faire? Du style : faire poser une pompe, refaire la toiture. On préférerait investir dans une nouvelle cuisine! Mais non, on doit faire la chose responsable et payer une fortune pour des travaux nécessaires qui ne paraissent pas.

En fin de semaine, les fortes pluies (100 millimètres en une heure) ont provoqué des inondations et des centaines de refoulements d’égouts. J’ai énormément d’empathie pour les pauvres personnes et familles qui voient l’eau sale monter dans leur logement ou leur maison. Un vrai cauchemar.

Cette eau, elle sortait de la douche, de la toilette, du bain… les égouts ne fournissaient plus.

À VOIR AUSSI | Inondé deux fois en un an: «on va condamner le sous-sol», lance un propriétaire de Montréal exaspéré

Les infrastructures municipales sont vieillissantes partout au Québec et inadaptées à la nouvelle donne météorologique et démographique. Si, pendant longtemps, on parlait d’augmenter la capacité (grossir les tuyaux) des infrastructures d’eau, nous devons aujourd’hui revisiter nos vieux réflexes.

Absorber plutôt qu’évacuer

Plutôt que de tout envoyer dans les égouts, il faut que nos villes « absorbent » davantage l’eau par exemple en ajoutant des espaces verts. Les parcs éponges dont on parle depuis quelques années peuvent à première vue avoir l’air d’une patente à gosse, mais c’est au contraire une voie d’avenir.

Le gouvernement a lancé le programme Oasis, qui vise à soutenir des projets de verdissement, qui permettent de réduire les impacts des vagues de chaleur et des pluies torrentielles.

À VOIR AUSSI | Orages violents: comment fonctionne le système d’alerte d’Environnement Canada?

En fin de semaine, nous avons aussi été aux prises avec des stationnements inondés. Les stationnements sont des lieux qui n’ont rien de naturel. Ils accumulent la chaleur et l’eau. Oui on peut mettre plus de drains, mais si ça s’en va dans les égouts, ça va refouler encore et encore.

En Europe, il n’est pas rare de voir des stationnements en petites dalles, plutôt qu’en asphalte. Oui, ça coûte plus cher sur le coup, mais c’est plus facile d’entretien par la suite et l’eau s’écoule dans la terre plutôt que de s’accumuler ou se vider dans un drain qui inonde les conduits municipaux et les routes.

Qui est responsable?

Avec des enjeux aussi globaux et diffus, tout le monde est un peu responsable. Et quand tout le monde est un peu responsable, bien souvent personne ne l’est vraiment. On se lance un peu la balle.

De leur côté, les municipalités demandent plus d’investissements. Le gouvernement du Québec, quant à lui, demande aux villes d’avoir un plan de produire un inventaire de leurs infrastructures et d’effectuer une priorisation. Il faut investir, oui, mais il faut le faire comme il faut.

Et pour compliquer un peu les choses, on doit aussi rappeler que le Québec a reçu une tape sur les doigts d’une agence de notation ce printemps. Donc on a aussi un défi en matière d’investissements en infrastructures. 

Une nouvelle réalité

La question des assurances deviendra aussi un enjeu important. Elles ne couvrent pas tout, et certains secteurs ne sont carrément plus assurables, on peut penser notamment à Baie-St-Paul, à la suite des inondations de 2023.

Il faudra peut-être apprendre à vivre… sans couverture ! Il risque d’y avoir de plus en plus d’exigences d’installations, des pompes, relever sa maison, etc.

Quand les assurances ne couvrent pas, on se retourne vers qui? Le gouvernement ! Certes, il y a de l’aide gouvernementale, mais celle-ci ne couvre pas tout non plus, notamment lorsqu’il est question de refoulement d’égout. Sinon, le gouvernement choisit un peu arbitrairement d’aider les sinistrés non couverts, comme ce fut le cas après la tempête Debby en 2024. C’est gentil, mais l’approche ne peut se résumer qu’à du cas par cas.

Comme société, on va avoir de sérieuses questions à se poser sur la manière dont on va faire face à ces situations qui sont devenues fréquentes. Avouons-le, c’est assez rare que ça ne fasse l’objet de débats politiques ou de promesses électorales… à part des partis écologistes. Pourtant, cela nous touche tous.

Et tout ça survient dans un contexte où un grand nombre de citoyens trouvent épouvantable de devoir payer une «taxe carbone» de 8 cents sur le litre d’essence pour combattre et s’adapter aux changements climatiques… Il n’y en aura pas de faciles !

Inutile de faire l’autruche: on a du pain sur la planche et ça va coûter une beurrée. 

Pour recevoir toutes les chroniques d'Antonine Yaccarini, abonnez-vous à notre infolettre, Les débatteurs du samedi.