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Les signes révélateurs d’une bulle spéculative: faut-il s’inquiéter?

Voici 10 signes que nous sommes dans une bulle (ou sur le point d’y entrer).

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Publié

(The Associated Press)

Depuis quelques semaines, les marchés boursiers battent des records, les investisseurs se ruent sur les titres technos, et l’euphorie semble s’être emparée des portefeuilles.

Mais sous cette apparente prospérité se cachent des signaux de plus en plus nombreux d’une bulle spéculative en formation. Les professionnels avisés et les investisseurs prudents ont intérêt à prêter attention à ces indices avant qu’un éventuel retour à la réalité ne fasse fondre les gains.

Qu’est-ce qu’une bulle spéculative?

Une bulle spéculative survient lorsque le prix des actifs financiers (actions, cryptomonnaies, immobilier, etc.) s’éloigne fortement de leur valeur intrinsèque, alimenté par l’optimisme, la peur de manquer le bateau (FOMO—Fear of Missing Out), ou encore des récits promettant une nouvelle ère économique. L’histoire boursière regorge de telles périodes : la bulle technologique des années 2000, la crise des subprimes de 2008 ou encore la frénésie des «meme stocks» en 2021.

10 signes que nous sommes dans une bulle (ou sur le point d’y entrer)

1. Valorisations excessives

Les multiples de valorisation (prix/bénéfices, prix/ventes, prix/cash-flow) atteignent des sommets rarement vus depuis l’an 2000. Certaines entreprises affichent des ratios prix/ventes de 20, 30, voire plus, sans rentabilité réelle.

2. Explosion des titres non rentables

De nombreuses entreprises déficitaires (souvent issues du secteur technologique ou des SPACs) connaissent une envolée spectaculaire. C’est un comportement typique d’un marché guidé par la spéculation, et non par les fondamentaux.

3. Retour des investisseurs individuels en masse

L’essor de plateformes de courtage sans commission et des réseaux sociaux boursiers a stimulé un engouement massif du public, parfois peu expérimenté, qui investit sans grande analyse dans des titres à la mode.

4. Dette sur marge record

Aux États-Unis, la dette sur marge (emprunt utilisé pour acheter des titres) dépasse les 1 000 milliards de dollars. Cet effet de levier augmente considérablement la fragilité du marché.

5. Narratif d’une nouvelle ère

La rhétorique selon laquelle « cette fois, c’est différent » — souvent centrée sur l’IA, la révolution énergétique ou les mégacapitalisations — revient en force. Cela justifie, à tort ou à raison, des valorisations insoutenables.

6. Sentiment de marché euphorique

Plusieurs indices de sentiment atteignent des niveaux extrêmes. L’indice Fear & Greed est en zone greed depuis des semaines, et des modèles quantitatifs signalent des comportements de troupeau.

7. Écart de rendement actions/obligations anormalement faible

La prime de risque des actions est presque nulle comparée aux obligations d’État, ce qui démontre un déséquilibre : les investisseurs prennent des risques considérables pour des rendements à peine plus élevés.

8. Croissance fulgurante de la capitalisation crypto

Le marché des cryptomonnaies a connu une poussée rapide, parfois déconnectée de toute adoption ou innovation réelle. Le bitcoin est désormais utilisé par certaines entreprises comme outil de gestion de trésorerie, accentuant l’exposition aux actifs volatils.

9. Tendance spéculative sur des microcapitalisations

De minuscules titres, parfois peu liquides ou sans activité significative, doublent ou triplent en quelques jours, stimulés par des vidéos TikTok ou des forums Reddit.

10. Avertissements de maisons financières renommées

Des analystes de banques comme UBS, BofA ou Société Générale lancent l’alerte sur une potentielle « everything bubble », où tous les actifs (actions, immobilier, crypto) seraient surévalués simultanément.

Pourquoi les bulles éclatent-elles toujours?

L’histoire nous enseigne que les bulles n’éclatent jamais par hasard. Elles sont souvent percées par un catalyseur : une hausse de taux, un choc géopolitique, une récession surprise ou encore une fraude révélée. Ce n’est pas tant l’événement déclencheur qui importe, mais le fait qu’il survient alors que les marchés sont déjà en lévitation.

Lorsque la confiance disparaît, la correction est rapide et brutale. Les actifs spéculatifs chutent en premier, suivis parfois par des secteurs plus solides, entraînés dans le mouvement.

Quelques stratégies pour traverser une bulle sans trop de dégâts:

Prenez du recul. Si certaines positions ont surperformé démesurément, réduisez-les. Réinvestissez dans des secteurs sous-évalués ou dans des actifs défensifs. Misez sur des entreprises solides, rentables, avec un historique de croissance, un bon bilan et un avantage concurrentiel. Les bulles sont impitoyables avec les titres spéculatifs et les entreprises déficitaires.

Avoir des liquidités disponibles permet d’acheter au rabais lors d’une correction et d’éviter de vendre dans la panique. Si tout le monde autour de vous dit que tel titre boursier est une « opportunité unique », il est peut-être déjà trop tard. Fiez-vous à votre jugement, non à l’euphorie collective. Répartissez vos avoirs entre actions, obligations, immobilier, FNB, liquidités, voire métaux précieux. Ne mettez pas tous vos œufs au même endroit.

Conclusion

Le marché actuel n’est pas encore en chute libre, mais les signes d’une bulle se multiplient. Même avec 27 ans de métier, je n’arrive pas anticiper avec précision le moment où une correction de marché survient. Malgré la douleur, il faudra rester investi. Mais, en misant sur la qualité. L’histoire montre que les excès sont souvent suivis d’un rééquilibrage douloureux. Pour l’investisseur avisé, l’heure est venue d’ajuster la voile, de protéger ses gains et de faire preuve de rigueur. Car dans l’univers boursier, la peur de rater un gain est rarement plus forte que celle de tout perdre.

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Fabien Major

Fabien Major

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Planificateur financier et conseiller en gestion de patrimoine