Côte-Nord

Recrutée par la BFM: une jeune mère autochtone se confie

«C’était plus facile pour moi de vendre (de la drogue) que de vendre mon corps.»

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Recrutée par le BFM: une jeune mère autochtone se confie

Une mère de famille dit aujourd’hui craindre des représailles de la part du gang Blood Family Mafia (BFM). Recrutée par les groupes criminalisés afin de vendre de la drogue sur la Côte-Nord, Julie (prénom fictif) a décidé de raconter son histoire pour sensibiliser la population.

«BFM, c’est eux autres qui me chercheraient. Ils disent que je leur devrais de l’argent. Mais je ne vois pas où.»

—  Julie (prénom fictif)

Sous le couvert de l’anonymat, Julie se souvient d’avoir été attirée par la vente de drogues en raison de l’aspect financier.

«C’était plus facile pour moi de vendre (de la drogue) que de vendre mon corps», se souvient celle qui est sobre depuis près d’un an.

Après avoir d’abord vendu des stupéfiants pour les Hells Angels, le gang BFM a décidé d’entrer dans la partie.

Julie raconte que le groupe autrefois dirigé par Dave «Pic» Turmel fait preuve d’une violence inouïe sur la Côte-Nord.

«Ils sortent leur fusil, ils s’en vont battre le monde quand tu ne paies pas. On a peur qu’ils viennent nous chercher. Ce n’est plus comme avant», a confié la mère de famille.

Les incendies criminels survenus en novembre dans la communauté innue de Uashat mak Mani-Utenam l’a également ébranlée. Elle croit qu’elle était peut-être visée lors de l’évènement.

«Après les feux, j’ai eu peur», a-t-elle ajouté. «À ce qui paraît, mon nom a circulé là-dedans. Une chance que j’ai des caméras chez nous.»

Selon une source bien au fait du dossier, l’un des bâtiments qui a flambé à la mi-novembre était occupé par Shannon Regis, un revendeur bien connu des policiers.

Ce dernier a été arrêté et accusé en juillet dernier pour agression et séquestration dans un chalet de Maliotenam avec trois autres suspects, dont David Bouchard-Michel, alias Mizery, un rappeur relié à la Blood Family Mafia.

Incendie criminel Côte-Nord - Guerre des stupéfiants sur la Côte-Nord

Des intervenants préoccupés

Chose certaine, la violence a augmenté dans la région, selon plusieurs intervenants rencontrés par Noovo Info. La réalité a d’ailleurs changé pour ceux qui travaillent déjà avec une clientèle vulnérable. Ils notent davantage de détresse psychologique et s’attendent à d’autres conséquences comme des cas de femmes victimes de proxénétisme.

«Le crime organisé va amener la possibilité de venir recruter ici des jeunes femmes avec des vulnérabilités. On pense aux communautés autochtones ou aux femmes avec un moindre salaire», a lancé une intervenante. «Plus la population est sensibilisée et plus elle va aller chercher de l’aide.»

Le message de Julie

C’est en enlaçant son enfant que Julie est devenue émotive. Elle y est allée d’un message fort pour les personnes qui vivent présentement ce qu’elle a vécu.

«Tu penses que tu es quelqu’un de fort avec ça, mais ça ne vaut pas tout l’amour de ta famille et de tes enfants… J’ai tout perdu à cause de ça. J’ai perdu la confiance de ma mère, des familles d’accueil. C’est mieux que les gens se tassent de ça. On peut s’en sortir sans cet argent sale», a-t-elle conclu.