Air Canada a l'intention d’assurer plus de la moitié de ses vols réguliers mardi, après avoir conclu un accord de principe avec le syndicat représentant ses agents de bord mettant fin à la grève qui a débuté samedi matin.
La compagnie aérienne annonce une reprise progressive de ses opérations mardi, les premiers appareils de ses lignes principales devant voler vers 16 h, heure de l’Est.
D’ici la fin de la journée, elle prévoit d’assurer 53 % de ses vols réguliers — sous les bannières Air Canada, Air Canada Rouge et Air Canada Express — en se concentrant sur les vols internationaux. La montée en puissance débutera «véritablement» mercredi matin pour les lignes principales nord-américaines, indique Mark Nasr, vice-président général et chef des opérations d’Air Canada, lors d’une entrevue.
«Nous présentons nos plus sincères excuses à nos clients et nous nous concentrons actuellement sur la résolution de la situation et leur retour à la normale», ajoute-t-il.
«Lorsque les clients achètent un billet avec Air Canada, ils comptent sur la marque. Nous avons fait une promesse, et nous ne l’avons pas tenue, tout simplement. Nous allons regagner cette confiance et cela va commencer dès maintenant… en remettant les avions en vol.»
La compagnie aérienne a prévenu qu’un retour à un service régulier complet prendrait sept à dix jours, car les avions et les équipages ne sont pas à leur poste. Certains vols continueront d’être annulés jusqu’à ce que l’horaire soit stabilisé.
Selon M. Nasr, Air Canada s’efforce de «tout redémarrer à zéro» après que l’ensemble de sa flotte — à l’exception des vols Air Canada Express exploités sous les bannières Jazz et PAL — a été cloué au sol tôt samedi matin. Air Canada estimait lundi que quelque 500 000 clients avaient été impactés depuis le début de la grève.
«En raison de la longue période d’arrêt de nos activités, des travaux de maintenance supplémentaires sont en cours», précise M. Nasr.
Il ajoute que la compagnie aérienne a rappelé ses équipages de l’étranger, ce qui ralentira encore davantage le processus de redémarrage. Par exemple, après l’atterrissage d’un vol de 17 heures entre Vancouver et Sydney, en Australie, la compagnie devra attendre 24 heures pour rapatrier l’avion afin de respecter les exigences de repos de ce même équipage, faute d’une deuxième équipe disponible pour assurer le vol retour.
Entre-temps, M. Nasr indique qu’Air Canada a renforcé son équipe de soutien à la clientèle, car de nombreux passagers tentent de joindre un agent.
Il précise que 5000 employés travaillent pour aider les clients dont les vols ont été annulés à s’orienter dans leurs options, notamment un remboursement complet ou un crédit pour un futur voyage. Air Canada a également annoncé qu’elle offrirait aux clients de modifier leurs réservations auprès de 120 compagnies aériennes, y compris des concurrents, lorsque cela est possible.
M. Nasr soutient que d’autres politiques clients seraient assouplies. Cela comprend la possibilité pour les passagers de modifier leurs réservations auprès d’autres compagnies aériennes par l’intermédiaire du site web ou de l’application mobile d’Air Canada pendant une période maximale de sept jours, contre trois jours habituellement.
«En matière de priorisation, tout le monde est important. Chacun doit arriver là où nous nous sommes engagés à l’amener», affirme-t-il.
«Notre priorité est de garantir la stabilité de nos opérations afin de réintroduire autant de sièges que possible, le plus rapidement et en toute sécurité.»
La compagnie aérienne indique mardi que seuls les clients détenant des réservations confirmées et dont les vols sont affichés comme prévu doivent se rendre à l’aéroport.
Une entente à 4 h du matin
Air Canada et le syndicat des agents de bord ont rencontré toute la nuit un médiateur fédéral avant de conclure une entente de principe peu après 4 h, mardi matin. L’accord sera soumis au vote de plus de 10 000 membres de la section Air Canada du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).
Dans une déclaration, le syndicat indique que cet accord de principe mettrait «fin au travail non payé» des agents de bord, ajoutant qu'il transforme «radicalement notre industrie après une lutte historique pour affirmer nos droits garantis par la Charte».
La rémunération du travail effectué à l'extérieur des heures de vol était l'une des principales revendications des agents de bord.
«Votre droit de voter sur vos salaires a été préservé», écrit le syndicat dans un message adressé à ses membres sur les réseaux sociaux.
Le syndicat soumettra l'entente à ses membres lors de rencontres virtuelles. Il ajoute qu'il se doit d'indiquer à ses membres qu'ils sont «tenus de coopérer pleinement à la reprise des opérations» d'Air Canada.
La conclusion de cette entente de principe — et l'annonce de la fin de la grève — sera accueillie avec soulagement par les nombreux voyageurs qui ont vu leurs plans être bouleversés depuis le déclenchement de l'arrêt de travail, samedi.
Le premier ministre Mark Carney s’est dit «soulagé» d’apprendre la conclusion de cet accord provisoire.
«J’espère que cet accord permettra aux agents de bord de recevoir une rémunération équitable en tout temps, et qu’il mettra fin aux perturbations qui touchent des centaines de milliers de familles et de travailleurs canadiens et de visiteurs au Canada», écrit-il dans une déclaration publiée sur les réseaux sociaux, mardi après-midi.
Nombreux rebondissements
L'entente de principe a été conclue après de nombreux rebondissements.
Quelques heures seulement après le déclenchement de la grève et l'imposition d'un lock-out, samedi, le gouvernement fédéral est intervenu dans le conflit en invoquant l'article 107 du Code du travail pour contraindre les deux parties à se soumettre à un arbitrage exécutoire.
Cette décision a été contestée par les responsables syndicaux, ce qui a poussé le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) à déclarer lundi que la grève était illégale.
Malgré tout, le syndicat a poursuivi sa grève, jusqu'à la conclusion de l'entente de principe.
«Lorsque nos droits nous ont été retirés, nous nous sommes tenus debout, forts, nous nous sommes battus — et nous avons conclu une entente de principe que nos membres peuvent entériner», a écrit le SCFP dans un communiqué.
La ministre de l'Emploi, Patty Hajdu, avait aussi annoncé lundi en fin de journée que le gouvernement fédéral lançait une enquête sur des allégations de travail non rémunéré dans le secteur aérien.
Dans une déclaration, mardi après-midi, la ministre Hajdu souligne que «l'accord provisoire est une bonne nouvelle». Elle indique que l'enquête est lancée et que son rapport sera rendu public.
Le Congrès du travail du Canada (CTC) soutient mardi que «les agents de bord d'Air Canada, membres du SCFP, ont porté un coup décisif aux employeurs qui croient pouvoir contourner une négociation équitable en invoquant l'article 107 du Code canadien du travail».
«En refusant de se soumettre face à l'ingérence du gouvernement, les agents de bord du SCFP ont démasqué l'article 107 pour ce qu'il est: une violation inconstitutionnelle du droit à la négociation collective libre et équitable par les travailleuses et travailleurs qui est protégé par la Charte. Tout employeur qui pense pouvoir utiliser l'article 107 devrait désormais y réfléchir à deux fois — leur espoir vient de se briser», indique le CTC.



