L'entente de principe survenue in extremis entre Air Canada et le SCFP démontre que «le gouvernement fédéral et la direction d'Air Canada nous ont sous-estimés». Ils ont aussi sous-estimé les 10 000 agents de bord qui ont «mis leur pied à terre» avec courage, affirme le président du SCFP-Québec, Patrick Gloutney.
Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui est affilié à la FTQ au Québec, représente les agents de bord d'Air Canada.
Ceux-ci ont conclu une entente de principe, tôt mardi matin, après l'intervention de la ministre fédérale de l'Emploi, Patty Hajdu, qui a imposé l'arbitrage — ce qui aurait dû mettre fin à la grève et au lock-out — et l'intervention du Conseil canadien des relations industrielles, qui avait déclaré la grève illégale.
Qu'est-ce qui a fait qu'une entente de principe a pu survenir, dans un contexte aussi tendu et envenimé? «On a mis notre pied à terre et on s'est fait respecter comme organisation syndicale», a répondu du tac au tac M. Gloutney, en entrevue.
«C'est clair que le gouvernement fédéral et la direction d'Air Canada nous ont sous-estimés, ont surtout sous-estimé les 10 000 agents de bord et notre syndicat, mais, surtout, le mouvement syndical dans son entièreté», a tranché M. Gloutney.
«L'article 107 (du Code canadien du travail, qui a été invoqué pour imposer l'arbitrage), clairement, brime le droit à la liberté d'association et au droit de négociation. Et même, on pense que c'est totalement illégal et contre la Charte. Le gouvernement, actuellement, par l'entremise d'Air Canada, ont tiré dans leur chaloupe en agissant de la sorte», a estimé M. Gloutney.
Il appartiendra maintenant aux agents de bord de se prononcer sur le contenu de l'entente de principe. M. Gloutney n'a pas révélé le contenu de l'entente, puisque les membres doivent en avoir la primeur.
À venir au Québec?
Comme les présidents de centrales syndicales du Québec, le président du SCFP-Québec craint que d'autres syndicats subissent le même traitement que les agents de bord sur la scène fédérale, avec la nouvelle loi au Québec qui limite les effets des grèves et lock-out.
La nouvelle loi québécoise, adoptée en mai, donne au ministre du Travail le pouvoir d'imposer l'arbitrage aux parties, «s’il estime qu’une grève ou un lock-out cause ou menace de causer un préjudice grave ou irréparable à la population». Elle précise qu'«une telle décision du ministre met fin à la grève ou au lock-out en cours».
La nouvelle loi québécoise introduit aussi la notion de «services minimalement requis», en cas de grève ou lock-out, en plus de ceux qui étaient déjà prévus dans le Code du travail du Québec, à savoir les services essentiels.
Il s'agit alors de «services minimalement requis pour éviter que ne soit affectée de manière disproportionnée la sécurité sociale, économique ou environnementale de la population, notamment celle des personnes en situation de vulnérabilité», précise-t-on dans la nouvelle loi.
«La leçon à tirer de la négociation chez Air Canada, c'est que le mouvement syndical ne se laissera pas faire. Et, comme je l'ai dit depuis le début avec le projet de loi 89 (du ministre Jean Boulet): le gouvernement a voulu partir en guerre avec nous, et il y aura des conséquences», a tonné M. Gloutney.
Les centrales ont déjà fait part de leur volonté de contester éventuellement cette loi devant les tribunaux.

