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Pierre Poilievre présente son alternative au budget de Mark Carney

Le chef de l'opposition officielle a fustigé le déficit de 78,3 milliards $ prévu pour l'exercice financier.

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Le chef conservateur Pierre Poilievre présente sa réponse au budget fédéral à la Chambre des communes à Ottawa, le mercredi 5 novembre 2025. (Adrian Wyld/La Presse canadienne)

Le chef conservateur Pierre Poilievre a plaidé vendredi pour la suppression des obstacles à la construction résidentielle et la promotion de la concurrence sur le marché, lors d'un discours présentant son alternative au budget libéral déposé plus tôt cette semaine. 

M. Poilievre s'adressait à un auditoire d'hommes d'affaires au Club économique du Canada, à quelques rues du Club canadien de Toronto, où le premier ministre Mark Carney exposait simultanément les grandes lignes de son budget fédéral. 

Le discours de M. Poilievre, qui reprenait certaines propositions de la dernière campagne électorale conservatrice, défendait les principes du libre marché.

«La véritable différence entre nous, entre les libéraux de Carney et les conservateurs de Poilievre, est la suivante: ils croient qu'il faut vous créer de nouveaux obstacles, puis vous demander de l'aide pour que vous les surmontiez, a-t-il déclaré. Mais nous ne devrions rien faire de tout cela. Nous devrions vous laisser tranquilles.»

Le chef de l'opposition officielle a fustigé le déficit de 78,3 milliards $ prévu pour l'exercice financier, soulignant qu'il s'agissait du plus important jamais imposé aux contribuables canadiens. 

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Les libéraux ont présenté leur budget de mardi comme un plan visant à réduire les dépenses et à investir davantage face aux droits de douane américains. Après avoir pris en compte les objectifs de réduction des coûts d'Ottawa, le budget propose près de 90 milliards $ de nouvelles dépenses sur cinq ans, principalement consacrées à la création d'infrastructures.

M. Poilievre a critiqué cette approche face à la dette.

«Si cela se produit, ce seront les cinq années les plus coûteuses de toute l'histoire du Canada. Et il ne faut pas s'y prendre, ce n'est pas dû à la baisse des revenus engendrée par la guerre commerciale, mais à l'augmentation des dépenses publiques», a-t-il soutenu.

L'agence de notation financière Fitch a publié jeudi une nouvelle évaluation en réponse au budget 2025. Tout en maintenant sa cote AA+ pour le Canada, l'agence a souligné des risques liés à ce nouveau plan de dépenses.

«Bien que la cote du Canada soit globalement stable, l'expansion budgétaire persistante et l'augmentation du fardeau de la dette ont fragilisé son profil de crédit et pourraient accroître la pression sur sa notation à moyen terme, a prévenu l'agence. Cette situation pourrait être exacerbée par une sous-performance économique persistante causée par les risques tarifaires et les défis structurels, notamment la faible productivité.»

M. Carney a été interrogé vendredi sur la trajectoire du déficit canadien. Il a déclaré que le ratio dette/PIB du Canada est stable dans les planifications et que la cote de crédit du pays — toujours AAA auprès d'autres agences, comme Moody's et S&P — demeure parmi les meilleures des grandes économies mondiales.

Il a reconnu qu'il existe un risque que l'économie «ne croisse pas assez vite» et que les niveaux de productivité, actuellement en berne, ne remontent pas, ce qui aggraverait la dette du Canada.

«Une restructuration assez importante de l'économie est nécessaire en raison des changements survenus dans le monde. La solution? Investir, a affirmé M. Carney. Notre déficit actuel ne sert qu'à financer les investissements.»

Réduire le poids administratif

M. Poilievre a affirmé que M. Carney créait plus de bureaucratie pour la gestion de secteurs essentiels, comme celui de la construction résidentielle, et a soutenu que cette approche ne faisait qu'ajouter des obstacles aux promoteurs immobiliers. 

Il a soutenu que la construction résidentielle devrait être exempte de taxes, affirmant que la proposition libérale d'exempter certains nouveaux acheteurs de la taxe de vente ne suffisait pas. 

Selon le chef conservateur, Ottawa devrait réduire les formalités administratives qui empêchent les entreprises d'extraire, d'exploiter et d'exporter les ressources naturelles canadiennes. Il a exhorté Ottawa à autoriser les entreprises à expédier du pétrole et du gaz naturel liquéfié canadiens depuis la côte de la Colombie-Britannique vers l'Asie.

M. Poilievre a également réitéré son appel à l'abolition de la taxe carbone industrielle et des autres taxes et réglementations qui, selon lui, font grimper les coûts pour les agriculteurs et la chaîne d'approvisionnement alimentaire.

Le chef conservateur a également indiqué appuyer le projet des libéraux d'instaurer un cadre pour les cryptomonnaies stables, dont la valeur est généralement indexée sur celle d'un autre actif pour assurer sa stabilité. 

Mais il a précisé que ce cadre doit être conçu de manière à réduire les coûts et à favoriser la concurrence dans le secteur financier.

«Il ne devrait pas servir à concentrer davantage le pouvoir dans nos systèmes de paiement ni à créer une monnaie numérique de banque centrale», a souligné M. Poilievre.

 

Il a déclaré que les conservateurs appuieraient tout parti à la Chambre des communes qui tenterait de mettre en œuvre un système de monnaie stable afin d'améliorer le fonctionnement du secteur financier canadien, où le traitement des paiements est, selon lui, extrêmement lent.

Les conservateurs ont perdu deux députés depuis le dépôt du budget mardi. Chris d'Entremont a rejoint les libéraux, tandis que Matt Jeneroux a annoncé sa démission prochaine du Parlement. La date exacte du départ de M. Jeneroux demeure incertaine.

L'allocution de M. Poilievre est survenue juste avant que la Chambre des communes ne rejette un amendement du Bloc Québécois au budget. Ce dernier aurait refusé intégralement le plan de dépenses des libéraux.

Les conservateurs ont voté avec les libéraux pour rejeter l'amendement. Le vote final sur le budget est prévu pour la semaine du 17 novembre.

— Avec la collaboration de Maan Alhmidi et Sharif Hassan à Toronto

 
 

Craig Lord

Craig Lord

Journaliste