Tout avait bien commencé après que Ravinder Kaur Sidhu a donné naissance à son troisième enfant, mais elle n'est jamais rentrée chez elle à Brampton, en Ontario, puisqu'elle est décédée quelques jours plus tard à l'hôpital. Son mari, Gurinder Sidhu, affirme qu'elle est morte d'une septicémie post-partum après une défaillance multiviscérale, ce qui aurait pu être évité, selon lui, si ses symptômes avaient été correctement pris en charge dès le début.
Le couple s'est rendu à l'hôpital Credit Valley de Mississauga le 18 juin et, tôt le lendemain matin, ils ont accueilli leur nouveau-né.
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News.
Gurinder Sidhu affirme que l'accouchement s'est bien déroulé, mais précise que sa femme avait une déchirure vaginale qui a nécessité des points de suture.
Selon la chronologie des événements établie par le mari, Ravinder a commencé à avoir de la fièvre et des tremblements violents vers 11h15. Pendant un court moment, Ravinder avait même du mal à parler.
«Elle vomissait, elle avait très mal au bassin», raconte Gurinder Sidhu. Il a précisé que les médecins avaient effectué une analyse sanguine, mais pas celle qui permettait de déterminer si des bactéries se développaient dans son sang.
«[Les médecins] auraient dû lui administrer des antibiotiques à large spectre en attendant les résultats de la prise de sang, puis, en fonction des résultats, lui prescrire des antibiotiques ciblés, mais rien n'a été fait dans notre cas et toute la journée a été perdue.»
M. Sidhu affirme que sa femme n'a reçu aucun antibiotique pendant environ 30 heures après l'apparition des premiers symptômes.
Le 20 juin, la sœur de Ravinder, infirmière en soins intensifs à Buffalo, dans l'État de New York, s'est rendue à Credit Valley pour défendre sa sœur «après avoir constaté une négligence grave» à l'hôpital. Selon Gurinder Sidhu, cette dernière avait signalé que Ravinder semblait souffrir d'un choc septique, mais que cette observation avait été ignorée.
Selon son mari, Ravinder a contracté une infection bactérienne à streptocoque du groupe A à l'hôpital de Mississauga. Les médecins traitants ont d'abord pensé que la douleur était due à l'accouchement, mais lorsqu'ils ont soupçonné une septicémie, ils ont changé leur théorie pour suggérer que l'infection provenait d'un traitement d'acupuncture qu'elle avait reçu quelques jours auparavant, ignorant la déchirure du deuxième degré qu'elle avait subie lors de l'accouchement.
À VOIR AUSSI | Nourrir un bébé prématuré avec du lait maternel «ça sauve des vies»
Selon Gurinder Sidhu, l'infection a gravement endommagé l'utérus de sa femme et s'est propagée jusqu'à sa jambe.
Le 21 juin, Ravinder a subi une chirurgie de débridement de la jambe, une intervention visant à retirer les tissus infectés, car elle avait développé une fasciite nécrosante, une maladie qui ronge les tissus et qui peut survenir lors d'un accouchement ou d'une intervention chirurgicale. Selon la Sepsis Alliance, une organisation américaine de défense des patients, cette maladie doit être traitée rapidement afin d'empêcher la propagation de l'infection et avant que la septicémie ne se développe.
Gurinder Sidhu a raconté que l'équipe d'obstétrique n'avait d'abord trouvé aucun signe visible d'infection lorsqu'elle avait examiné l'utérus de Ravinder pendant l'opération, et qu'elle avait donc conclu que la jambe était la source la plus urgente de sa douleur. Cependant, quelques heures plus tard, elle a été transportée d'urgence pour une hystérectomie, où ses ovaires et son utérus ont été jugés «complètement nécrosés», selon les notes prises par le mari.
Dans l'après-midi du 22 juin, Ravinder a été transférée au Sunnybrook Health Sciences Centre. Un rapport opératoire, examiné par CTV News Toronto, indique qu'ils ont pratiqué un pontage aorto-fémoral gauche, une intervention qui crée une nouvelle voie pour la circulation sanguine.
Ravinder Kaur Sidhu est décédée à Sunnybrook tôt le matin du 23 juin. L'hôpital a refusé de commenter, invoquant la nécessité de protéger la vie privée des patients.

«Signaux d'alarme»
Mansour Haeryfar, professeur d'immunologie à l'Université Western, explique à Adrian Ghobrial de CTV News que la septicémie est une réponse immunitaire excessive à une infection, pouvant entraîner la production de médiateurs inflammatoires.
«Ce que nous appelons un choc cytokinique peut en fait entraîner des dommages collatéraux aux organes vitaux et peut être potentiellement mortel», a-t-il expliqué lors d'une entrevue mardi. «En général, lorsque vous avez ce type de réponse, si elle n'est pas contrôlée en clinique, les conséquences peuvent être vraiment fatales.»
Selon lui, le traitement de la septicémie est essentiellement une course contre la montre car un dépistage et un diagnostic précoces sont essentiels pour prévenir toute complication à long terme de la réponse immunitaire d'une personne ou de ses organes vitaux. Le professeur a même utilisé l'acronyme TIME pour désigner les signes indiquant qu'une personne a contracté une septicémie, qui signifie température, infection, déclin mental et maladie excessive.
«Lorsque vous voyez ces signaux d'alarme, vous devez intervenir et de nombreux professionnels sont en fait formés dans les unités de soins intensifs et les unités de soins critiques pour traiter ce type de symptômes», a prévenu M. Haeryfar.
«Elle a été ignorée»
Des dizaines de proches de Ravinder, qu'il s'agisse de patients, de collègues ou d'amis, ont rendu hommage en ligne à la suite de son décès, exprimant leurs sincères condoléances à sa famille.
Gurinder Sidhu explique qu'il cherche maintenant à faire avancer sa famille, seul pour décider du sort des trois cliniques de physiothérapie de sa défunte épouse, tout en s'occupant de leurs deux fils et de leur fille, tous âgés de moins de huit ans.
«Elle était impliquée dans chaque étape», a expliqué le comptable de 35 ans, ajoutant qu'il envisageait maintenant de vendre leurs entreprises, pour lesquelles ils avaient tous deux travaillé si dur.
«Nous sommes dévastés. Tout ce que nous avions construit dans notre vie a disparu. Elle était le centre de l'univers de nos enfants.»
Le ministère de la Santé de l'Ontario a qualifié la mort de Ravinder de «tragique et troublante», déclarant qu'il attendait de tous les hôpitaux de la province qu'ils maintiennent «les normes les plus élevées en matière de soins aux patients» et qu'ils respectent les exigences d'examen et de divulgation détaillées dans la loi sur les hôpitaux publics pour les incidents graves.
Gurinder Sidhu souhaite que Credit Valley rende des comptes et a depuis déposé plainte contre l'hôpital et auprès de l'ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario. Ce dernier ne pouvait pas commenter la plainte de M. Sidhu tant qu'elle n'avait pas abouti à une décision publique en vertu de la législation.

«Toutes les personnes impliquées doivent être tenues responsables», a déclaré Sidhu. «Quand une patiente se trouve dans un tel état et que personne ne s'en soucie, qu'elle est ignorée, totalement ignorée, comme si ce qui lui arrivait n'avait aucune importance.»
«Et si ce n'est pas un meurtre, alors qu'est-ce que c'est? [Les médecins] n'ont rien fait. Ils ont attendu — juste pour de simples antibiotiques à 2$ — ils ont attendu pendant 30 heures.»
Trillium Health Partners, qui supervise Credit Valley, a présenté ses condoléances à la famille de Ravinder, qualifiant son décès de «perte profonde» et exprimant sa sympathie à tous ceux qui sont en deuil. Cependant, l'organisme de santé n'a pas pu commenter directement les détails médicaux de Ravinder, invoquant la confidentialité des patients.
«Nous prenons très au sérieux les préoccupations soulevées par nos patients et leurs familles. Dans le cadre de notre engagement à respecter les normes de soins les plus élevées, nous avons mis en place un processus d'examen approfondi mené par une équipe interdisciplinaire d'experts cliniques», a-t-on écrit par courriel. «Les questions relatives à la reconnaissance des symptômes, aux signes de maladie, aux délais de traitement et aux décisions de transfert sont au cœur même de notre processus d'examen. Nous veillons à ce qu'elles soient traitées directement avec les patients et leurs familles.»
M. Sidhu a également lancé une pétition en ligne qui, mercredi matin, avait recueilli plus de 4 900 signatures, appelant à un examen indépendant de toutes les décisions prises pendant le séjour de Ravinder et à la publication des résultats de l'enquête interne menée par l'hôpital.
L'enquête est toujours en cours et devrait être terminée dans les prochains mois.
La mort de Ravinder a profondément bouleversé la famille de M. Sidhu. Ce dernier espère qu'aucune autre famille n'aura à vivre le traumatisme causé par une perte soudaine comme celle-ci. «Nous étions une famille très heureuse et nous vivions notre rêve canadien», a-t-il confié.
Avec des informations d'Adrian Ghobrial pour CTV News National


