Le chef conservateur Pierre Poilievre affirme que les travailleurs étrangers temporaires volent les emplois des jeunes Canadiens dans un contexte de chômage élevé chez les jeunes.
«Alors que le taux de chômage de nos jeunes atteint son plus haut niveau depuis un quart de siècle, Mark Carney prévoit faire venir cette année un nombre record de travailleurs étrangers temporaires qui remplaceront les jeunes Canadiens», a déclaré M. Poilievre.
Les données de Statistique Canada indiquent que le chômage des jeunes a atteint 14,6 % en juillet. Il s'agit du taux le plus élevé depuis 2010, excluant la pandémie de COVID-19.
M. Poilievre a fait ce commentaire mercredi matin, lors d'une conférence de presse à Charlottetown, plusieurs jours après la publication par le gouvernement des données de milieu d'année sur l'immigration.
Pierre Poilievre a déclaré lundi sur les réseaux sociaux que le gouvernement avait dépassé les plafonds fixés pour les visas de travailleurs temporaires et a accusé le gouvernement d'être «hors de contrôle» en matière d'immigration. Le ministère de l'Immigration soutient que cette allégation est fausse.
Pour la première fois l'an dernier, le Canada a imposé des limites au nombre de travailleurs étrangers temporaires admis, alors que le gouvernement était aux prises avec une crise de l'accessibilité au logement, causée en partie par une croissance démographique rapide.
Les données fédérales montrent que le Canada visait à délivrer 82 000 visas aux travailleurs étrangers temporaires cette année, mais qu'il en a déjà délivré 105 000.
Un représentant du ministère de l'Immigration a toutefois indiqué que ce chiffre de 105 000 comprenait également les renouvellements de visas pour les personnes déjà présentes au Canada. Il a précisé que c'est en fait 33 722 de ce nombre qui concerne les nouveaux arrivants, soit environ 42 % de la cible gouvernementale pour l'année.
Près de 302 000 visas supplémentaires ont été remis entre janvier et juin dans le cadre du Programme de mobilité internationale, ce nombre comprend également les visas renouvelés. L'objectif du Canada pour ce programme était d'accueillir 286 000 nouveaux arrivants en 2025.
L'objectif global des deux programmes est d'admettre environ 368 000 travailleurs temporaires en 2025, un chiffre qui doit baisser à environ 211 000 l'an prochain.
Les deux programmes visent les travailleurs étrangers temporaires, mais le Programme de mobilité internationale permet aux personnes admissibles de venir au Canada et d'y travailler sans que l'employeur n'ait à remplir une étude d'impact sur le marché du travail pour démontrer qu'il n'a pas trouvé de Canadien pour occuper le poste. Les personnes admissibles au Programme de mobilité internationale sont autorisées en vertu de certains accords de libre-échange ou s'ils apportent un avantage économique, culturel ou concurrentiel au Canada.
Une porte-parole de la ministre de l'Immigration, Lena Diab, a indiqué qu'il y avait eu une baisse importante du nombre de travailleurs étrangers temporaires arrivant au Canada au cours des six premiers mois de l'année, passant de plus de 245 000 en 2024 à 119 000.
Nouvelle priorité
La stratège conservatrice Kate Harrison, vice-présidente de Summa Strategies, a affirmé que la position générale de M. Poilievre sur l'immigration n'a pas changé depuis les élections, mais qu'elle a pris plus d'importance.
«Je pense donc que ce que les conservateurs cherchent à souligner ici est un autre engagement du gouvernement, ou du moins une certaine attente, concernant les travailleurs étrangers temporaires et l'immigration, qui devient une préoccupation de plus en plus importante pour les Canadiens», a expliqué Mme Harrison.
John Shields, professeur de sciences politiques à l'Université métropolitaine de Toronto, a déclaré qu'il n'était pas surprenant de voir M. Poilievre mettre davantage l'accent sur l'immigration, car c'est en quelque sorte le talon d'Achille du gouvernement libéral.
«Les sondages d'opinion ont considérablement évolué, au cours des deux dernières années en tout cas, avec une plus grande résistance ou un sentiment accru que nous accueillons trop d'immigrants», a indiqué M. Shields.
L'ancien premier ministre Justin Trudeau a établi un lien entre les hauts niveaux d'immigration et les enjeux d'accessibilité financière et de crise du logement vers la fin de son mandat, a ajouté M. Shields.
Même avec les récentes réductions prévues, les objectifs d'immigration temporaire et permanente sont supérieurs aux normes historiques. M. Shields a affirmé que ces efforts devront se poursuivre pour assurer la santé de l'économie, car le taux de natalité au Canada est inférieur au seuil de remplacement.
«La quasi-totalité de la croissance du marché du travail est désormais liée à l'immigration. Si nous voulons renouveler la main-d'œuvre, renouveler la population et la faire croître, il faudra maintenir des niveaux d'immigration assez élevés», a-t-il déclaré.
M. Poilievre a annoncé que les conservateurs proposeront des réformes du système d'immigration.
Mme Harrison a indiqué que cela pourrait permettre aux conservateurs de contraster leur approche avec celle du gouvernement Carney, qui, selon elle, s'est davantage concentré sur les affaires internationales, comme les relations canado-américaines et le renforcement des liens avec l'Europe.
«Je pense que cela laisse une grande marge de manœuvre aux conservateurs et à M. Poilievre pour orienter le discours et créer un contraste en matière de politique intérieure, notamment en matière d'immigration, de logement, d'accessibilité financière et de criminalité; ces quatre éléments en particulier», a-t-elle soutenu.
Le plan actualisé des niveaux d'immigration devrait être publié cet automne.
L'objectif actuel est de ramener le nombre de résidents temporaires à 5 % de la population totale du Canada. La proportion de résidents non permanents au Canada s'élevait à 7,1 % de la population au 1er avril.

