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Le Musée du Manitoba n'est pas amer après la vente de la charte de La Baie

La charte royale vieille de 355 ans qui a donné naissance à La Baie finira au Musée canadien de l'histoire.

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Le Musée du Manitoba possède peut-être l'une des plus importantes collections d'artefacts de La Baie d'Hudson, mais sa PDG n'est pas amère que le joyau de la couronne du détaillant disparu ne soit pas destiné à son institution.

Un nouveau foyer sera bientôt réservé à la charte royale vieille de 355 ans qui a donné naissance à La Baie, lui conférant un contrôle extraordinaire sur une vaste étendue de terres non cédées et une influence considérable sur les premières relations des colons avec les peuples autochtones.

Elle finira au Musée canadien de l'histoire, sous réserve de l'approbation par le tribunal d'un plan permettant à la famille Weston d'acheter la charte et d'en faire don à l'organisme de Gatineau, en Outaouais.

«Je suis heureuse qu'elle ait abouti dans un musée. Je pense que c'est important, a indiqué Dorota Blumczynska, PDG du Musée du Manitoba à Winnipeg. Mais je ne vais pas édulcorer le fait que nous espérions certainement qu'elle serait au Manitoba et qu'elle serait au Musée du Manitoba.»

Le document est devenu disponible après que La Baie a déposé une demande de protection contre ses créanciers en mars, sous le poids d'une dette colossale. Afin de récupérer le maximum d'argent possible pour ses créanciers, elle a liquidé tous ses magasins et a élaboré un plan pour mettre aux enchères ses biens les plus précieux, soit 1700 œuvres d'art et 2700 artefacts.

Avant même le début des enchères, les Weston ont accouru, proposant à La Baie un achat de 12,5 millions $ et un don immédiat du document.

Avant l'annonce, les historiens et les communautés autochtones craignaient que la charte ne finisse sur le mur d'un collectionneur privé fortuné, privant ainsi le document historique de la vue du public.

Beaucoup pensaient que la charte convenait mieux à une institution publique et ont désigné le Musée du Manitoba comme un lieu idéal.

Après tout, un don de la Baie d'Hudson en 1994 lui a permis de récupérer 27 000 objets liés à l'entreprise, dont des meubles provenant de l'ancien siège social de l'entreprise à Londres, en Angleterre, et un canot en écorce de bouleau du début du XXe siècle.

La charte est «un élément très complémentaire à toutes les histoires que nous partageons sur la Compagnie de la Baie d'Hudson au Musée du Manitoba, a reconnu Mme Blumczynska. Si elle avait pu être ici, cela aurait été merveilleux, mais ce n'était pas destiné».

Un achat n'aurait pas été «possible», car le Musée du Manitoba dispose de «moyens limités».

Elle n'a même pas tenté de solliciter les donateurs pour qu'ils effectuent un achat en son nom, car La Baie d'Hudson est passée si rapidement de la protection contre les créanciers à la faillite complète, a-t-elle ajouté.

«Nous n'avions pas les moyens de réagir rapidement pour inciter les donateurs à monter une offre», a expliqué Mme Blumczynska.

Un autre lieu d'accueil possible pour la charte aurait pu être les Archives du Manitoba, qui abritent les archives de la Compagnie de la Baie d'Hudson. Celles-ci comprennent des cartes de La Baie datant de 1709, des vidéos, des enregistrements audio et tellement de journaux, de lettres et de notes de recherche que les documents textuels occupent à eux seuls plus de 1500 mètres linéaires d'espace de rangement.

Interrogé sur le projet de charte, le porte-parole du gouvernement du Manitoba, Glen Cassie, a mentionné que «pour le moment, il ne serait pas approprié pour la province de se prononcer».

Il a renvoyé La Presse Canadienne à Anna Gibson Hollow, présidente de l'Association des archivistes canadiens.

Elle a souligné que les archivistes ont des «sentiments mitigés» à l'égard du projet des Weston. Ils sont soulagés que la charte soit hébergée dans un organisme du patrimoine canadien, mais un peu déçus qu'elle ne soit pas destinée aux Archives du Manitoba, qui sont «largement équipées pour préserver et donner accès à la charte».

Une bonne option

Pourtant, de nombreuses raisons font du Musée canadien de l'histoire une solution de rechange appropriée.

Ses origines remontent à 1856 et sa collection est si vaste qu'elle retrace l'histoire du Canada depuis l'aube de l'occupation humaine jusqu'à nos jours, soit une période d'environ 15 000 ans.

De plus, étant une société d'État, ce don fera de la charte «la propriété du peuple canadien», ont déclaré les Weston dans une lettre envoyée en juin à La Baie pour présenter le projet.

Le don est assorti d'une clause stipulant que la charte sera partagée avec d'autres musées et groupes autochtones à travers le pays.

Le document a rarement été vu par le public. Il a longtemps séjourné au siège social de La Baie à Toronto avant d'être récemment transféré dans un local sécurisé en attendant sa vente aux enchères.

Il avait été prêté temporairement au Musée du Manitoba en 2020, mais la pandémie de COVID-19 a limité les possibilités de consultation publique.

Mme Blumczynska a affirmé que son musée serait «très heureux de le retrouver».

«Nous avons hâte de le voir à nouveau au Manitoba et auprès des Manitobains», a-t-elle soutenu.

Elle accueillerait également avec plaisir tout autre donateur d'artefacts de La Baie d'Hudson qui souhaiterait les acquérir lors de l'éventuelle vente aux enchères de l'entreprise, car la collection du musée est en constante croissance.

«Nous considérons la collection de la Compagnie de la Baie d'Hudson non pas comme un élément statique, mais plutôt comme un élément que nous continuons d'essayer de mieux comprendre et de combler les lacunes grâce à la collection qui est peut-être encore entre les mains des Canadiens et qui souhaitent généreusement la donner au public», a-t-elle déclaré.

«Chaque année, des descendants ou des familles qui découvrent des objets dans leur sous-sol, leur grenier ou leur collection s'adressent au musée pour obtenir un artefact et en font ensuite don», a-t-elle ajouté.

Tara Deschamps

Tara Deschamps

Journaliste