La Baie d'Hudson a des chances de voir le tribunal lui donner raison dans le litige l'opposant à d'anciens propriétaires, selon des avocats non impliqués dans le dossier.
Les propriétaires de 23 baux refusent de les céder à la milliardaire britanno-colombienne, Ruby Liu, qui souhaite lancer une nouvelle chaîne de grands magasins dans d'anciens locaux de la Baie.
Selon ces avocats, La Baie pourrait demander au tribunal de céder les baux à Mme Liu, même si leurs détenteurs s'y opposent parce qu'ils se disent ne pas être suffisamment informés du plan de la femme d'affaires.
En réfléchissant à cette question, le tribunal pourrait examiner si la vente des baux a obtenu l'appui du contrôleur judiciaire nommé pour aider l'entreprise à se protéger contre ses créanciers, souligne l'un de ces avocats, Jeff Lee, du cabinet MLT Aikins LLP.
Le contrôleur judiciaire dans ce dossier, Alvarez & Marsal, n'a pas révélé son opinion au sujet de l'entente entre La Baie et Mme Liu. Il n'a pas répondu aux demandes de commentaires de La Presse Canadienne.
«Une entreprise, avant de déposer une requête formelle au tribunal, va en parler avec [le contrôleur], raconte Me Lee. Elle n'avancera pas à tâtons en espérant pour le mieux.»
Me Lee ajoute que le tribunal peut aussi se demander si le nouveau locataire proposé est capable de payer le loyer et de remplir ses obligations.
Mme Liu, qui a fait fortune sur le marché immobilier chinois, semble être très riche, mais n'a pas d'expérience à titre de locataire d'un espace commercial.
Et le tribunal peut aussi examiner si la cession des baux à Mme Liu est «approprié».
«La question à se poser est celle-ci: ce qui est proposé respecte-t-il ce que toutes les parties avaient signé ou l'une d'entre elles tente-t-elle de modifier le bail de manière si radicale que cela est inapproprié?»
Le nœud du problème peut résider dans cet élément.
«On ne peut pas se placer sous la protection de la loi à titre de locataire et obliger son propriétaire à renégocier le bail», lance Peter Tolensky, partenaire au sein du cabinet Lawson Lundell LLP.
Dans un document remis par les avocats de Mme Liu aux propriétaires, et dont La Presse Canadienne a obtenu copie, la femme d'affaires mentionne qu'elle compte respecter les baux tels qu'ils sont. Le document ne fait pas état des aires de jeux pour enfants, des aires de restauration et des espaces de divertissement que Mme Liu dit vouloir installer dans les succursales.
On ignore si les baux de la Baie permettent une telle activité.
Un tribunal examinant la cession d'un bail tiendra compte du contexte. «Il se demandera si l'univers du propriétaire est mis sens dessus dessous en acceptant un nouveau locataire», explique Geoffrey Dabbs, un partenaire du cabinet Gehlen Dabbs Cash.
«Si cela ne représente qu'un léger inconvénient pour le propriétaire, il est plus vraisemblable que le juge ordonnera la cession du bail», ajoute-t-il.
Et si La Baie refuse de confirmer qu'elle tentera d'obtenir l'accord du tribunal, c'est parce qu'elle le devoir de lui démontrer qu'elle fait de son mieux pour rembourser ses créanciers, souligne l'avocat.
Le litige
Cette campagne pour les cessions de bail survient quelques mois après que La Baie d'Hudson, la plus ancienne entreprise du Canada, s'est placée sous la protection de ses créanciers, en mars, car elle est incapable de faire face à une dette croissante.
La chaîne avait annoncé en mai qu'elle avait choisie Mme Liu pour acquérir jusqu'à 28 baux pour le détaillant et ses enseignes sœurs Saks en Alberta, en Colombie-Britannique et en Ontario.
Trois de ces baux se trouvaient dans des centres commerciaux de la Colombie-Britannique appartenant à Mme Liu : Tsawwassen Mills, le centre commercial Mayfair et le centre commercial Woodgrove. Des documents judiciaires indiquent que la femme d'affaires paiera 2 millions $ pour chacun de ces baux.
Les propriétaires de 23 des emplacements visés par Mme Liu refusent le transfert des baux. Plusieurs se sont dits «très troublés» par leurs interactions avec elle. Ils lui reprochent de n'avoir déposé aucun plan concret jusqu'à présent.
Il n'est pas rare de voir des propriétaires s'opposer à un transfert d'un bail. Un bail non cédé revient au propriétaire qui peut alors choisir son prochain locataire et les modalités du contrat.
«Ce sont des baux clés. Ils étaient sans doute très favorables à La Baie ou au locataire à plusieurs aspects», dit Me Tolensky en faisant allusion au faite que ces locataires obtiennent des modalités de bail fort attrayantes.

