Le ministre fédéral de la Sécurité publique, David McGuinty, a suggéré mardi que certaines informations sur le plan frontalier amélioré du Canada pour mettre fin au fentanyl et aux passages illégaux de la frontière vers les États-Unis n'avaient peut-être pas été communiquées au président américain Donald Trump avant que le premier ministre Justin Trudeau ne lui parle par téléphone lundi.
Le Canada a publié pour la première fois le plan de 1,3 milliard $ en décembre, quelques semaines après que Donald Trump a déclaré qu'il allait imposer au Canada des droits de douane de 25 % si le pays ne faisait pas plus pour sécuriser sa frontière avec les États-Unis.
Les ministres canadiens, dont David McGuinty, ont passé des semaines à faire des allers-retours entre la Floride et Washington, D.C., pour rencontrer des assistants du président et des membres de son cabinet afin de promouvoir ce plan. .
Vendredi après-midi, la veille de la date limite du 1er février fixée par M. Trump pour les droits de douane, M. McGuinty, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, et le ministre de l'Immigration, Marc Miller, ont rencontré le «tsar des frontières» américain Tom Homan. Le lendemain, M. Trump a signé le décret exécutif qui prévoit que les tarifs douaniers — 10 % sur l’énergie canadienne et 25 % sur tout le reste — entreront en vigueur le 4 février.
Quelques heures après la signature de ce document, M. Trudeau s’est adressé aux Canadiens et a mentionné qu’il n’avait pas pu parler à M. Trump depuis son investiture le 20 janvier, mais qu’il continuerait d’essayer. Cela s’est finalement produit lundi, le premier appel le matin, puis un deuxième en milieu d’après-midi. Après le deuxième appel, le premier ministre a déclaré que les tarifs douaniers étaient suspendus pendant un mois dans un message sur les médias sociaux.
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Le ministre McGuinty a souligné que l’un des éléments du plan du Canada consiste à formaliser une force de frappe conjointe Canada-États-Unis pour lutter contre le crime organisé, le fentanyl et le blanchiment d’argent que le pays avait proposé «il y a quelque temps». Mais il a suggéré que tous ces détails n’étaient peut-être pas parvenus à M. Trump.
«Ces options étaient des options que nous envisagions déjà, a-t-il expliqué. Toutes ces mesures n’ont pas nécessairement été évoquées ou connues par nos deux gouvernements.»
M. McGuinty a également déclaré que la contribution de 200 millions $ promise par le Canada pour lutter contre le crime organisé et le trafic de fentanyl s'ajoute à l'enveloppe de 1,3 milliard $ déjà annoncée en décembre par Ottawa.
Lorsqu’on lui a demandé ce qui, selon lui, a fait bouger les choses pour convaincre Donald Trump de mettre fin aux tarifs douaniers, M. McGuinty a souligné certaines nouvelles mesures, notamment la nomination d’un «tsar du fentanyl» et la liste des cartels de la drogue comme entités terroristes.
«Je n’étais pas présent lors de l’appel avec le premier ministre et le président, numéro 1. Et numéro 2, nous avons continué à avancer et à maintenir la relation. Nous avons continué à rappeler à nos homologues à Washington et à la Maison-Blanche que nous faisons des progrès», a-t-il avancé.
Il a ajouté que «tout ce que nous avons présenté au président, tout ce que nous avons présenté à son équipe était fondé et construit sur» les statistiques des États-Unis.
Des travailleurs de première ligne à la frontière
Justin Trudeau a également précisé que 10 000 travailleurs de première ligne «travaillent et travailleront» pour protéger la frontière, un nombre similaire aux 10 000 soldats de la Garde nationale que le Mexique a commencé à envoyer à sa frontière alors qu'il cherchait également à obtenir que M. Trump renonce aux tarifs douaniers de 25 %.
Le chef conservateur Pierre Poilievre a demandé lundi que des soldats canadiens soient envoyés à la frontière dans le cadre de la réponse du Canada aux menaces de tarifs, mais M. McGuinty a expliqué à La Presse Canadienne qu'il n'y avait aucun plan pour le faire.
«Cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de partage d'informations ou de partage de renseignements. Cela se fait naturellement», a soutenu M. McGuinty.
Le ministre a précisé que ce nombre pourrait englober un large éventail de fonctionnaires et d'employés, y compris des agents des services frontaliers en première ligne et des agents du renseignement en coulisses.
«Nous allons voir où il est le plus logique de déployer les ressources dont nous disposons, et, si nous en avons besoin, nous augmenterons le nombre», a-t-il ajouté.
L'Agence des services frontaliers du Canada compte déjà 8500 travailleurs de première ligne.
Le ministre McGuinty, qui était à Emerson, au Manitoba, mardi matin, pour assister à un exercice de sécurité frontalière, a admis que le libellé du nouveau poste, «tsar du fentanyl», avait été choisi avec soin. Mais il nie qu'Ottawa ait ainsi voulu plaire au président Trump.
Ottawa a annoncé la création de ce nouveau poste de «tsar du fentanyl» lundi en réponse à la menace du président Trump d'imposer des tarifs douaniers de 25 % sur les importations canadiennes.
Moins d'un pour cent du fentanyl entrant aux États-Unis provient du Canada, et M. McGuinty affirme que les passages illégaux de migrants vers les États-Unis en provenance du Canada ont diminué de 89 % depuis l'été dernier.
«Le président Trump a un travail à faire. Laissez-moi être clair à ce sujet pendant une seconde. Il s'est présenté aux élections, il avait un programme, il a fait des promesses à son peuple et, dans son esprit, il tient ces promesses, a déclaré M. McGuinty. Nous devons respecter cela».
