Il est difficile au Québec d’obtenir une première consultation avec un médecin spécialiste, surtout que plusieurs listes d’attente s’enchevêtrent, déplore le vérificateur général par intérim, Alain Fortin.
Dans son rapport déposé à l’Assemblée nationale jeudi, M. Fortin souligne que, bien que les problèmes soient «connus depuis plusieurs années», le déploiement de mesures pour améliorer la situation est «lent».
Il constate que dans 10 spécialités, la majorité des demandes de consultation de priorité C et D sont hors délais. Une priorité C est, par exemple, une épilepsie non contrôlée, et une priorité D, de l’arthrose invalidante ou des otites à répétition.
Le problème serait particulièrement criant en physiatrie à Montréal et en Montérégie, où les patients inscrits sur les listes d’attente des centres de répartition des demandes de services (CRDS) attendent en moyenne plus de 600 jours.
Autre exemple: sur la Côte-Nord, le délai d’attente moyen pour être vu en ophtalmologie (priorités C et D) est de plus de 500 jours.
Or, seuls 20 % des rendez-vous offerts par les médecins spécialistes passent par les CRDS. Pour le reste, le gouvernement est dans le noir, constate le vérificateur.
«En raison des multiples listes d’attente, soit celles des CRDS et de chaque centre hospitalier, il est difficile d’assurer un accès équitable aux services médicaux spécialisés», signale-t-il dans son rapport.
Par exemple, à l’Hôpital Pierre-Le Gardeur, les patients avec un problème de priorité C qui étaient passés par le CRDS attendaient 688 jours en moyenne pour être vus, alors que les autres attendaient seulement 397 jours.
Selon un sondage réalisé en 2025 par le Collège des médecins, plus d’un Québécois sur quatre aurait consulté un médecin au privé au cours des 12 mois précédant le sondage en raison des difficultés à obtenir un rendez-vous au public.
Équilibre budgétaire: le VG s’inquiète pour les services
Comme si ce n’était pas assez, le retour à l’équilibre budgétaire s’annonce ardu, prévient M. Fortin.
Il constate que le ministre des Finances, Eric Girard, n’a pas établi dans son plan comment il compte récupérer environ 8,5 milliards $ pour équilibrer ses finances d’ici 2030.
«Il y a un risque possible soit de ne pas atteindre l’équilibre budgétaire ou que les services soient affectés», a souligné le chien de garde en conférence de presse.
En outre, le gouvernement n’a pas fait «d’analyses de soutenabilité» sur sa capacité à assurer le financement à long terme des services sans accroître le fardeau fiscal ou le poids de la dette.
Et les coûts de reconduction en santé ne considèrent pas «l’ensemble des coûts associés au vieillissement de la population» qui sont pourtant «significatifs» dans le contexte actuel, note-t-il.
«La CAQ n’a tout simplement pas de plan crédible de retour à l’équilibre budgétaire. Ce gouvernement navigue à l’aveugle», a dénoncé jeudi la porte-parole de Québec solidaire en matière de finances, Alejandra Zaga Mendez.
«Je remercie le vérificateur général pour ses constats. On adhère à ses recommandations et on va collaborer avec le Trésor pour avoir des plans d’action», a répondu M. Girard.
Mauvaise utilisation de cartes de crédit?
Le vérificateur s’est par ailleurs penché sur l’utilisation des cartes de crédit dans cinq ministères et organismes. Il a découvert plusieurs achats pour lesquels le motif n’était pas documenté.
Par exemple, au Centre de services scolaire du Chemin-du-Roy, on s’est payé une coupe de cheveux (35 $), 21 pendentifs (159 $), 227 savons artisanaux (1024 $) et des services vétérinaires (152 $).
Au ministère de la Sécurité publique, on a utilisé la carte de crédit de l’employeur pour des soins dentaires (928 $), ainsi que pour des vêtements et des souliers (1487 $).
Le ministère des Transports a déboursé plus de 16 000 $ en intérêts sur trois ans pour des retards de paiement.
Entre 2019-2020 et 2024-2025, la valeur annuelle des achats des ministères et organismes qui utilisent des cartes «Affaires» a augmenté de 96 %, passant de 49 à 96 millions $, selon le VG.
Le nombre de cartes en circulation aurait augmenté de 133 %.

