Les présidents de la FTQ et de la CSQ craignent que des syndicats du Québec vivent bientôt le même traitement que les agents de bord d'Air Canada présentement, avec la loi que vient de faire adopter le ministre du Travail, Jean Boulet.
La loi québécoise, adoptée en mai dernier, limite les effets d'une grève ou d'un lock-out. Entre autres, elle donne au ministre du Travail le pouvoir d'imposer l'arbitrage aux parties, «s’il estime qu’une grève ou un lock-out cause ou menace de causer un préjudice grave ou irréparable à la population».
Et la nouvelle loi québécoise précise qu'«une telle décision du ministre met fin à la grève ou au lock-out en cours».
Tant Magali Picard, présidente de la FTQ, qu'Éric Gingras, président de la CSQ, ont ainsi fait le parallèle avec l'arbitrage imposé aux agents de bord syndiqués au SCFP d'Air Canada par la ministre fédérale de l'Emploi, Patty Hajdu.
«L'intervention du fédéral, par le biais de l'article 107 du Code canadien du travail, est un scénario qui est en train de se répéter et de devenir la norme dans les stratégies de négociation du patronat. On laisse pourrir les négociations et après, on va pleurer sur l'épaule des gouvernements, en leur demandant d'intervenir sous de faux prétextes», a dénoncé Mme Picard.
«Je vous prédis que c'est également ce qui va arriver au Québec, à la suite de l'adoption par la CAQ et le gouvernement de François Legault du projet de loi 89, qui limite le droit de grève», a ajouté la présidente de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.
Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui représente les agents de bord d'Air Canada au pays, est justement affilié à la FTQ au Québec.
La CSQ aussi
Au cours de sa traditionnelle conférence de presse de la rentrée scolaire, lundi à Montréal, le président de la CSQ, Éric Gingras, a spontanément offert son soutien aux agents de bord d'Air Canada.
Ils «vivent exactement, avec l'imposition de l'article 107, ce que les syndicats du Québec pourraient vivre» avec la nouvelle loi québécoise, à savoir «un employeur qui se traîne les pieds, qui se croise les bras en négos, et qui attend que le gouvernement intervienne».
Les centrales syndicales ont déjà fait part de leur volonté de contester éventuellement la nouvelle loi québécoise devant les tribunaux, en invoquant notamment l'arrêt Saskatchewan, rendu par la Cour suprême du Canada en janvier 2015, qui avait accordé une protection constitutionnelle au droit de grève.
La nouvelle loi du ministre Boulet, intitulée «Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out», entrera en vigueur le 30 novembre prochain.
En plus du pouvoir du ministre d'imposer l'arbitrage aux parties, pour déterminer les conditions de travail des salariés, la nouvelle loi québécoise introduit un nouveau concept, celui des «services minimalement requis», en plus de ceux qui étaient déjà prévus dans le Code du travail du Québec, à savoir les services essentiels.
Il s'agit alors des «services minimalement requis pour éviter que ne soit affectée de manière disproportionnée la sécurité sociale, économique ou environnementale de la population, notamment celle des personnes en situation de vulnérabilité», précise-t-on dans la nouvelle loi.

