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Opération «Encercler le catalogue!»

C’était seulement l’étape numéro un du plan des cadeaux de fêtes.

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Vous vous souvenez sans aucun doute de cette journée où nous nous sommes tous levé avec une douzaine de centimètres de neige au sol. Un 11 novembre. (Montage Noovo Info et image tirée de La Presse canadienne)

J’écris ce texte mardi matin. Vous vous souvenez sans aucun doute de cette journée où nous nous sommes tous levé avec une douzaine de centimètres de neige au sol. Un 11 novembre. Une vraie fête pour les yeux. Un vent frette qui apporte un brin de présage du temps des Fêtes.

Je regardais les flocons tomber par la fenêtre de mon bureau tout en sirotant un café bien chaud et en mangeant un pain d’épices. Le sourire au cœur.

BEN NON!

J’étais de mauvaise humeur et je sacrais encore d’avoir dû gratter ma voiture pour aller au gym à 5h45 un 11 novembre. C’EST TROP TÔT POUR LA NEIGE. Pour me changer les idées, je me suis replongé dans ma voûte à souvenirs.

C’est autour de cette date-là que, vers l’âge de 8-10 ans, je lançais l’opération «Encercler le catalogue». En gros, ça se résumait à encercler, au crayon-feutre noir, tout ce que je désirais recevoir pour Noël de la part du Père Noël (mieux connu sous le nom de Ginette, ma mère).

Tu me diras que c’était tard pour se lancer dans une telle opération. Mais il faut se souvenir que je viens d’une époque lointaine où le temps des fêtes commençait dans le vrai temps des fêtes. Le premier décembre. Dans le passé, le mois de novembre était consacré aux morts et non pas à installer les décorations de Noël. D’ailleurs, c’est surprenant que si peu de revenants viennent nous hanter pour nous passer le message qu’on a abandonné leur mois.

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Mais revenons à mon opération catalogue. À cette époque, j’utilisais les deux bibles des jouets : le catalogue «Sears» et celui de chez «Distribution aux consommateurs». C’était les plus complets. Mais je ne prenais pas de chance, je complétais avec les circulaires du temps des fêtes de chez «Woolco» et «Zellers». Un fou dans un bas de Noël. J’aurais pu ajouter la circulaire de «La Baie», mais c’eut été une perte de temps, le magasin était trop loin de chez nous et Ginette n’y allait pas.

Bref, l’opération «Encercler le catalogue» se déroulait un samedi matin. Pour la simple et bonne raison que je devais prendre tout mon temps pour faire des choix judicieux, éviter les doublons d’items et que tout soit bien bien clair pour que Ginette ne nage pas dans l’incertitude.

C’était toute une tâche comme on dit. De la chirurgie de précision du crayon-feutre noir. En fait, je devrais plutôt dire que tout était fait avec la précision d’un sabre laser parce que j’étais déjà un fan fini de science-fiction et que tous mes cercles noirs ou presque correspondaient à l’univers de «Star Wars».

Honnêtement, depuis ma jeunesse, j’ai dû financer une bonne partie du ranch de monsieur Lucas. Tout y passait. Figurines, vaisseaux spatiaux, bases interstellaires, draps de lit, vêtements et boîte à lunch. Comme dirait Yoda : fanatique, j’étais et encore, je suis.

Mais «l’encerclage», c’était seulement l’étape numéro un du plan des cadeaux de fêtes. Après une quadruple vérification de mes choix, je convoquais Ginette dans le salon pour lui remettre les catalogues et les circulaires. Mais là encore, je ne laissais pas de place à l’interprétation.

Pour être bien certain que tout était clair comme de l’eau de roche de Tatooine, je révisais tous mes cercles noirs avec ma mère. Je donnais la raison de mon choix et pourquoi je méritais tel ou tel items. Une vraie marâtre des fêtes.

Comme j’étais déjà un control freak à un si jeune âge, je recommandais à ma mère de parler à mes tantes pour que chacune sache quoi acheter et surtout, éviter d’avoir deux fois la même figurine.

L’HORREUR.

Parce que oui, je le confesse, j’étais un enfant gâté pourri. Pas par personne en particulier, mais la somme de chacune de mes tantes, mes grands-mères et ma mère, faisait en sorte que dans la nuit du 24 décembre, le Père Noël (en fait, mon oncle Dieudonné dans un costume douteux de chez Woolco) me remettait pas mal tout ce que j’avais encerclé avec précision dans les bibles du cadeau.

J’étais un Jedi des suggestions des fêtes. Pas un simple Padawan qui a encore tout à apprendre d’un maître de la force. C’est malheureusement une tradition que c’est un peu perdu dans l’univers au fil du temps. Mais sachez que si vous avez envie que je forme vos enfants aux forces du cercle noir dans un catalogue virtuel, il me reste encore quelques places dans mon académie du Jedi control freak.

Mais soyez avertis, je ne prends que ceux dont je sens la force naturelle… 

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