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Vers la droite, toute!

Sans être simpliste, une tendance se dessine clairement au Québec.

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(Montage Noovo Info et banque d'images Envato)

Vous avez certainement vu le dernier coup de sonde réalisé par Léger Marketing du 26 au 28 septembre dernier. Malgré le remaniement ministériel, les positions des partis n'ont pas beaucoup changé. Le PQ caracole toujours en tête à 36 %, suivi des libéraux à 25 %, de la Coalition avenir Québec à 16 %, du Parti conservateur du Québec à 15 % et de Québec solidaire à 6%. 

Ces chiffres démontrent que les intentions de vote bougent peu, malgré les premiers gestes de François Legault pour regagner la confiance de l’électorat. Bien entendu, comme il l’a dit lui-même, personne ne s’attendait à ce qu’un remaniement fasse bouger l’aiguille. Mais ce n’est pas de cela que je veux vous parler aujourd’hui.  

Au-delà des chiffres, lorsqu’on additionne les intentions de vote de la CAQ et du Parti conservateur, on atteint un respectable 31 %, soit seulement cinq points derrière le PQ. Si l’on y ajoute le PLQ, on obtient 56 % de l’électorat qui appuierait un parti que l’on peut identifier comme étant de droite ou de centre droit.

Sans être simpliste, une tendance se dessine clairement au Québec: pour battre le PQ, il faudra aller chercher le vote à droite de l’échiquier politique. Cela signifie que les discours des prochains mois risquent d’exploiter ce terrain et de tourner autour de thèmes comme le pouvoir d’achat, l’identité collective, la sécurité ou la saine gestion des finances publiques. Cela veut aussi dire que plusieurs partis ont des occasions à saisir.

La CAQ a vu juste

Premier constat qui confirme cette lecture : la tendance du gouvernement actuel à revenir sur les sujets qui font le succès des formations plus à droite. Le discours inaugural prononcé par François Legault mardi dernier en est un excellent exemple. Ses quatre piliers, l’identité, la sécurité, l’économie et l’efficacité sont des thèmes chers aux partis de droite partout dans le monde. Dans bien des cas, ces thèmes ont porté ceux qui les ont adoptés au pouvoir. À ce niveau, le premier ministre et son équipe ont visé juste.

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Le défi, toutefois, vient du fait que ce n’est pas la première fois que la CAQ mise sur ces thématiques et que, malgré sept ans au pouvoir, plusieurs de ces enjeux demeurent irrésolus. Le parti a déjà fait campagne sur ces thèmes, mais, une fois au gouvernement, il a souvent pris des décisions plus centristes. Ce choix lui a valu deux mandats et une forte popularité, mais il pourrait maintenant lui nuire alors qu’il tente de ramener ces priorités au premier plan.

L’opportunité d’Éric Duhaime

Ces données représentent aussi une excellente nouvelle pour le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime. À 15 %, son parti atteint son plus haut score depuis que l’on mesure l’opinion publique au Québec. Duhaime a maintenant l’occasion de positionner le PCQ comme une véritable force de changement, tout en reprenant les thèmes qui ont porté la CAQ au pouvoir. Comme il l’a démontré à Arthabaska, son discours trouve écho dans plusieurs régions, et son résultat de 36 % représente une hausse majeure de 11 points par rapport à la dernière élection générale. Son grand défi sera désormais de faire oublier l’image d’un parti né de la division au sortir de la pandémie, pour devenir une alternative crédible à un gouvernement en perte de vitesse et à un PLQ en quête d’identité.

Pour y parvenir, il devra recruter des candidats solides dans plusieurs régions et continuer à marteler son discours économique. Toute dérive sanitaire, conspirationniste ou extrémiste chez ses candidats lui ferait perdre beaucoup de crédibilité. Mais s’il évite ces pièges, il sera assurément une alternative à surveiller en octobre prochain.

Urgence au PLQ

Si Éric Duhaime grimpe à 15 % et que la CAQ peut encore espérer se relever, c’est en grande partie à cause de l’incapacité du Parti libéral du Québec à retrouver un discours et un leadership capables de reconnecter avec l’électorat francophone. Encore une fois, selon le dernier sondage, le PLQ plafonne à 16 % chez les francophones, loin du 29 % de Philippe Couillard en 2014, année de la dernière victoire libérale.

Maintenant, entre les mains de Pablo Rodriguez, le parti doit retrouver son identité économique de droite s’il veut revenir dans le cœur des Québécoises et des Québécois. Saine gestion des finances publiques, développement des minéraux critiques, création de richesse et efficacité devront être au cœur du discours libéral, amorçant ainsi un virage plus à droite que celui proposé en 2022.

Le PLQ devra aussi tenir compte du consensus de la population sur les questions de laïcité et d’immigration, et mieux arrimer ses positions historiques à cette réalité. Je ne crois pas que le PLQ puisse revenir au pouvoir sans un engagement clair en faveur des principes de la loi sur la laïcité et sans un discours rigoureux sur l’immigration. Ainsi, son chef et son équipe pourraient éviter les débats identitaires et ramener la discussion sur un terrain économique de centre droit, celui-là même qui a assuré ses succès depuis les années 1960. L’adage « quand l’économie va mal, on vote libéral » pourrait alors retrouver tout son sens.

Il reste encore beaucoup de temps avant les élections, et le PQ aura certainement l’occasion d’accroître ses appuis. Cependant, au-delà de l’épouvantail référendaire, les partis qui aspirent au pouvoir devront proposer des mesures concrètes. Les chiffres nous montrent qu’il existe une autoroute à droite ; les prochains mois nous diront quel véhicule sera le mieux placé pour l’emprunter. Une course à suivre!

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