Des multimillionnaires d’Austin, en Estrie, ont ravagé des terres zonées agricoles et une érablière pour se construire illégalement un terrain de golf.
La Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) a émis une ordonnance à la fin juillet demandant aux propriétaires de remettre le terrain dans son état initial. Mais pour Memphrémagog Conservation, ce n’est pas assez.
«C'est majeur parce qu'on se trouve à détruire les poumons et les reins du lac. Il faut avoir des amendes exemplaires à la hauteur des dommages de destruction des milieux humides et d'atteinte au réservoir d'eau potable qu’est le lac Memphrémagog pour 185 000 personnes», soutient Johanne Lavoie, présidente de Memphrémagog Conservation.
Elle souligne que les contraventions doivent être à la hauteur des gestes, mais aussi des moyens du propriétaire.
«Le propriétaire a acheté cette propriété-là à 14 millions de dollars. Pensez-vous qu'il a des moyens?», dit-elle.
Un verger ou un golf?
Notons que le couple propriétaire Glenn Chamandy et Amel Murad avaient fait des demandes de permis pour aménager un verger sur leur terrain. Cette demande leur avait été octroyée, mais une enquête de la CPTAQ a permis de constater des travaux de remblai, de l’entreposage d’amas de sol et l’aménagement d’un muret de pierres sur le terrain.
«La discussion a toujours été de faire ces travaux de déboisement pour faire un vignoble et un verger. C'est toujours ce que nous avons eu comme suivi dans le dossier», souligne Lisette Maillé, mairesse d’Austin, en entrevue avec Noovo Info.
La mairesse indique que ses équipes procèdent à des vérifications à l’heure actuelle. Elle souligne que la Ville n’a «jamais donné un permis pour le golf».
«L'ampleur des non-conformités ou des infractions qui pourraient avoir été commises, c'est ce qu'on est à vérifier actuellement», dit-elle.
«Les amendes qui sont prévues par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme sont quand même très petites. Alors, est ce que ça reflète l'ampleur des dommages? Ça reste à voir», ajoute-t-elle.
L'avocat du couple a fait valoir à la CPTAQ que les travaux étaient effectivement pour l'aménagement d'un verger. La Commission n’a toutefois pas cru cette version, notamment parce que l'entrepreneur qui a effectué les travaux, Design Panorama Vert Inc, a comme secteur d'activité l'aménagement paysager et les clubs de golf.
L’enquêteuse de la CPTAQ a également constaté sur place la pose de tourbe et ce qui s’apparente à des trappes de sable.
«Ça devient de plus en plus flagrant que les gens qui ont les moyens disent qu'ils peuvent outrepasser la loi. C'est comme s’ils se disent: "oui, je vais être mise à l'amende, mais ça va faire partie des coûts de ma construction de quelques millions de dollars"», dénonce la mairesse d’Austin.
Memphrémagog Conservation demande au ministère de l’Environnement d'intervenir dans le dossier.
Même s'il était présent sur les lieux, M. Chamandy n'a pas souhaité accorder d’entrevue à Noovo Info. Il a toutefois déclaré par courriel prendre acte des préoccupations soulevées concernant les travaux d'aménagement effectués sur son terrain.
«Conscient de l’importance de préserver l’intégrité du territoire agricole et de respecter les réglementations environnementales en vigueur, j’ai entrepris des démarches concrètes dès la publication de l’ordonnance de la CPTAQ. Je travaille ainsi de très près avec mon ingénieur forestier qualifié pour formuler des recommandations claires et rigoureuses que je pourrai présenter à la CPTAQ», peut-on lire.
Il souligne avoir «le coeur de faire les choses correctement et de manière durable» et indique avoir l'intention de mettre en lumière les informations concernant les travaux réalisés «en temps opportun».
Voyez le reportage de Fanny Lachance-Paquette dans la vidéo.

