Le tribunal a autorisé mardi l’exhumation d’un bébé atikamekw, Maxime Ottawa, qui n’est jamais revenu auprès de ses parents après avoir été admis à l’hôpital en 1954.
Une quête de vérité menée de front par Manon Ottawa, la nièce de bébé Maxime, qui avait 6 mois au moment de son départ de Manawan et qui est décédé à neuf mois.
«Mon père m’a demandé de ramener son frère à la maison. Toute sa vie ma grand-mère a attendu le retour de son bébé», a témoigné Mme Ottawa quelques minutes avant le début de l’audience.
Après des procédures exceptionnelles et complexes, la famille Ottawa a appris que Maxime a été enterré dans une fosse où l'on retrouve 14 corps, tous des membres des Premières Nations, en majorité des enfants.
«Ça serait inacceptable de ne pas accepter la demande. Ce n’est pas la faute de cet enfant-là s'il a été enterré dans une fosse.»
La famille Ottawa souhaite pouvoir procéder à l'exhumation de bébé Maxime cet automne, avant la première neige.
«Après 71 ans, on aura finalement bébé Maxime à la maison», souligne Manon Ottawa.
Il s'agit de la quatrième autorisation du tribunal depuis l'adoption de la loi 79 en 2021.
La Loi 79 est une loi autorisant la communication de renseignements personnels aux familles d’enfants autochtones disparus ou décédés à la suite d’une admission en établissement. Elle est en vigueur depuis septembre 2021.
Des procédures compliquées
La famille Ottawa en était à sa deuxième demande au tribunal pour exhumer le corps du bébé atikamekw, né et décédé en 1954.
Elle n'avait pas pu obtenir le feu vert du tribunal à la mi-septembre puisque Maxime n'est pas seul à avoir été enterré au même endroit, d’autres enfants et adultes autochtones se retrouvent les uns par-dessus les autres.
«C’est une situation unique et un appel à la solidarité des autres nations. […] La plupart des corps sont ceux d’enfants», a expliqué Anne Panasuk, consultante pour l’organisme Awacak. C’est elle qui a été chargée de retrouver les familles des autres dépouilles parce qu'il faudra déplacer des corps.
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Sur le lot où Maxime aurait été inhumé, il y a un corps qui a été déposé au-dessus de lui et deux autres dépouilles ont également enterré avec lui.
Dans le lot à gauche de Maxime, cinq corps ont été empilés, même chose du côté droit.
Une ordonnance de la Cour a été émise pour ne pas divulguer les noms des personnes qui y sont enterrés.
Chant, prière et pleurs en salle d’audience
«Je vois que vous portez votre chandail orange, de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. Une journée importante», a souligné le juge Parent, visiblement touché, qui a autorisé «étant donné la gravité de l’affaire» la tenue de chant et de prière avant le début des audiences.
Les proches de bébé Maxime n’ont pu retenir leur larme pendant ce moment unique au tribunal. Un tikinagan, porte-bébé traditionnel autochtone a aussi été apporté en salle d’audience.
Plus d’une vingtaine de membres de la Nation atikamekw, de Manawan mais aussi de Wemotaci, sont venus soutenir les proches du petit Maxime.
Disparu depuis 71 ans
Quelques mois après sa naissance, Maxime avait consulté le dispensaire de Manawan pour des irritations cutanées et ce dernier a décidé d’évacuer l’enfant vers l’hôpital de La Tuque, avec l'accord des parents.
Maxime a finalement été transféré dans un hôpital de Québec. Cette décision a été prise sans consulter les parents du bambin.
Notons qu’à l’époque les parents autochtones n’avaient pas le droit d’accompagner les enfants, une directive du ministère de la Santé et du Bien-être social.
Les parents de Maxime n’ont eu aucune nouvelle de leur enfant depuis son départ de Manawan.
Pendant des années lorsque Julie Newashish, maman de Maxime, accourait vers les avions qui amerrissaient à Manawan, pensant qu’on lui rapportait son fils.
Ce serait un prêtre de Manawan qui aurait informé la famille, deux ans plus tard, que leur fils était décédé. La famille n’a toutefois reçu aucune information concernant l’emplacement où Maxime est mort ni où il a été enterré.
Le frère de Maxime, Henri Ottawa, a toujours été préoccupé par la disparition du bambin. Sur son lit de mort, il a demandé à sa fille, Manon, de poursuivre les recherches pour retrouver Maxime.
Manon a donc pris en charge les recherches depuis le départ de Maxime en 1954. Elle a parlé publiquement du drame en 2017 et en 2021, notamment grâce à la loi 79, mais aussi grâce à l’aide reçu par l’association Awacak, elle a réussi à découvrir le lieu d’inhumation de Maxime: le cimetière Saint-Charles à Québec.
D’autres enfants manquent à l’appel
L’organisme Awacak, dont la mission est de soutenir les familles qui cherchent des enfants, vient de compléter des rencontres chez les Anishinape à Kipawa au Témiscamingue. Elle est présentement sur les traces de 217 enfants.
La prochaine étape serait d'aller à la rencontre des familles Cris à la Baie-James, qui cherchent aussi des enfants.

