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Sécurité à la frontière: des groupes demandent à Ottawa d'abandonner un projet de loi

Le projet de loi comprend plusieurs mesures en matière d'immigration et d'asile.

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b62bc46fa15b2df2ade528aac2803faf2f00b6cbb6a85ab7bebf47712583d09c.jpg Un véhicule de l'Agence des services frontaliers du Canada est photographié au poste frontalier du pont Rainbow à Niagara Falls, en Ontario, le vendredi 17 octobre 2025. LA PRESSE CANADIENNE/Nathan Denette (Nathan Denette | La Presse canadienne)

Le projet de loi du gouvernement fédéral sur la sécurité frontalière risque de permettre des violations des droits des migrants s'il n'est pas abandonné, préviennent des groupes de défense des droits. 

Des représentants du Réseau des droits des migrants, du Conseil canadien pour les réfugiés et d'autres groupes ont tenu une conférence de presse lundi sur la colline du Parlement après avoir échoué à figurer sur les listes de témoins des comités de la Chambre des communes chargés d'étudier le projet de loi C-12.

«Le projet de loi C-12 propose des modifications à neuf textes législatifs, compte 70 pages, et pourtant, il n'a fait l'objet que de trois semaines d'étude», a souligné Karen Cocq, porte-parole du Réseau des droits des migrants.

«Pendant cette période, aucun migrant susceptible d'être touché par le projet de loi C-12, qui risque de voir son permis annulé ou sa demande d'asile rejetée, n'a pu s'exprimer devant le comité.»

Les mesures contenues dans le projet de loi C-12 faisaient partie du projet de loi C-2 initial du gouvernement sur la sécurité frontalière, présenté en juin.

En octobre, le gouvernement a réintroduit certaines parties de la loi initiale dans un projet de loi distinct, dans l'espoir de les faire adopter plus rapidement qu'à travers C-2, qui comprenait des propositions plus controversées visant à donner de nouveaux pouvoirs aux services de sécurité et de renseignement et à autoriser Postes Canada à ouvrir certains courriers.

Le projet de loi C-12 comprend une série de mesures en matière d'immigration et d'asile, dont une qui interdirait aux personnes séjournant au Canada depuis plus d'un an de présenter une demande d'asile à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada.

Gauri Sreenivasan, codirectrice générale du Conseil canadien pour les réfugiés, a affirmé que cette restriction pourrait limiter la capacité des personnes à demander l'asile en raison de l'évolution de la situation dans leur pays d'origine.

«Nous venons de voir dans un pays comme les États-Unis que, du jour au lendemain, une personne transgenre peut être déclarée comme n'existant plus. Il est donc très préoccupant de voir que des milliers de personnes pourraient être touchées», a-t-elle déclaré.

Mme Sreenivasan a ajouté que les personnes fuyant la violence conjugale pourraient également être confrontées à des difficultés en raison de la règle d'un an proposée; il peut être difficile de rassembler des preuves, de trouver un avocat et de présenter une demande dans ce délai.

Le gouvernement a défendu cette mesure en affirmant que les personnes qui ne sont pas admissibles à une audience régulière pour obtenir le statut de réfugié peuvent toujours bénéficier d'une évaluation des risques avant renvoi.

Les responsables du ministère de l'Immigration ont déclaré à la commission de l'immigration de la Chambre des communes que ces audiences posent des questions similaires et examinent les mêmes preuves que les audiences devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Le projet de loi C-12 donnerait également au gouvernement le pouvoir de cesser d'accepter de nouvelles demandes d'immigration ou d'annuler des demandes existantes lorsqu'il estime que cela est dans l'intérêt public.

La ministre de l'Immigration, Lena Diab, et les responsables du ministère ont expliqué que la notion d'«intérêt public» était volontairement vague dans la législation afin de laisser au gouvernement une marge de manœuvre pour faire face à diverses situations futures, telles que des pandémies ou des menaces d'espionnage.

Le projet de loi est actuellement examiné par les comités de l'immigration et de la sécurité nationale de la Chambre des communes et sera examiné article par article lors de l'audience du comité de la sécurité nationale mardi.

La porte-parole conservatrice en matière d'immigration, Michelle Rempel Garner, a annoncé la semaine dernière qu'elle prévoyait présenter plusieurs amendements au projet de loi, dont un qui bloquerait les demandes d'asile des personnes arrivées au Canada en provenance d'un pays européen ou d'un pays du G7.

Mme Cocq a déclaré que les amendements proposés par Mme Rempel Garner revenaient à rétablir une loi adoptée sous le gouvernement de Stephen Harper en 2012, qui refusait aux réfugiés provenant de «pays sûrs» le droit d'interjeter appel. Cette loi a été jugée inconstitutionnelle par la Cour fédérale en 2015.

«Cette idée selon laquelle des groupes entiers de personnes peuvent être interdits d'accès au système remet en cause les notions fondamentales d'équité et nous pensons qu'elle serait contraire à la Charte des droits et libertés et ferait l'objet de contestations judiciaires, comme ce fut le cas pour la liste des pays d'origine désignés sous le régime Harper», a déclaré Mme Cocq.

«Nous contestons donc cette idée selon laquelle [...] l'interdiction générale et la punition de groupes entiers de personnes en raison de leur identité constituent une solution que quiconque dans ce pays souhaite.»

David Baxter

David Baxter

Journaliste