Gilbert Rozon en était mercredi à sa quatrième apparition à la barre des témoins pour son contre-interrogatoire dans le cadre de son procès civil pour agressions sexuelles.
Si les parties avaient d’abord prévu que trois jours d’audience, une demi-journée supplémentaire aura été nécessaire pour compléter le processus judiciaire.
Mercredi, Me Michel Déom, avocat pour le Procureur général du Québec a posé diverses questions à Gilbert Rozon revenant sur plusieurs éléments ayant été présenté lors des dernières audiences dont la séquence des événements de 1998 au manoir Rouville.
Comme ce fût le cas depuis l’ouverture de son procès en décembre dernier, autant lors de son témoignage que de son contre-interrogatoire, Gilbert Rozon a continué de nier les allégations d’agressions sexuelles le visant.
C’est d’ailleurs une facette du procès qui peut être très déroutante pour les demanderesses et leurs supporteurs : il y a un fossé énorme entre leur version et celles de Gilbert Rozon.
Devant les journalistes mercredi après-midi, il a nié à nouveau avoir agressé sexuellement Danie Frenette lors d'une fête qu'il donnait à sa résidence en juillet 1988. «Pensez-vous que j’aurais pu faire l’amour dans mon jardin devant 100 personnes ou dans le VIP faire une agression sexuelle sans que ça se sache? En 30 secondes ça aurait fait le tour de la ville», a-t-il dit.
Ce discours il l'a maintenu et répété.
Par exemple, Annick Charrette prétend avoir été agressé sexuellement par Gilbert Rozon en 1980. Dans sa version des évènements, Rozon a affirmé que c’est la demanderesse qui l’a agressé.
Idem pour le cas de Patricia Tulasne. La comédienne allègue avoir été agressé sexuellement en 1994 par Gilbert Rozon. Dans son témoignage, elle a raconté à la Cour qu'elle a d'abord résisté à l'agression de Gilbert Rozon «avec son corps», mais que, lorsqu'elle a croisé son regard, elle a «abandonné».
«J’ai croisé son regard et ses yeux étaient des yeux de fou. Ils étaient exorbités. J’avais très peur, je me suis dit il va me frapper. J’ai eu peur de mourir», a-t-elle dit.
Rozon a affirmé pour sa part qu’il est monté chez elle et qu’ils ont commencé à faire l’amour «contre le mur». Il croit que la relation s’est terminée au lit, mais sans en être certain. «On était très emporté par cette pulsion sensuelle. Ça ressemblait à une scène de film. C’était excitant et je la sentais aussi excitée que moi», a-t-il plaidé.
Même chose en ce qui concerne le témoignage de Lyne Charlebois. La demanderesse affirme avoir été agressé sexuellement par Gilbert Rozon en 1982 et a mentionné «avoir craint de mourir». Rozon a pour sa part affirmé devant le tribunal avoir fait l'amour à Mme Charlebois «doucement, agréablement».
Néanmoins, Gilbert Rozon a affirmé mercredi aux journalistes avoir été entraîné dans une «folie» dans laquelle «tout le monde a un intérêt financier majeur». Il a ajouté considérer être traité «comme un paria».
«Je considère que ma vie est finie, moi. Ce qui est arrivé depuis huit ans, j'ai perdu l'entreprise de mes rêves. Mes employés ont été mis à la porte. Tous les gens qui avaient travaillé 30-40 ans à Juste pour rire. Juste pour rire n'était plus ce que c'était», a-t-il même exprimé.
Vvisiblement usé, l’homme d’affaires estime maintenant qu’il aurait été préférable de sortir son chéquier et de régler hors cour même s’il répète avec insistance depuis le début qu’il n’a rien à se reprocher.
«Moi, j'ai fait mon job. Je suis venu me défendre. J'aurais pu faire des chèques il y a huit ans. Je ne l'ai pas fait. Mais je vais vous le dire, vous l'avez noté, je le regrette. J'aurais été plus intelligent.
«Vaut mieux, sincèrement, si quelqu'un m'appelle demain matin, qui me menace, mais que ce n'est pas vrai, ce n'est jamais arrivé et que j'ai toutes les preuves, non, non, fais un chèque, fais un chèque. Ne va pas à la cour, tu vas tout perdre», a-t-il laissé tomber avec amertume.
«Est-ce qu'on va me redonner Juste pour rire? Est- ce qu'on va me redonner le droit de travailler? Est- ce qu'on va réengager les gens qui ont été foutus à la porte?»
Une pause de quelques semaines
À la fin de la journée mercredi, le procès de Gilbert Rozon sera mis sur pause pour quelques semaines et devrait reprendre à la fin août, le 26 si rien ne change.
D’abord prévu à la fin juin, le témoignage de l’homme d’affaires québécois Pierre Karl Péladeau devrait avoir lieu le 29 août.
M. Péladeau, président et chef de la direction de Québecor, doit témoigner dans le cadre du procès de Rozon concernant une rupture de relation d'affaires entre Juste pour rire et Québecor.

Neuf demanderesses et de nombreux témoins
Le procès civil de Gilbert Rozon s'est ouvert au début de décembre 2024 alors que neuf demanderesses lui réclament environ 14M$ pour des agressions sexuelles et des viols, entre autres.
Les neuf présumées victimes - Lyne Charlebois, Guylaine Courcelles, Patricia Tulasne, Danie Frenette, Anne-Marie Charette, Annick Charette, Sophie Moreau, Marylena Sicari et Martine Roy - ont d'ailleurs toutes témoigné au cours des derniers mois.
La défense - représentant les neuf demanderesses - a aussi fait entendre d'autres témoins au fil du procès, dont des personnalités connues comme Julie Snyder, Salomé Corbo et Pénélope McQuade. L'ex-conjointe du fondateur de Juste pour rire, Véronique Moreau, a aussi pris la parole. Elles ont toutes témoigné d'abus qu'elles auraient subis aux mains de Gilbert Rozon.
Les avocats Rozon ont également appelé des témoins au cours des derniers mois, dont ses soeurs Luce et Lucie Rozon et son ex-bras droit Guylaine Lalonde. Elles ont tenu des discours contraires à ceux des présumées victimes qui ont été entendus jusqu’à maintenant.
Le tribunal a aussi entendu le journaliste, auteur et producteur Guy Fournier ainsi que l'ancien premier ministre Pierre-Marc Johnson.
Avec de l'information de La Presse canadienne.

