Près de la moitié du contenu des sacs-poubelle montréalais pourrait être détournée des sites d’enfouissement. Pourtant, la Ville de Montréal sévit peu contre les citoyens qui refusent encore de trier leurs déchets.
Lors d’une journée de collecte, le constat sur le terrain est clair: les résidents ne sont pas toujours de bons élèves. En vertu de la réglementation municipale, ils s’exposent pourtant à des amendes pouvant atteindre jusqu’à 400$ si le contenu de leurs poubelles est recyclable ou compostable.
L’an dernier, la Ville a émis près de 5000 «avis de courtoisie», des autocollants apposés sur les sacs et poubelles des contrevenants. Mais à peine 1000 amendes ont été distribuées. Une stratégie assumée, explique Philippe Sabourin, porte-parole de la Ville de Montréal.
«Notre objectif n’est pas de punir, mais d’éduquer les citoyens», dit-il.
Une infraction difficile à prouver
Mais au-delà de cette volonté de miser sur la sensibilisation, il est aussi très complexe pour les inspecteurs qui constatent des infractions d’identifier les contrevenants.
«Il est difficile de trouver les propriétaires des sacs-poubelle, car il n’y a pas toujours d’éléments d’identification à l’intérieur», concède Philippe Sabourin.
La Ville espère donc d’abord encourager les bons gestes, en rappelant que le tri des déchets est une responsabilité collective.
Près d’une centaine d'inspecteurs et des organismes communautaires font du porte-à-porte ou des interventions dans les écoles pour sensibiliser au tri. Force est de constater sur le terrain que les mauvaises habitudes des résidents sont pourtant encore présentes. Lors de l’autopsie de deux sacs poubelles, plus de 50 % du contenu aurait pu aller au compost et plus de 10 % au recyclage. Dans cet amas de déchets, de nombreux légumes, mais aussi des imprimés souillés, des pelures, des mouchoirs en papier et d’autres matières compostables.
Un meilleur tri pour éviter les sacs éventrés
Le mauvais tri des déchets n’a pas que des effets sur l’environnement: il contribue aussi à l’insalubrité maintes fois dénoncée dans les rues de la ville.
L’espacement des collectes mis à l’essai dans certains arrondissements montréalais a d’ailleurs pris beaucoup de place dans l’actuelle campagne électorale municipale. La cheffe d’Ensemble Montréal Soraya Martinez Ferrada a promis dès le lancement de sa campagne de rétablir la collecte hebdomadaire l’été dans l’arrondissement de Mercier–Hochelaga–Maisonneuve. Le chef de Projet Montréal lui a d’ailleurs emboîté le pas quelques jours plus tard, même si c’est son parti qui avait misé sur les collectes aux deux semaines.
Mais l’expérience pourrait être différente si les citoyens respectaient la réglementation, estime M. Sabourin.
«Si les sacs de vidanges étaient déposés le jour de la collecte sans contenir d’aliments qui devraient aller au compost, la vermine et les animaux n’iraient pas les déchirer», souligne-t-il.
Résultat: moins de sacs éventrés, moins de déchets dans les rues. La Ville de Montréal a pourtant mis en place dans l’arrondissement de Saint-Laurent, un centre de compostage entièrement intérieur, une première au Québec en 2024, et qui peut traiter jusqu’à 50 000 tonnes de résidus alimentaires et de jardins par an.
Ce qui vise à réduire la pression sur les sites d’enfouissement, qui sont aujourd’hui presque à pleine capacité. Mais pour que le système soit efficace, encore faut-il que les citoyens jouent le jeu.
Recycler et composter ne sont pas de simples gestes écologiques: ce sont des obligations citoyennes et même si la Semaine québécoise de réduction des déchets qui a lieu du 20 au 26 octobre 2025 tire à sa fin, il reste du travail. D'après Recyc-Québec, les centres de tri, à l’échelle de la province ont reçu près de 1 022 000 tonnes de matières en 2023, soit une légère diminution de 3 % par rapport aux quantités reçues en 2021.
Là encore, seulement, 48% des matières recyclables générées au niveau municipal ont été acheminées aux fins de recyclage.
Au niveau des municipalités, en 2023, seulement 770 municipalités ou environ 70 % des municipalités du Québec avaient implanté la collecte des résidus alimentaires.

