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Poilievre demande aux libéraux de supprimer le Programme des travailleurs étrangers temporaires

Il affirme que cela permettrait de libérer des emplois pour les Canadiens.

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Le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, s'adresse aux médias lors d'une annonce à Brampton, en Ontario, le vendredi 29 août 2025. Le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, s'adresse aux médias lors d'une annonce à Brampton, en Ontario, le vendredi 29 août 2025. (Arlyn McAdorey | La Presse canadienne)

Le chef conservateur, Pierre Poilievre, a appelé mercredi les libéraux à abolir le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), arguant qu'il a provoqué une crise de l'emploi chez les jeunes Canadiens.

«M. Carney a créé une situation où nos jeunes ne peuvent pas trouver un logement ni un emploi. 1,6 million de Canadiens sont chômeurs maintenant (...) et que font les libéraux? Ils donnent ces emplois aux travailleurs temporaires de l'étranger», a tonné M. Poilievre lors d'une conférence de presse mercredi matin à Mississauga, en Ontario.

«Les emplois canadiens devraient aller aux travailleurs canadiens», a continué le chef conservateur.

Les données publiées par le gouvernement fédéral le mois dernier indiquent que 33 722 nouveaux visas de travailleurs étrangers temporaires ont été délivrés au cours des six premiers mois de l'année, et qu'environ 70 000 autres ont été renouvelés pour des travailleurs déjà au Canada. Le Canada s'est fixé comme objectif d'admettre 82 000 nouveaux travailleurs étrangers temporaires cette année.

M. Poilievre a notamment dénoncé les chaînes de restauration rapide qui, selon lui, embauchent des étrangers plutôt que des locaux. Il a cité l'utilisation du PTET par Tim Hortons et a critiqué Booster Juice pour une offre d'emploi qui, selon lui, préconise spécifiquement l'embauche de travailleurs étrangers temporaires.

Dans une déclaration écrite, Tim Hortons a indiqué que moins de 5 % de ses employés sont embauchés grâce à ce programme, «généralement dans les petites villes et municipalités où les candidats locaux ne sont pas disponibles».

L'entreprise a affirmé que les travailleurs étrangers temporaires ne constituent pas une «option plus économique» et que les restaurateurs «offrent des salaires compétitifs et couvrent souvent des frais supplémentaires, comme les déplacements, lorsqu'ils utilisent le programme».

La Presse Canadienne a contacté Booster Juice pour obtenir des commentaires, mais n'a pas encore reçu de réponse.

Le chef conservateur a déclaré que son parti mettrait en lumière les cas les plus flagrants d'élites patronales qui profitent de l'exclusion des Canadiens d'emplois au profit de travailleurs étrangers temporaires à bas salaires.

Il a accusé le gouvernement de créer des conditions qui entravent les efforts des jeunes pour démarrer leur vie active.

Pierre Poilievre a fait valoir que le temps est venu d'agir de manière décisive pour empêcher les libéraux d'utiliser le système d'immigration pour enrichir les élites patronales et autres initiés, au détriment des emplois canadiens.

Le directeur général des Producteurs de fruits et légumes du Canada (PFLC), Massimo Bergamini, a également réagi à la proposition de M. Poilievre par voie de communiqué, rappelant l’importance du volet agricole du programme.

«La pénurie de main-d’œuvre est l’une des menaces les plus graves qui pèsent sur la disponibilité, l’abordabilité et la diversité des fruits et légumes cultivés au Canada et, par extension, sur la sécurité alimentaire des Canadiens, a écrit M. Bergamini. Il a été démontré que, sans l’accès aux programmes de travailleurs étrangers, les producteurs seraient incapables de trouver la main-d’œuvre.»

Il a soutenu que supprimer le PTET, et plus particulièrement son volet du Programme des travailleurs agricoles saisonniers, «serait particulièrement irresponsable». Il a admis cependant que des discussions pour améliorer les programmes existants sont «les bienvenues».

Les données de Statistique Canada indiquent que le secteur agricole a fait appel à près de 78 000 travailleurs étrangers temporaires en 2024.

Le premier ministre Mark Carney a répondu aux propos de M. Poilievre plus tard mercredi en disant qu'il était déterminé à réduire l'immigration, mais qu'il n'abandonnait pas le programme, car il est populaire auprès des employeurs, notamment au Québec, où il bénéficie du soutien provincial.

«Pour le moment, c'est une des grandes demandes du gouvernement du Québec et c'était une des grandes demandes des entreprises québécoises. C'est qu'il faut garder ce programme, pas éliminer ce programme», a-t-il déclaré aux journalistes à Toronto, en marge d'une retraite du Cabinet.

«Ce qui est clair, (c'est) qu'on peut améliorer le programme en totalité, ensemble.»

Risque de vider des bassins de main-d'œuvre

L'année dernière, pour la première fois, le gouvernement fédéral a imposé des limites à l'admission de travailleurs étrangers temporaires au Canada. Cette mesure visait en partie à répondre à une crise de l'accessibilité au logement, provoquée en partie par une croissance démographique rapide.

L'objectif actuel du gouvernement est de réduire le nombre de résidents temporaires à 5 % de la population totale. La part de la population constituée de résidents non permanents était de 7,1 % au 1er avril.

Aissa Diop, porte-parole du Cabinet de la ministre de l'Emploi et de la Famille, a mentionné dans un courriel que le Canada restait sur la bonne voie pour gérer durablement les niveaux de résidents temporaires. 

Elle a ajouté que les efforts visant à réduire la dépendance des employeurs canadiens au Programme des travailleurs étrangers temporaires font partie de ce plan.

«Le Parti conservateur choisit délibérément de cibler les nouveaux arrivants dans ses remarques», a avancé Mme Diop, soulignant que les travailleurs étrangers temporaires représentent environ 1 % de la population active totale.

Mme Diop a précisé que les entreprises qui demandent l'embauche d'un travailleur étranger temporaire doivent démontrer qu'il n'y a pas de travailleur au Canada capable d'occuper ce poste.

«Supprimer un programme qui aide à combler des lacunes spécifiques sur le marché du travail nuirait à notre économie, a soutenu Mme Diop. Pendant que les conservateurs s'efforcent de diaboliser les travailleurs et les entreprises qui travaillent fort, nous nous concentrerons sur la protection des travailleurs et la croissance de l'économie la plus forte du G7.»

Dan Kelly, président et chef de la direction de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI), a qualifié la proposition de Pierre Poilievre de «totalement ridicule».

Il a déclaré à La Presse Canadienne qu'il était «tout à fait compréhensible et raisonnable de remettre en question» certains aspects du programme, comme sa taille et sa portée, et qu'il était approprié pour Ottawa de le limiter.

«Mais supprimer cet instrument est insensé et les conservateurs sont plus avisés que ça», a commenté M. Kelly.

Il a souligné que les conservateurs promettent de mettre fin au Programme des travailleurs étrangers temporaires tout en créant un programme distinct pour la main-d'œuvre agricole.

Les conservateurs comprennent le besoin de travailleurs en agriculture, d'après Dan Kelly, «ils devraient alors être en mesure de comprendre que ces défis existent également dans de nombreuses collectivités rurales et éloignées, ainsi que dans de nombreux secteurs de l'économie, notamment le secteur de l'hôtellerie».

Le président de la FCEI a averti que la fin du programme «viderait le bassin de main-d'œuvre» dans de nombreuses collectivités rurales et éloignées et pourrait entraîner la fermeture de stations balnéaires comme Banff et Whistler.

— Avec des informations d'Anja Karadeglija et de David Baxter

Dylan Robertson

Dylan Robertson

Journaliste