Un coroner a mentionné les longs délais d'attente aux urgences et le manque d'évaluation adéquate par le personnel hospitalier dans un nouveau rapport concernant un senior québécois décédé aux urgences après avoir attendu 12 heures pour voir un médecin.
Le coroner, le Dr Jean Brochu, a conclu dans son rapport sur le décès d'Yvon Brossoit que «le contexte organisationnel, l'organisation des ressources et le fonctionnement du service des urgences» de l'hôpital Anna-Laberge de Châteauguay ont eu des conséquences sur l'évolution de l'état de santé de cet homme de 80 ans aux urgences.
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News.
M. Brossoit était l'un des deux patients décédés à moins de 24 heures d'intervalle après avoir attendu des soins aux urgences de l'hôpital de la Montérégie en novembre 2023.
Cet homme originaire de Sainte-Catherine s'était présenté aux urgences le 30 novembre 2023 après avoir souffert de violentes crampes abdominales et s'être évanoui sur un canapé.
Il est arrivé aux urgences à 12h41 ce jour-là, mais le processus de triage n'a commencé qu'à 13h08. Après l'évaluation de ses signes vitaux et de ses analyses sanguines, il a été classé en code priorité 3, ce qui signifie que son état n'était pas critique et qu'il devait être réévalué toutes les 30 minutes. Il a été ramené en fauteuil roulant dans la salle d'attente, où il a attendu pendant des heures avec d'autres patients.
Peu après 18h, un membre de sa famille qui l'accompagnait dans la salle d'attente a informé les infirmières qu'il souffrait de douleurs abdominales. «M. Brossoit n'avait pas encore été réévalué», mais une infirmière lui a donné des analgésiques, a pris sa température et vérifié sa tension artérielle, a indiqué le coroner.
Puis, à 23h45, il a subi un arrêt cardiorespiratoire devant son proche. Après que le personnel des urgences eut réussi à le réanimer, une échographie a révélé qu'il souffrait d'une «rupture d'anévrisme de l'aorte abdominale».
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Le personnel a décidé de le transférer au Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM), mais son état s'est rapidement détérioré. Il a été déclaré mort à 0h48, environ 12 heures et sept minutes après son arrivée aux urgences.
Des urgences saturées à 191 % de leur capacité
Selon le rapport du coroner, M. Brossoit ignorait qu'il souffrait d'un anévrisme de l'aorte abdominale, qui peut évoluer sans symptômes. Si un anévrisme mesure 5,5 centimètres de diamètre, une intervention chirurgicale est recommandée.
L'anévrisme abdominal de M. Brossoit mesurait 6 centimètres après s'être rompu.
Le jour où il s'est présenté à l'hôpital Anna-Laberge, le service des urgences était à 191 % de sa capacité, avec 61 patients sur des brancards dans un service qui n'en compte que 32.
«20 patients attendaient de voir un médecin depuis plus de 48 heures», indique le rapport.
Les données publiques montrent que les hôpitaux de cette région dépassent régulièrement leur capacité d'accueil aux urgences et peuvent parfois atteindre 200 % de leur capacité.
Le coroner Brochu a également noté qu'au moment du décès de M. Brossoit, des ambulances avaient été détournées de l'hôpital Suroît de Salaberry-de-Valleyfield vers l'hôpital Anna-Laberge «en raison d'une panne d'équipement», ce qui a entraîné une augmentation du nombre de patients nécessitant des soins urgents.
Une enquête menée après le décès du senior a révélé que l'intervalle de réévaluation de 30 minutes n'avait pas été respecté et que, si le diagnostic avait été posé plus tôt, il aurait pu être transféré au CHUM beaucoup plus rapidement.
Le rapport a également révélé que certains critères d'orientation des patients vers les urgences n'étaient pas en place lors de sa visite, ce qui aurait dû le diriger vers une zone équipée d'un moniteur cardiaque, plutôt que de le renvoyer dans la salle d'attente.
Le coroner a formulé plusieurs recommandations qui sont déjà mises en œuvre ou en cours de mise en œuvre, notamment «évaluer les possibilités de rénovation de l'hôpital afin d'ajouter des brancards, compte tenu du taux d'occupation constamment élevé» et « réduire le volume des ambulances en fonction du nombre de brancards prévu dans le permis de gestion du trafic».
Les recommandations qui nécessitent une attention particulière comprennent «la réalisation d'évaluations fréquentes, en fonction du niveau de priorité, en tenant compte des données subjectives fournies par les utilisateurs/proches» et « l'affectation d'une infirmière aux utilisateurs en attente d'une civière autre que celle affectée au triage, en utilisant le même ratio (1:5) que pour l'observation, comme mentionné dans les directives de triage ».


