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Nouveau Monde Graphite, à Saint-Michel-des-Saints, est sélectionné par Ottawa

Le projet Crawford Nickel figurera parmi les projets que le premier ministre transmettra au nouveau Bureau des grands projets.

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Mark Carney présente six nouveaux projets d’intérêt national Le premier ministre Mark Carney a annoncé une liste de six nouveaux projets d’intérêt national à l’échelle du Canada.

Le gouvernement fédéral souhaite peser sur l’accélérateur concernant un projet minier de graphite à Saint-Michel-des-Saints, dans Lanaudière.

L’initiative en question, la mine Matawinie de Nouveau Monde Graphite, figure sur une liste que le premier ministre, Mark Carney, a fait parvenir au Bureau des grands projets en vue de l’obtention d’une désignation d’intérêt national. Cela vise à ce que le projet aille de l’avant rapidement.

«Le projet va permettre de réduire les sources fortes en carbone, de renforcer la résilience canadienne en matière d’approvisionnement et de contribuer à l’accélération de la transition énergétique», a promis M. Carney jeudi en point de presse à Terrace, en Colombie-Britannique.

Il a ajouté que l’exploitation de cette mine serait faite avec «l’hydroélectricité propre du Québec». Il n’a toutefois pas précisé quel autre impact environnemental pourrait avoir le projet, notamment en matière de résidus miniers et de contamination des sols.

Un regroupement d’organisations environnementales ne partage pas la vision de M. Carney et s’oppose à l’approbation de Matawinie en mode accéléré.

«Afin d’éviter une contamination des milieux hydriques, tels le lac Taureau et la rivière Matawin, le projet minier Matawinie doit souscrire au même encadrement réglementaire que les autres mines du Canada», plaide le regroupement incluant Eau Secours et la Coalition Québec meilleure mine.

En vertu de la Loi visant à bâtir le Canada, ou loi C-5, la désignation établissant qu’un projet est d’intérêt national fait en sorte que celui-ci puisse contourner des lois fédérales en matière de protection de l’environnement, entre autres législations.

Quoi qu’il en soit, Ottawa estime que le projet Matawinie est prometteur pour le secteur de la défense ainsi que pour la chaîne d’approvisionnement en batteries.

Le fédéral estime que l’initiative créerait un millier de nouveaux emplois et attirerait 1,8 milliard $ en investissements.

En étant sur la liste des projets d’intérêt national, le projet de Nouveau Monde Graphite bénéficierait d’une meilleure coordination avec les différentes instances fédérales telles qu’Exportation et développement Canada et la Banque de l’infrastructure du Canada, a indiqué le président et chef de la direction de l’entreprise québécoise, Eric Desaulniers.

«Le dernier kilomètre du marathon, c’est vraiment le plus difficile, a-t-il dit en point de presse à Montréal. Je pense que c’est un ajout vraiment important (...) pas pour changer la réglementation comme telle, mais pour vraiment s’assurer que tout le monde se parle rapidement pour clôturer des projets comme le nôtre.»

À ses côtés, le ministre du Commerce intérieur, Dominic LeBlanc, a évoqué que la construction pourrait commencer «au début de 2026» et que la mine pourrait démarrer sa production dans «deux ans, deux ans et demi».

Doug Ford demande plus d’avancements

Parmi les autres initiatives recommandées par le gouvernement fédéral au Bureau des grands projets, on retrouve celle de Crawford Nickel, en Ontario.

Le premier ministre ontarien Doug Ford s’est dit heureux que le projet ait été sélectionné, mais a déploré le manque de progrès concernant d’autres projets.

«Il faut que nous avancions dans le Cercle de feu», a déclaré M. Ford, en faisant référence aux projets miniers prévus dans le nord de l’Ontario. Il a aussi insisté sur son souhait que des projets d’énergie nucléaire soient approuvés.

Le gouvernement fédéral a également annoncé qu’un projet hydroélectrique à Iqaluit pourrait bénéficier d’une procédure d’approbation accélérée.

Le projet, qui a déjà reçu des millions de dollars de financement fédéral pour l’ingénierie et la conception, est présenté comme un moyen d’aider la capitale du Nunavut à réduire sa dépendance à l’égard de sa centrale au diesel.

«D’ici 2050, nos besoins en électricité pourraient tripler dû à notre croissance économique et à l’augmentation de la demande pour des transports propres, aux processus industriels verts et aux centres de données, a fait valoir M. Carney. Pour répondre à cette demande, nous aurons besoin davantage de capacités hydroélectriques, solaires, éoliennes et nucléaires.»

Ottawa a aussi ajouté à sa liste un projet de ligne de transport d’électricité dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique.

Le regroupement Electricity Canada a applaudi l’annonce de M. Carney. «Nous sommes ravis du point focal du Bureau des grands projets vers des projets d’électricité. Nous avons beaucoup à bâtir dans les années à venir pour répondre à la demande croissante au Canada», a réagi le président et directeur général de l’organisation, Francis Bradley.

Les autres projets sélectionnés par Ottawa sont la mine Sisson au Nouveau-Brunswick et le projet de gaz naturel liquéfié (GNL) Ksi Lisims, situé près du lieu où M. Carney tenait son point de presse en Colombie-Britannique.

Un projet contesté par certains

Le projet Ksi Lisims devrait produire 12 millions de tonnes de GNL par année, destinées aux marchés asiatiques, où la demande de GNL est en constante croissance.

Questionné sur la contestation de ce projet par des Premières Nations, M. Carney s’est dit «encouragé» par l’appui de plusieurs autres communautés autochtones.

Le premier ministre a néanmoins cherché à se montrer ouvert aux préoccupations de divers intervenants autochtones, soulignant qu’un processus de consultation aura lieu.

«S’il y a quelconque accommodement qui peut être fait quant à ces perspectives, cela crée un processus permettant que ça arrive», a-t-il soutenu.

Le groupe environnemental Greenpeace est aussi critique du projet. «On ne doit pas se laisser berner: le gaz de fracturation n’est pas une solution climatique, au contraire», a déclaré l’organisation.

L’Institut climatique du Canada a été moins catégorique. «Il faut faire preuve de prudence : les engagements récents visant à accroître la production canadienne de gaz naturel liquéfié (GNL) entraîneront une hausse des émissions domestiques, sans garantie que les exportations de GNL réduiront les émissions à l’étranger», a déclaré leur vice-président exécutif, Dale Beugin.

L’Institut presse surtout M. Carney à mettre en place des mesures environnementales en même temps qu’il procède à des annonces économiques. «Pour concrétiser le potentiel de croissance à faibles émissions de carbone de plusieurs projets annoncés aujourd’hui, le gouvernement fédéral doit agir rapidement pour mettre en œuvre (des) politiques clés (...), notamment en renforçant la tarification du carbone pour l’industrie, en finalisant la réglementation sur le méthane dans le secteur pétrolier et gazier et en officialisant les incitatifs fiscaux et les règlements sur l’électricité propre.»

Deuxième série

M. Carney a annoncé, en septembre dernier, une première série de cinq projets que le gouvernement soumettait pour un examen accéléré il y a deux mois. Les conservateurs ont qualifié les projets de la première liste de «projets faciles à réaliser», car leur développement était déjà bien avancé.

Cette liste comprenait l’agrandissement du port de Montréal, une petite centrale nucléaire modulaire en Ontario, l’agrandissement d’une usine de GNL en Colombie-Britannique et deux projets miniers en Saskatchewan et en Colombie-Britannique.

Jusqu’à présent, aucun projet n’a reçu la désignation d’intérêt national, qui lui conférerait un traitement spécial afin de faciliter son avancement.

La création du Bureau des grands projets a été l’une des premières mesures prises par M. Carney après sa victoire aux élections générales, plus tôt cette année.

Le budget fédéral déposé la semaine dernière propose de consacrer 213,8 millions $ sur cinq ans à ce bureau. Le gouvernement prévoit également un projet de loi visant à faire du bureau une entité distincte – à l’instar d’une société d’État – plutôt que de le laisser sous l’autorité du Bureau du Conseil privé.

— Avec la collaboration de Nick Murray, à Ottawa, et de Frédéric Lacroix-Couture, à Montréal

Émilie Bergeron

Émilie Bergeron

Journaliste

Marie-Christine Bergeron

Marie-Christine Bergeron

Cheffe d'antenne