Les petites entreprises et les entreprises de transport se préparent à une possible grève de Postes Canada dès la semaine prochaine. Une perturbation qui, selon elles, pourrait mettre à rude épreuve les chaînes d'approvisionnement et bloquer des millions de colis ainsi que des milliards de dollars de ventes.
Les commerces familiaux et les entreprises de commerce électronique ont commencé à prendre d'autres dispositions pour acheminer leurs colis aux consommateurs et aux clients, mais beaucoup sont déjà exaspérés.
Au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, le détaillant Tracy's Rolling Yarn Shop a commencé à évaluer l'impact sur son chiffre d'affaires d'un possible recours à un grand service d'expédition, qui facture généralement plus cher que Postes Canada, pour livrer ses colis.
La propriétaire Tracy Stubbard a expliqué que le coût des petits envois avait dépassé les ventes lors de la grève de Postes Canada de l'année dernière, qui avait paralysé les opérations postales pendant plus d'un mois, pendant la période de pointe des expéditions, avant les congés des Fêtes.
Pour les habitants des zones rurales, où Postes Canada est généralement l'option la plus accessible, il y a aussi l'inconvénient de devoir trouver un autre service de courrier.
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«J'ai utilisé Purolator, car c'était l'endroit le plus proche et le plus facile d'accès, ce qui représentait tout de même 20 minutes de route. Mais leur bureau ne pouvait accueillir que deux ou trois personnes. Nous avons donc fait la queue dehors dans le froid pendant 45 minutes pour pouvoir expédier nos colis», relate Mme Stubbard.
Si un nombre croissant de transporteurs du dernier kilomètre et de plateformes d'expédition ont vu leurs volumes augmenter pendant la grève de 2024, nombre d'entre eux ont été pris au dépourvu et n'ont pu gérer qu'une fraction de la demande.
Jarrett Stewart, responsable des opérations commerciales de la jeune entreprise de livraison GoBolt, entrevoit une hausse de la clientèle dans le cas d'un arrêt de travail chez Postes Canada. Mais aussi certains enjeux si les grands services de messagerie sur lesquels sa compagnie compte limitent les volumes de fret.
L'entreprise torontoise, qui compte 500 employés et 12 entrepôts au Canada et aux États-Unis, offre des services d'exécution des commandes aux grands acteurs: entreposage, emballage et expédition d'articles pour Postes Canada, UPS, FedEx, le service postal des États-Unis et d'autres.
«Cela permet de réduire la dépendance à un transporteur unique comme Postes Canada», affirme M. Stewart, soulignant qu'une clientèle diversifiée atténue les conséquences d'une interruption de service chez l'un d'eux.
«Cependant, lorsqu'il s'agit de votre transporteur national, l'impact est considérable, car certains secteurs sont accessibles à lui seul», ajoute-t-il.
M. Stewart tente de prévenir des problèmes logistiques rencontrés par ses clients lors du dernier arrêt de travail. Par exemple, il a dû leur rappeler d'indiquer une adresse plutôt qu'une boîte postale — une boîte verrouillable située sur un site de Postes Canada et inaccessible aux autres coursiers — en cas de grève.
Un deuxième problème, mentionne-t-il, est la réduction des capacités dans l'écosystème du transport lorsqu'une partie de celui-ci est fermée.
«Nous avons transféré votre volume de Postes Canada à FedEx, mais FedEx dit ensuite: ‘‘non, non, nous ne pouvons pas prendre tout cela, nous plafonnons maintenant votre volume’’», décrit M. Stewart.
Une grève paralyserait des milliards de dollars de revenus du commerce électronique et laisserait les consommateurs ruraux attendre des biens essentiels, selon l'entreprise de transport alternative Stallion Express.
Les employés de Postes Canada pourraient se rendre sur les lignes de piquetage dès jeudi, la prolongation des conventions collectives existantes entre la société d'État et le syndicat expirant le 22 mai.
Une grève ou un lock-out constituerait en moins de six mois la deuxième interruption du service postal après que 55 000 employés ont débrayé pendant 32 jours en novembre et décembre.

