Les travailleurs de Postes Canada sont en grève nationale vendredi, en réponse à ce que le syndicat qualifie d'«attaque directe» du gouvernement fédéral contre l'avenir du service postal.
Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) a déclenché la grève jeudi soir après qu'Ottawa eut annoncé qu'il autoriserait la société d'État à prendre des mesures pour consolider ses finances en difficulté, notamment en mettant fin à la livraison quotidienne à domicile.
«Au lieu de soutenir de bons emplois stables et de protéger le service postal universel pour tous les Canadiens, le gouvernement a choisi de se ranger du côté du plan d'entreprise de Postes Canada, un plan qui, selon le syndicat, vise depuis longtemps à éroder les services, à affaiblir les travailleurs et à ouvrir la voie à la privatisation», a déploré Emilie Tobin, porte-parole du STTP, dans une déclaration vendredi.
Le gouvernement fédéral affirme accepter les recommandations formulées par une commission d'enquête industrielle mise sur pied plus tôt cette année. La commission a réclamé l'expansion des boîtes postales communautaires et a recommandé que Postes Canada devrait être autorisée à fermer certains bureaux de poste ruraux.
Dans une déclaration envoyée par courriel vendredi après-midi, Postes Canada a dit réévaluer «ses nouvelles offres globales après l’annonce de réformes» par Ottawa.
La société d'État s'est dite «déçue» de la réaction du syndicat de déclencher une grève nationale. «Cela aura pour effet de détériorer davantage la situation financière de Postes Canada», affirme la société.
Postes Canada reproche au STTP de rester inflexible, voire de durcir sa position dans le cadre de négociations.
«Les propositions du STTP ajouteraient des milliards en nouveaux coûts», affirme-t-elle, tandis qu'elle dit appuyer les réformes du gouvernement. Selon la société, celles-ci «permettront au service postal national de tracer la voie vers la rentabilité et d’assurer un avenir solide afin de répondre aux besoins en évolution des Canadiens et des Canadiennes».
Le ministre de l'Approvisionnement, Joël Lightbound, a déclaré jeudi que le gouvernement répondait à une crise financière chez Postes Canada, causée par le déclin des envois de lettres et la faible part de marché de la société d'État dans le marché des colis.
Postes Canada affirme perdre jusqu'à 10 millions $ par jour en raison d'une longue période d'incertitude liée au marché du travail, et elle a dû compter sur des renflouements fédéraux pour se maintenir à flot ces dernières années.
Le STTP, qui représente 55 000 travailleurs et travailleuses des postes, s'est dit pris au dépourvu par les changements apportés par Ottawa. Il soutient que Postes Canada et le gouvernement créent les conditions qui font baisser la demande pour ses services.
Mme Tobin a déclaré que la grève vise à défendre un service public sur lequel les Canadiens comptent.
«Nous ne pouvons pas rester les bras croisés pendant que le gouvernement et Postes Canada travaillent ensemble à démanteler ce que des générations de Canadiens ont bâti. Les membres du STTP sont unis dans la lutte pour protéger nos emplois, nos collectivités et l'avenir de Postes Canada», a-t-elle dit.
«Il a agi de façon irresponsable, en lançant hier [jeudi] une bombe atomique, a reproché vendredi matin le débuté bloquiste Alexis Deschênes. Ce qu'a fait hier [jeudi] le ministre, c'était d'annoncer une catastrophe, alors que le premier ministre n'est même pas au pays.»
«On a eu une enquête industrielle qui nous a fait une carte routière pour une réforme de la Société canadienne des postes qui va les remettre dans une situation de rentabilité et assurer des emplois à l'avenir à long terme, s'est défendu le leader parlementaire du gouvernement, Steven MacKinnon, pendant la période des questions. J'implore aux deux parties d'arriver à une entente, mais le gouvernement se doit de procéder. On ne peut plus dépenser des milliards de dollars dans les pertes de Postes Canada.»
«Mon collègue a parlé de façon éloquente d'assurer les services dans les régions éloignées, les régions autochtones, les régions rurales du Québec et de partout au Canada. C'est justement dans l'objectif de sauvegarder ces services-là que le ministre a agi», a ajouté M. MacKinnon.
En déployant des piquets de grève, le syndicat intensifie les mesures de grève qu'il mène depuis mai, notamment l'interdiction des heures supplémentaires et, plus récemment, la distribution de circulaires.
Postes Canada et le STTP négocient une convention collective depuis près de deux ans et n'ont toujours pas conclu d'entente sur les salaires et les autres réformes structurelles touchant les effectifs du service postal.
Postes Canada suspend complètement ses activités pendant la grève, à quelques exceptions près, comme la distribution des chèques de pension et des prestations d'aide sociale, comme les prestations de soutien aux personnes handicapées.
Aucun nouveau courrier ne sera autrement accepté et Postes Canada indique que les articles déjà acheminés par le service postal seront conservés et livrés après la fin de l'interruption de travail.
