Le «Comité des sages» a reçu les foudres de la communauté LGBTQ+ avant même de dévoiler son rapport sur l’identité de genre au Québec. Les communautés dénoncent le fait de ne pas avoir pu prendre connaissance du rapport avant son dévoilement au grand public, une promesse faite, semble-t-il, par le gouvernement du Québec.
Le Conseil québécois LGBT (CQ-LGBT) fait partie des organisations qui dénoncent l'attitude du «Comité des sages» et du gouvernement du Québec.
«Le gouvernement s’était engagé à transmettre le rapport au Conseil québécois LGBT en amont de sa sortie publique pour qu’il en prenne connaissance et qu’il puisse rassurer ses membres, une promesse qui n’a pas été tenue», explique le groupe vendredi dans un communiqué.
Le CQ-LGBT dénonce depuis le jour un la mise sur pied du Comité des sages remettant en doute la légitimité du processus, «confié à des personnes, ni concernées, ni expertes». Malgré tout, l'organisme a accepté de contribuer aux travaux des sages, «dans un esprit constructif».
«Nous espérons qu’aucun autre groupe vulnérable n’aura à traverser ce que nos communautés vivent depuis décembre 2023. On ne peut pas imaginer un comité d’hommes statuant sur l’avortement. Dans un contexte où les personnes LGBTQ+ voient leurs droits reculer à travers la planète, le gouvernement aura fait durer l’anxiété et la violence de ce processus jusqu’à la dernière minute», a déploré Magali Boudon, directrice générale du CQ-LGBT.
Le CQ-LGBT prendra position sur le contenu du document dans les prochains jours, après une analyse approfondie «des risques que pose le rapport à des reculs de droits pour les personnes LGBTQ+».

Aide aux Trans du Québec (TAQ) – qui été parmi les premiers groupes communautaires à critiquer la création du «Comité des sages» et sa composition – a aussi participé aux travaux sur l’identité de genre au Québec – une rencontre «polie» d’une heure affirme l’organisme – et déplore également le manque de transparence du «Comité des sages» pendant l’élaboration du rapport et au moment de son dévoilement.
«On n’a eu aucun contact avec le ministère de la Famille ou le comité lors de l’élaboration ou la rédaction du rapport. Ç’a été un processus très opaque», déplore Victoria F. Legault, directrice générale d’Aide aux Trans du Québec (TAQ).
Voyez une partie de l'entrevue accordée par Victoria F. Legault à Noovo Info dans la vidéo ci-haut.
S’il est encore trop tôt pour que Mme F. Legault se prononce sur le contenu du volumineux rapport, certains éléments lui font craindre leur pire.
«On trouve que c’est un rapport qui est vraiment teinté par une forme de misogynie puisqu’on va parler de la place des personnes trans dans le sport, dans les centres d’hébergement d’urgence, dans les prisons, etc., mais quand on parle de personnes trans, on parle seulement des femmes trans et pas autres personnes de la communauté et ça je trouve ça problématique», explique Victoria F. Legault.
«C’est extrêmement troublant. […] C’est très clair que la problématique du comité, ou finalement la problématique que le gouvernement entrevoit, c’est la présence des femmes trans qui représenterait une menace. C’est fort inquiétant.»
Selon Mme Legault, le travail du Comité des sages sur l'identité de genre au Québec est inutile.
«C’est très méprisant de la part du gouvernement non seulement de mettre sur pied un comité de personnes non concernées qui vont se pencher sur l’existence des personnes trans, mais on n’avait pas besoin de ça. C’est un rapport qui va avoir coûté près d’un million de dollars aux contribuables, il n’y a pas de problématique en soi avec les personnes trans, et ce rapport ne met rien de plus sur la table qu’on ne savait pas», soutient-elle.
Victoria F. Legault estime que Québec aurait dû investir les sommes dans la lutte contre la montée de la haine et la montée de la transphobie «parce que c’est ce qu’on vit concrètement nous en ce moment.»
Pourquoi un «Comité des sages»?
Le «Comité des sages» a été créé en 2023 par la Coalition avenir Québec (CAQ) alors que des groupes contre l’enseignement du concept d’identité de genre à l’école et de pro-LGBTQ+ s’affrontaient dans des rassemblements hostiles.
Le comité, dirigé par la ministre la Famille Suzanne Roy, est composé de Diane Lavallée, infirmière de formation et gestionnaire, du Dr Jean-Bernard Trudeau et du professeur en droit constitutionnel Patrick Taillon. Il avait comme mandat de brosser un portrait de la réalité québécoise, de recenser les politiques publiques, les pratiques ainsi que les directives québécoises dans plusieurs secteurs (éducation, sports, famille, santé, etc.) au Québec et ailleurs, d'analyser les effets potentiels de ces politiques et pratiques sur l'ensemble de la société québécoise tout en collaborant étroitement avec la communauté LBGTQ+.
Au sujet de ce dernier aspect, le gouvernement Legault avait mal commencé. Le milieu LGBTQ+ avait déploré l’absence de consultations de Québec auprès du communautaire lors de l’élaboration du comité des sages.
«Ces personnes sont des expertes dans leur milieu, mais pas nécessairement des enjeux de la communauté LGBTQ+», avait commenté le directeur général de l’organisme ENSEMBLE pour le respect de la diversité, Rafaël Provost, dans un entretien avec Noovo Info lors du dévoilement des membres du comité en décembre 2023.
Avec de l'information de Julien Denis et de Guillaume Théroux pour Noovo Info, ainsi que de La Presse canadienne.

