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Le Canada pourrait profiter de l'imposition de frais de visa aux États-Unis

M. Carney croit y voir une occasion pour le Canada. Il affirme vouloir mettre en place un programme à ce sujet.

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Le premier ministre fédéral Mark Carney se dirige vers une conférence de presse à la Maison du Canada, à Londres, le 27 septembre 2025. Le premier ministre fédéral Mark Carney se dirige vers une conférence de presse à la Maison du Canada, à Londres, le 27 septembre 2025. (Sean Kilpatrick/La Presse canadienne)

Le premier ministre fédéral Mark Carney dit que les nouveaux frais de 100 000 $ imposés aux États-Unis pour les visas temporaires des travailleurs hautement qualifiés pourraient être profitables... pour le Canada.

Habituellement, ce sont les entreprises canadiennes qui voient leurs travailleurs qualifiés s'en aller aux États-Unis. Certains experts craignent même que la décision des États-Unis  n'accélère l'exode vers le sud de la frontière.

Comme auparavant, les nouveaux visas H-1B sont valides pour trois ans, mais les frais pour l'obtenir sont passés de 215 $ à 100 000 $. Le but était d'attirer des travailleurs qualifiés détenant au moins un baccalauréat. L'administration Trump prétend qu'ils empêchaient les entreprises américaines d'embaucher des Américains parce que les travailleurs étrangers acceptent des salaires moins élevés. Selon les données de la firme Pew Research, environ 60 % des détenteurs de ce visa depuis 2012 étaient des travailleurs sur secteur de l'informatique.

M. Carney croit y voir une occasion pour le Canada. Il affirme vouloir mettre en place un programme à ce sujet.

«Moins de gens obtiendront ce visa pour entrer aux États-Unis, a déclaré le premier ministre, la semaine dernière. Beaucoup ont des habiletés attrayantes. Ils sont prêts à déménager pour travailler. Donc, c'est une occasion pour le Canada.»

Il reconnaît toutefois que les admissions au pays dépendront des intentions du gouvernement fédéral de réduire l'entrée d'immigrants temporaires ou permanents au Canada.

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Le gouvernement veut réduire le nombre de résidents non permanents à 5 % de sa population totale d'ici 2027.

Selon Statistique Canada, la part actuelle des résidents non permanents s'élevait au 1er avril à 7,1 %, une réduction de 0,3 point par rapport au début de l'année 2025.

Une autre solution

 Les Canadiens souhaitant travailler dans le secteur des technologies aux États-Unis peuvent suivre une autre voie: le visa TN mis en place par l'accord de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique (ACÉUM).

Le président du Conseil canadien des innovateurs, Benjamin Bergen, croit que cette voie peut rendre les Canadiens plus attirants aux yeux des entreprises américaines si la hausse des frais du visa H-1B provoque une pénurie de main-d'œuvre aux États-Unis.

«Alors, plutôt que d'attirer des gens de la Chine ou de l'Inde, vont-elles s'intéresser aux gens travaillant dans des entreprises canadiennes ou étudiants dans des universités canadiennes. C'est quelque chose que nous surveillons», lance-t-il.

La concurrence sera difficile pour les entreprises d'ici. 

Angus Lockhart, un expert du groupe de réflexion Dais de l'Université du Toronto métropolitain, mentionne que la rémunération dans le secteur des technologies aux États-Unis est environ 46 % supérieure qu'au Canada.

«Les travailleurs des technologies, les diplômés canadiens ont vraiment des forts incitatifs pour s'en aller aux États-Unis. Ils gagneraient plus d'argent que s'ils restaient ici.»

Malgré cette concurrence, le Canada peut toujours attirer des travailleurs étrangers. La haute technologie, la science et le génie emploient plus d'immigrants que les autres secteurs de l'économie.

Des données gouvernementales indiquent que 35 % des programmeurs informatiques sont nés à l'étranger, comparativement à 26 % pour l'ensemble de la main-d'œuvre.

M. Bergen croit que le Canada devra créer un environnement dans lequel les entreprises technologiques et les jeunes pousses pourront croître.

«On ne doit pas seulement réagir par réflexe. Il ne suffit pas de dire que les Américains font quelque chose de stupide et que nous allons donc en profiter. Cela ne fonctionne pas ainsi.»

Le Canada devra mieux intégrer les produits canadiens dans sa fonction publique. M. Bergen souhaite une stratégie similaire à celles mises en place au Danemark, en Israël, au Japon, en Corée du Sud et aux États-Unis.

«En observant ce qui se passe ici, nous avons de la misère à acheter des produits de nos propres fournisseurs. Nous avons besoin d'une stratégie gouvernementale afin de mettre en place et de soutenir un écosystème.»

David Baxter

David Baxter

Journaliste