Face aux menaces croissantes provenant d'États concurrents et au changement climatique, les hauts responsables militaires des Forces armées canadiennes (FAC) élaborent actuellement un plan visant à renforcer les défenses du pays en créant une force civile composée de 300 000 volontaires.
Ce document non classifié a été distribué par l'État-major interarmées stratégique, le groupe interne qui fournit des conseils et des analyses militaires au chef d'état-major de la Défense, le général Jennie Carignan.
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News.
Les détails sont présentés dans un document intitulé CDS/DM PLANNING DIRECTION - DEFENCE MOBILIZATION PLAN (Directive de planification CDS/DM - Plan de mobilisation de la défense). Ce document de neuf pages daté du 30 mai est intitulé «Plan de mobilisation de la défense» (DMP).
Un avertissement inquiétant figure dans les premières lignes: «Les menaces croissantes alimentées par l'accélération des technologies posent des défis urgents, simultanés et sans précédent à la capacité du Canada à se défendre. La sécurité mondiale a été considérablement affectée par la montée de la concurrence stratégique entre les États, combinée à la fréquence et à l'intensité croissantes des catastrophes naturelles liées au changement climatique.»
L'existence de ce document interne a été révélée pour la première fois par le quotidien Ottawa Citizen.
Le plan préconise une approche «globale de la société» «afin d'assurer la défense du Canada contre les menaces intérieures, qu'il s'agisse de catastrophes naturelles de faible intensité ou d'opérations de combat à grande échelle et de forte intensité». Le document précise que le plan doit être «opportun et évolutif».
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Il fixe comme objectif de faire passer le nombre de réservistes de 30 000 à 100 000 et de recruter 300 000 volontaires pour rejoindre une force supplémentaire.
«Cela s'inscrit dans le cadre des efforts de transformation et de modernisation, qui comprennent l'augmentation de notre réserve primaire et de notre réserve supplémentaire. Nous devons être prêts en cas de crise, que ce soit ici ou ailleurs», a affirmé M. Carignan lors d'uneentrevue avec Omar Sachedina, correspondant en chef de CTV News, le jour du Souvenir. «Tous les Canadiens seront invités à servir volontairement.»
Le document précise que la force supplémentaire «devrait initialement donner la priorité aux fonctionnaires volontaires au niveau fédéral et provincial/territorial».
Les personnes qui rejoignent le corps de défense civile seraient soumises à des limites d'âge moins restrictives et devraient satisfaire à des exigences physiques et de condition physique moins élevées. Leur formation serait limitée à cinq jours par an afin de garantir son accessibilité.
Au cours de cette courte période, les volontaires acquerraient des compétences telles que le tir, le déplacement, la communication, la conduite d'un camion et le pilotage d'un drone, selon le plan de mobilisation. La force civile canadienne bénéficierait d'une couverture médicale pendant la formation, mais pas de prestations de retraite.
Le plan de mobilisation a été envoyé à 20 hauts commandants et amiraux canadiens, notamment aux dirigeants du NORAD et de l'OTAN, des forces spéciales et du Cybercom. Le plan n'a pas été approuvé par le gouvernement dans sa forme actuelle. Cependant, le ministre de la Défense, David McGuinty, se dit favorable à l'idée d'un corps de défense volontaire.
«L'idée d'avoir une force civile composée de Canadiens prêts, disposés et capables de servir leur pays est un sujet dont on parle depuis des années au Canada. C'est quelque chose que nos alliés font et poursuivent très activement», a soutenu M. McGuinty, citant la Finlande et la Suède comme exemples à suivre pour le Canada.
Ces deux pays nordiques comptent des centaines de milliers de citoyens formés pour intervenir en cas de catastrophe naturelle ou d'origine humaine. Les volontaires aident à gérer les abris anti-bombes publics et privés et coordonnent les interventions d'urgence au niveau communautaire.
Genevieve Beauchemin, de CTV National News, a récemment rendu compte de la stratégie de «défense totale» de la Suède, qui consiste à enrôler tous les citoyens pour se préparer à la guerre.
En réponse à une question de CTV News sur la composition d'une force civile, M. McGuinty a qu'il souhaitait voir des fonctionnaires s'engager, mais aussi « des banquiers et des mécaniciens dans les ateliers ».
Mais la création d'une force civile constituera un défi supplémentaire qui s'ajoutera aux difficultés actuelles de recrutement de l'armée.
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Les Forces armées canadiennes ne disposent pas encore d'effectifs suffisants pour atteindre leur «effectif autorisé» de 71 500 soldats et 30 000 réservistes. Elles doivent encore recruter environ 15 000 personnes supplémentaires.
M. McGuinty se dit optimiste quant à la possibilité pour l'armée d'atteindre bientôt cet objectif, compte tenu des nouveaux investissements du gouvernement dans la défense.
«Nous venons d'inscrire 82 milliards de dollars au budget pour renforcer nos Forces armées canadiennes... les réactions sont positives et le recrutement a augmenté de 55 % par rapport à l'année dernière», a indiqué M. McGuinty.


