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«Marc Miller, c'est une honte pour tous les Québécois», tonne François Legault

Plus tôt mardi, M. Miller avait maintenu les bémols qu'il avait exprimés dès 2023 quant au déclin du français au Québec.

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f90db3bf4409f9cde4064558a33bb3aafd9af596f12cf590e8eb018c4af8f300.jpg Le premier ministre du Québec, François Legault, à l'hôtel de ville de Montréal le 21 novembre 2025. LA PRESSE CANADIENNE/Christopher Katsarov (Christopher Katsarov/Christopher Katsarov/La Presse canadienne)

Le premier ministre du Québec, François Legault, a envoyé une volée de bois vert mardi au nouveau ministre responsable des Langues officielles dans le cabinet Carney, Marc Miller, lui reprochant ses bémols quant au déclin du français au Québec. 

«Marc Miller, c'est une honte pour tous les Québécois, a tonné M. Legault en se rendant à la période des questions. Je ne sais pas comment il va faire pour se présenter dans une activité culturelle au Québec après avoir dit des conneries comme ça.»

Plus tôt dans la journée, à Ottawa, M. Miller avait maintenu des nuances qu'il avait tenu à exprimer dès 2023 quant au déclin du français au Québec. «Ce que je refuse, c'est ce catéchisme que veulent certains partis politiques pour dire que le français est en recul total», a-t-il déclaré.

Il a fait valoir que «la réalité, dans tout ça, c'est qu'il y a de bonnes nouvelles, notamment les nouvelles depuis plusieurs décennies grâce à la loi 101» et «grâce à l'entente Canada-Québec» qui a conféré plusieurs pouvoirs à la province en matière d'immigration, entre autres pour prioriser les nouveaux arrivants francophones.

«Le français, je vais le répéter, est immensément fragile en Amérique du Nord, et il faut le protéger», a ajouté M. Miller, qui est aussi devenu ministre de la Culture et de l'Identité canadienne.

Appelé à préciser à quel niveau il reconnaît le déclin du français, le ministre a répondu que cela est le cas pour la «langue parlée à la maison» et, «de façon statistique, au travail».

«Il faut faire un effort supplémentaire», a-t-il tranché.

M. Miller a montré des signes d'exaspération quant à «la politisation de l'enjeu». «Je pense que c'est utilisé pour des raisons identitaires, et je pense que, comme Québécois, je suis assez tanné de ce débat qui est généralement assez identitaire», a dit l'élu de Ville-Marie—Le Sud-Ouest—Île-des-Soeurs.

«Depuis deux ans, de 2022 à 2024, le pourcentage de francophones à Montréal est passé de 48 % à 43 %. Pis là, Marc Miller, le nouveau ministre fédéral de la Culture, vient dire qu'il est tanné du débat sur le déclin du français. Quelle honte!» a fulminé M. Legault.

À Ottawa, le chef conservateur Pierre Poilievre a ouvert la période des questions en tirant à boulets rouges sur les libéraux en raison des propos de M. Miller. Il a, du même souffle, remis en question le jugement du premier ministre, Mark Carney, qui a arrêté son choix sur cet élu pour succéder à Steven Guilbeault.

«Nous, les conservateurs, ne sommes pas tannés. Nous défendrons la langue française. (...) De tous les députés libéraux qu'il aurait pu nommer, pourquoi a-t-il nommé quelqu'un qui est tanné de défendre la langue française et la culture québécoise?», a lancé le chef de l'opposition officielle.

Le premier ministre Carney s'est levé pour donner la réplique, mais n'a pas commenté les propos de son ministre assermenté la veille. «Je suis pour mon nouveau ministre. Je suis contre le chef de l'opposition, qui est contre le plan d'action sur la langue française, quatre milliards de dollars. Il est contre les investissements dans le secteur culturel québécois», a-t-il riposté en faisant allusion à des éléments contenus dans le budget 2025.

Quelques minutes avant, le chef bloquiste Yves-François Blanchet avait soutenu qu'«il n'y a pas de meilleure révélation» que la nomination de M. Miller pour témoigner «de comment ce gouvernement-là n'a aucune lecture de la réalité québécoise».

«Le français est ratatiné comme une peau de chagrin, probablement dans son voisinage», a-t-il dit.

Le ministre s'est défendu durant la période des questions, après que le député bloquiste Mario Beaulieu l'eut qualifié d'«opposant à la protection de la langue française».

«J’ai fait mon primaire en français, mon secondaire en français, mon cégep en français, un bac en français, une maîtrise en français, a-t-il énuméré. J’ai élevé mes enfants dans trois langues, dont le français. J’adore le français et je défendrai notre belle langue jusqu’à la fin de mes jours.»

M. Miller avait, à l'automne 2023, refusé de reconnaître le déclin du français au Québec - préférant parler de langue «menacée» -, avant de se raviser.

«Je ne nie pas du tout quand on parle du déclin du français comme langue maternelle», avait-il affirmé au cours d'une entrevue accordée à La Presse Canadienne.

Il avait noté son agacement quant à l'utilisation «à outrance», par le Bloc québécois, de cet indicateur statistique qu'est la langue maternelle. Selon lui, cela laisse entendre que ceux qui ont appris le français plus tard dans leur vie seraient moins Québécois que les autres.

M. Miller faisait aussi partie de certains élus libéraux qui avaient des réticences quant à la réforme de la Loi sur les langues officielles, adoptée en juin 2023.

- Avec des informations de Michel Saba

Avec des informations de Michel Saba

Émilie Bergeron

Émilie Bergeron

Journaliste

Caroline Plante

Caroline Plante

Journaliste