Santé

De nouvelles lignes directrices sur la prévention du VIH, axées sur la PPrE

Des militants ont exhorté lundi le gouvernement fédéral à respecter un engagement du gouvernement Trudeau.

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cc8efc16332c9282b17d38a29e9233640b51b3f04aef0a99a6bef8af585b035e.jpg Une trousse d'autodépistage du VIH est photographiée au bureau de la Fondation des personnes atteintes du sida de Toronto, le vendredi 16 février 2024. LA PRESSE CANADIENNE/Christopher Katsarov (Christopher Katsarov/Christopher Katsarov | La Presse canadienne)

Une coalition de médecins de partout au Canada publie de nouvelles lignes directrices sur la prescription de médicaments préventifs contre le VIH, en mettant l’accent sur la promotion et la sensibilisation accrues à cette nouvelle classe de médicaments. 

À l'occasion de la Journée mondiale du sida, des militants ont exhorté lundi le gouvernement fédéral à respecter l'engagement du gouvernement Trudeau de réformer les lois sur la divulgation du statut sérologique et à fournir les fonds nécessaires pour relancer les efforts du Canada visant à mettre fin à la pandémie.

Le Réseau juridique VIH affirme que la stagnation des progrès du Canada en matière de prévention des nouvelles infections au VIH — particulièrement chez les Autochtones des Prairies — coûte des millions de dollars aux gouvernements.

«Nous n'avons pas atteint ces objectifs, et ce, pour pratiquement tous les indicateurs», a déclaré Sandra Ka Hon Chu, codirectrice du groupe, lors d'une conférence de presse jeudi dernier sur la colline du Parlement.

Elle a cité des données de l'Institut d'économie de la santé d'Edmonton, qui estiment le coût moyen d'une nouvelle infection au VIH à environ 1,44 million $. Bien que ce montant soit principalement attribuable aux pertes de productivité, il comprend 310 000 $ en coûts directs de soins de santé.

De nouvelles données publiées lundi par l'Agence de la santé publique du Canada indiquent que 1826 nouveaux cas de VIH ont été diagnostiqués à l'extérieur du Québec en 2024, un chiffre qui, selon Ottawa, représente une «légère baisse» après plusieurs années de hausse. 

Le groupe d'analyse du VIH CATIE a expliqué lundi que cette baisse est probablement due à des changements dans la prise en charge des cas de diagnostic et «ne doit pas être interprétée comme une réduction de la transmission du VIH», qui, selon les modélisations, est toujours en hausse.

Des militants affirment que le Canada enregistre encore de nouveaux cas, notamment parce que les communautés les plus touchées par le VIH évitent le dépistage et le traitement par crainte de poursuites judiciaires.

Les Canadiens vivant avec le VIH peuvent être poursuivis pour ne pas avoir divulgué leur séropositivité à leurs partenaires sexuels, même lorsqu'ils prennent des médicaments d'ordonnance qui, selon l'Agence de la santé publique du Canada, rendent le VIH «non transmissible» à une personne séronégative.

«La loi ne reflète pas la réalité scientifique, a déclaré André Capretti, analyste des politiques au Réseau juridique VIH, lors de la conférence de presse de la semaine dernière. La criminalisation de la non-divulgation du VIH est non seulement discriminatoire et scientifiquement obsolète, mais elle compromet également tous nos efforts. Elle dissuade les gens de se faire dépister, de se faire traiter et de recevoir des soins.» 

Le Réseau juridique VIH indique qu'au moins 206 personnes ont été accusées au Canada pour avoir prétendument omis de divulguer leur séropositivité, dans le cadre d'au moins 224 affaires criminelles depuis 1989.

Des organismes de services affirment que des personnes sont menacées d'arrestation pour non-divulgation de leur séropositivité tous les quelques mois. Bien que ces affaires n'aboutissent pas toujours à une arrestation, une poursuite pour agression sexuelle peut entraîner l'inscription d'une personne au Registre national des délinquants sexuels.

Les libéraux promettent de régler ce problème depuis 2016 et ont publié des directives à l'intention des procureurs en 2018 afin de les dissuader de porter des accusations criminelles lorsqu'il n'existe aucune possibilité réaliste de transmission.

Près de dix ans plus tard, on ignore si le gouvernement du premier ministre Mark Carney donnera suite au plan, actuellement au point mort, du gouvernement Trudeau visant à réformer les lois sur la divulgation.

Sur X, M. Carney a republié une vidéo de la ministre de la Santé, Marjorie Michel, participant à un événement avec des militants lundi. 

Le premier ministre a également indiqué dans une publication qu'à l'occasion de la Journée mondiale du sida, «nous rendons hommage aux victimes et exprimons notre solidarité envers les militants et les communautés qui mènent la lutte contre le VIH/sida».

«Les progrès de la science médicale ont transformé la réalité des personnes qui vivent avec le VIH, mais la stigmatisation est encore présente, a-t-il ajouté dans sa publication, sans faire mention de la criminalisation. Dans la population canadienne, trop de gens sont encore seuls face au poids de cette stigmatisation. Ensemble, nous pouvons bâtir un pays où chaque Canadien et chaque Canadienne peut vivre dans la dignité.»

Mme Michel a publié une déclaration qui ne faisait aucune mention de la criminalisation. Le bureau du ministre de la Justice, Sean Fraser, a indiqué avoir consulté divers groupes, notamment en faisant intervenir sa secrétaire parlementaire, la députée Patricia Lattanzio, lors d'une table ronde sur le sujet la semaine dernière.

«Nos travaux se poursuivent et nous sommes en contact avec les parties prenantes», a écrit la porte-parole Lola Dandybaeva dans une déclaration qui ne faisait aucune mention de la criminalisation.

Le fédéral exhorté d'augmenter les dépenses

Le Réseau juridique VIH a également critiqué lundi les restrictions imposées aux programmes d'échange de seringues dans les prisons pour prévenir la propagation du VIH, ainsi que la réduction du nombre de sites d'injection supervisée par les provinces.

Des députés et des sénateurs du Caucus mondial pour l'égalité — un réseau international de parlementaires voués à lutter contre la discrimination envers les personnes 2ELGBTQI+ — ont exhorté Ottawa à augmenter les dépenses consacrées au traitement et à la prévention afin de permettre au Canada d'atteindre les objectifs internationaux.

«Les progrès risquent d'être anéantis par la complaisance», peut-on lire dans une déclaration commune appuyée par 17 sénateurs et cinq députés canadiens, dont les libéraux Rob Oliphant et Hedy Fry. 

Les statistiques d'Ottawa placent le Canada en retrait par rapport à la plupart des pays du G7 en matière de lutte contre le VIH/sida. Le Canada est devancé par le Royaume-Uni sur les trois indicateurs et par la France, l'Italie et l'Allemagne pour ce qui est de la connaissance du statut sérologique des personnes vivant avec le VIH.

Le Programme commun des Nations unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) affirme que les coupes budgétaires décidées par des pays comme le Canada et les États-Unis — qui ont contribué à réduire d'environ un tiers le financement mondial des campagnes de lutte contre le sida dans les pays en développement — compromettent les progrès réalisés dans la lutte contre l'épidémie à l'échelle mondiale.

Le mois dernier, la directrice générale d'ONUSIDA a exhorté Mark Carney à revenir sur la toute première réduction de la contribution du Canada au Fonds mondial, un programme majeur de lutte contre les maladies infectieuses dans les pays les plus pauvres du monde, ainsi que sur sa réduction globale de l'aide publique au développement.

Le gouvernement a fait valoir qu'il ajustait les dépenses d'aide aux niveaux antérieurs à la pandémie de COVID-19, mais ONUSIDA prévient qu'une forte augmentation des souffrances pourrait survenir à mesure que Washington et ses pairs réduisent leur aide étrangère.

Hannah Alberga

Hannah Alberga

Journaliste