La crise au Parti libéral du Québec se poursuit: l’ex-directrice de cabinet Geneviève Hinse met en demeure la députée Marwah Rizqy à la suite de son congédiement.
«En contravention à la coutume constitutionnelle qui réservait au chef de parti cette prérogative, vous avez cavalièrement prétendu congédier madame Hinse de son poste de cheffe de cabinet, “notamment pour faute grave et rupture du lien de confiance”», écrit l’avocat de Mme Hinse, Jacques Jeansonne, dans la mise en demeure dont La Presse Canadienne a obtenu copie.
«Vous ne lui avez pas explicité votre décision, pas plus qu’aux instances du Parti à qui vous avez prétexté de la confidentialité de vos motifs, alors que vous n’en aviez aucun.»
M. Jeansonne poursuit en affirmant que le silence de Mme Rizqy «aggrave le préjudice subi» par sa cliente.
La mise en demeure a été envoyée mercredi. L’avocat donnait un ultimatum de 24 heures à Marwah Rizqy pour qu’elle admette publiquement l’absence de motif au congédiement de Geneviève Hinse.
«Sachez qu'à défaut de vous conformer à cette mise en demeure les procédures requises seront entreprises à votre encontre sans autre avis ni délai et que votre refus de voir à mitiger le préjudice subi par notre cliente, sera allégué et mis au compte de l’aggravation de celui-ci», ajoute Jacques Jeansonne.
«Vous seriez bien avisée d’agir en conséquence», conclut-il.
La réponse de Rizqy
Selon des informations obtenues par Noovo Info, les avocats de Marwah Rizqy ont répondu à l'avocat de Geneviève Hinse dans les temps. Ils n'ont toutefois pas admis publiquement l'absence de motif justifiant son congédiement. Ces derniers considèrent le tout comme un cas de relations de travail.
«Bris de confiance»
Rappelons que mardi, le chef libéral Pablo Rodriguez a démis la députée Marwah Rizqy de ses fonctions de cheffe parlementaire et l’a suspendue du caucus, évoquant un «bris de confiance».
La raison: Mme Rizqy a congédié sa directrice de cabinet, Geneviève Hinse, une proche de M. Rodriguez, sans lui en parler préalablement.
Dans une déclaration écrite envoyée aux médias mercredi, Mme Hinse s’est défendue en affirmant être «convaincue que rien ne justifiait» son licenciement.
«Lundi, à mon immense surprise, j’ai été congédiée de mon poste de cheffe de cabinet de l’opposition officielle à l’Assemblée nationale, par Marwah Rizqy. En dehors d’une courte lettre, je n’ai pas eu, à ce jour, la moindre explication de sa part, que ce soit verbalement ou par écrit, de ce qui justifiait un tel congédiement», a-t-elle écrit.
M. Rodriguez a répété mercredi qu’il ne savait toujours pas pourquoi Mme Hinse avait été congédiée. «Il n’y a que madame Rizqy qui le sait et il va falloir qu’éventuellement elle le dise», a-t-il affirmé.
En effet, la députée de Saint-Laurent n’a toujours pas parlé publiquement depuis qu’elle a congédié sa directrice de cabinet.
Dans un bref message envoyé aux élus libéraux lundi soir, Marwah Rizqy avait affirmé que Mme Hinse «n’était plus à l’emploi du cabinet» et était remplacée dès maintenant par la directrice des opérations, Isabelle Lord.
N’étant pas élu à l’Assemblée nationale, Pablo Rodriguez avait confié à Mme Rizqy le mandat d’occuper le poste de cheffe de l’opposition officielle jusqu’aux élections générales de 2026. Marwah Rizqy, qui ne doit pas se représenter, a appuyé Pablo Rodriguez dans la course à la chefferie.
Crise au PLQ
Le PLQ est plongé dans une profonde crise depuis cet incident. Mercredi, Pablo Rodriguez a défendu bec et ongles son intégrité et celle de son parti après que des textos troublants en lien avec sa course à la chefferie ont fait surface.
Le Bureau d’enquête de Québecor a en effet révélé des messages suggérant que des membres qui appuyaient Pablo Rodriguez lors de la course auraient eu des récompenses en argent. Les personnes à l’origine de ces textos ne sont toutefois pas nommées dans l’article.
Le chef libéral a assuré qu’il n’avait rien à se reprocher et a même remis en question l’authenticité de ces messages.
Le PLQ a mandaté une firme externe pour faire la lumière sur cette histoire.
Fait surprenant, Élections Québec indique que «dans le contexte d’une course à la chefferie, la Loi électorale ne prévoit pas d’infraction pour interdire à quelqu’un de verser un don en échange d’un vote».
On ajoute toutefois que la Loi électorale encadre le financement des chefferies. «Les fonds de campagne des candidats doivent provenir de contributions d’au plus 500 $ par électeur et toutes leurs dépenses de campagne doivent être rapportées dans un rapport», indique la porte-parole Julie St-Arnaud-Drolet.
Élections Québec précise que donner de l'argent en échange d'un vote constitue une infraction dans le cadre d'une élection partielle ou générale.
Le gouvernement caquiste «n'exclut rien»
Le ministre responsable des Institutions démocratiques, Jean-François Roberge, ne ferme d'ailleurs pas la porte à colmater cette brèche qui permet d'échanger un vote contre de l'argent.
«Ce qui a été rapporté est préoccupant. On est en train de faire les vérifications nécessaires. On va voir où ça va nous mener. On est en train d'évaluer, puis on n'exclut rien pour la suite», a indiqué jeudi son directeur des communications, Thomas Verville.
Élections Québec précise que donner de l'argent en échange d'un vote constitue une infraction dans le cadre d'une élection partielle ou générale.

