Le gouvernement fédéral intervient pour résoudre le conflit de travail entre Air Canada et le syndicat représentant les agents de bord.
La ministre de l'Emploi, Patty Hajdu, a annoncé samedi avoir ordonné un arbitrage exécutoire et la reprise des activités.
Au cours d'un point de presse présenté à Ottawa, Mme Hajdu dit constater que Air Canada et le syndicat étaient dans l’impasse et ne pouvaient pas résoudre leur différend.
Elle a demandé l'intervention du Conseil canadien des relations industrielles afin «d'imposer un arbitrage définitif et contraignant». En conséquence, la durée de la convention collective existante est prolongée jusqu’à ce qu’un nouveau contrat de travail soit établi par l’arbitre.
«Cette décision vise à faire en sorte que les centaines de milliers de Canadiens et de visiteurs au pays ne seront pas affectés en raison de vols annulés, a déclaré la ministre. De plus, les envois de biens essentiels, comme les produits pharmaceutiques et les tissus humains – dont plus de 40 % sont transportés par Air Canada – devraient poursuivre leur chemin et atteindre leur destination.»
Les agents de bord d'Air Canada ont déclenché samedi une grève peu avant 1 h. Trente minutes plus tard, ce fut au tour de la compagnie aérienne d'annoncer qu'elle imposait un lock-out envers ce groupe d'employés.
Mme Hajdu a souligné que le conflit avait déjà causé de grands torts aux Canadiens et à l'économie du pays.
Certains groupes de pression avaient déjà réclamé une intervention du gouvernement fédéral.
Dans un communiqué publié samedi matin, la Fédération des chambres de commerce du Québec exhortait le gouvernement à «d'intervenir au plus vite en recourant à l'arbitrage exécutoire pour mettre fin à l'arrêt de travail en cours chez Air Canada».
«Dans un contexte d'instabilité économique et de crise tarifaire, ce conflit de travail supplémentaire nuit une fois de plus à la réputation du Québec à l'échelle mondiale», a déclaré la pdg de l'organisation, Véronique Proulx.
Air Canada a déjà annulé plus de 600 vols au cours des deux derniers jours en préparation d'un éventuel conflit de travail. Les vols d'Air Canada Express, exploités par les compagnies aériennes tierces Jazz et PAL, ne sont pas touchés par cette interruption.
Mme Hajdu a convenu que plusieurs jours seraient nécessaires avant un retour à la normale du service.
L'annonce a rapidement été dénoncée sur les piquets de grève érigés par le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) près des principaux aéroports du Canada, notamment à Montréal, Toronto, Calgary et Vancouver.
À Toronto, des syndiqués ont scandé: «Honte à toi, Patty Hadju!».
Le syndicat avait déjà prévu une intervention du gouvernement fédéral dans le conflit.
Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) avait accusé Air Canada de refuser de négocier de bonne foi à cause de la probabilité d'une intervention du gouvernement fédéral.
Le président de la composante d'Air Canada au SCFP, Wesley Lesosky, a reproché samedi au gouvernement fédéral de tenir un double discours.
«Les libéraux nous ont dit que le meilleur endroit pour améliorer nos conditions de travail était à la table des négociations. Maintenant que nous y sommes avec un patron obstiné, ils nient nos droits inscrits dans la Charte et donnent à Air Canada ce qu'elle veut exactement», a déclaré le SCFP dans un communiqué.
De son côté, Air Canada n'a pas souhaité réagir à l'annonce de la ministre Hadju. En réponse à une demande de CTV News concernant la décision d'arbitrage exécutoire, la compagnie aérienne a déclaré qu'il était «prématuré de commenter, car le processus du CCRI est en cours».
«Il est également prématuré de commenter la reprise des activités de la compagnie aérienne. Nous demandons donc toujours à nos clients de ne pas se rendre à l'aéroport, sauf s'ils ont une réservation confirmée et que leur vol est indiqué comme étant en service.»
La compagnie aérienne a toutefois précisé dans un autre communiqué envoyé samedi en début de soirée, que ses vols restaient suspendus «dans l'attente du processus du CCRI».
«Pour l’instant, tous les vols d’Air Canada et d’Air Canada Rouge sont annulés jusqu’à l’après-midi (HE) du 17 août 2025. Les vols d’Air Canada Express exploités par Jazz ou PAL continuent d’être assurés normalement.»
Le principal point de litige demeure les salaires qui n'ont pas suivi le rythme de l'inflation au cours des 10 dernières années. Les agents de bord veulent aussi être payés lorsque leur avion ne vole pas.
«Ce que nous demandons n'est pas déraisonnable. Nos demandes ne sont pas trop éloignées de celles des concurrents d'Air Canada, comme Air Transat. Elles sont réalistes et on le mérite. Nous sommes le transporteur national, mais nos gens doivent vivre dans une situation de pauvreté», a souligné M. Lesosky.
Shanyn Elliott, co-présidente du comité de mobilisation et d'engagement de la composante d'Air Canada au SCFP, dit que les piquets de grève seront maintenus jusqu'à ce que le syndicat décide du contraire ou qu'une entente comprenant des «salaires décents est conclue.
«C'est absolument navrant», lance Mme Elliot au sujet de l'intervention du gouvernement fédéral.
Même les conservateurs ont condamné la décision du gouvernement.
«Aucun travailleur, qu'il soit sous réglementation fédérale ou non, ne devrait être forcé par le gouvernement à travailler sans être payé. Pourtant, c'est exactement ce qu'on demande aux agents de bord de faire, a souligné le porte-parole du parti en matière de travail, Kyle Seeback. Au lieu de continuer à s'en prendre aux agents de bord en les forçant à reprendre le travail, Carney devrait collaborer avec le Parlement pour faire adopter la Loi sur l’équité pour les agents de bord, qui garantit que les travailleurs sont rémunérés pour le travail qu'ils effectuent avant, pendant et après un vol.»
Un conflit d'intérêt au CCRI, selon le syndicat
La composante d'Air Canada du SCFP a accusé samedi en soirée, le CCRI de se trouver dans une situation de conflit d'intérêt dans la décision concernant la grève des agents de bord.
Le SCFP a affirmé qu'une ancienne avocate d'Air Canada «décidera de la fin des moyens de pression». Le syndicat a déclaré avoir demandé que l'avocate, MaryseTremblay, se retire mais elle aurait refusé.
«Maryse Tremblay a agi en tant que conseillère juridique d’Air Canada tout au long de sa carrière et a été nommé à la présidence du CCRI par le gouvernement de Mark Carney. Il est de plus en plus difficile d'échapper à l'apparence de collusion entre Air Canada et le gouvernement libéral tout au long de ce processus.», a écrit le syndicat.
Il n'a pas été possible d'obtenir des commentaires dans l'immédiat de la part du CCRI concernant l'affirmation faite par le SCFP.



