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Le ministre Dubé défend la loi spéciale sur les médecins à «Tout le monde en parle»

«Comme un gouvernement responsable, il a fallu prendre une décision et dire que c'était ça qu'il fallait faire.»

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Le ministre québécois de la Santé, Christian Dube, répond à l'opposition lors de la période de questions à l'Assemblée législative à Québec, le 23 octobre 2025. Le ministre québécois de la Santé, Christian Dube, répond à l'opposition lors de la période de questions à l'Assemblée législative à Québec, le 23 octobre 2025. (Jacques Boissinot / La Presse Canadienne)

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a défendu dimanche soir la loi spéciale adoptée sous bâillon imposant aux médecins un nouveau mode de rémunération, sur le plateau de l'émission Tout le monde en parle.  

Le ministre a dit s'engager auprès de la population et des médecins «à mieux expliquer le projet de loi» dans les prochains jours. 

D'emblée, en arrivant sur le plateau animé par Guy A. Lepage, M. Dubé a reconnu qu'«il y a effectivement beaucoup de monde qui sont en colère, notamment des médecins». 

«Ça n'a pas très bien commencé cette négociation-là. Il y a des gros mots, des mots pas gentils qui ont été dits des deux côtés. Puis moi, je l'assume qu'on n'a peut-être pas été corrects au début», a affirmé M. Dubé, en ajoutant que cela a teinté le reste des négociations. 

«Comme un gouvernement responsable, il a fallu prendre une décision et dire que c'était ça qu'il fallait faire.»
- Christian Dubé, ministre de la Santé

Il a défendu la loi spéciale en disant qu'il y avait une «urgence d'agir», notamment pour les patients. Le ministre a dit que le fait que les médecins aient cessé d'enseigner aux étudiants a été un «facteur aggravant». 

Questionné par Guy A. Lepage s'il craignait que des médecins insatisfaits se tournent vers le privé, M. Dubé a répondu que la loi prévoit une «méthode» si un tel exode vers le privé se produisait. 

Accueilli par des manifestants à Radio-Canada

M. Dubé a été accueilli par quelques centaines de médecins qui sont venus exprimer leur mécontentement devant la Maison de Radio-Canada, à Montréal. 

Le rassemblement a commencé à 18h30 devant les bureaux montréalais du diffuseur public.

Des manifestants devant la nouvelle maison de Radio-Canada le 26 octobre 2025. Des manifestants devant la nouvelle maison de Radio-Canada le 26 octobre 2025. (Cosmo Santamaria/CTV News )

Sur des images diffusées sur les réseaux sociaux par l'instigateur de l'événement, le mouvement Uni-es pour la Santé, on peut apercevoir des pancartes affichant des messages comme «Non à la médecine fast food» ou encore, «La répression n'est pas la solution». 

Le projet de loi 2 reprend plusieurs grands principes du 106, à commencer par la responsabilité collective des médecins de prendre en charge plus de patients et l'obligation des départements territoriaux de se les répartir.

Il introduit un changement de rémunération pour les médecins pratiquant en première ligne: désormais, ils seraient payés par capitation, à l'acte et selon un tarif horaire.

24 heures après la loi spéciale

La manifestation intervient 24 heures après l'adoption d'une loi spéciale imposant aux médecins un nouveau mode de rémunération et mettant fin à leurs moyens de pression. 

La loi a été adoptée samedi vers 4h du matin. 

En vertu de la nouvelle loi, il sera désormais interdit aux médecins de faire des «actions concertées» qui pourraient nuire à l'accès aux soins et à la formation, sous peine de lourdes pénalités.

Par exemple, trois médecins qui décideraient ensemble de quitter le réseau ou d'arrêter d'enseigner pourraient être durement sanctionnés: jusqu'à 20 000 $ d'amende par jour, mesures disciplinaires, etc. 

Le seul fait d'inciter des médecins à commettre un manquement devient un acte illégal.

En outre, la loi impose aux médecins un nouveau mode de rémunération en partie basé sur l'atteinte d'objectifs de performance. Dans les faits, elle lie 10 % de leur rémunération à des cibles.

Par exemple, les omnipraticiens devront fournir 17,5 millions de rendez-vous chaque année. Les spécialistes, eux, devront réaliser au moins 97 % des chirurgies dans un délai d'au plus 12 mois.

En fin de soirée vendredi, le ministre Dubé a fait adopter un amendement, faisant passer l'âge des médecins qui seront exemptés de 65 ans et plus à 63 ans et plus.

Les médecins plaident depuis le début qu'ils n'ont pas les ressources nécessaires pour atteindre les objectifs que fixe le gouvernement. Le tiers des salles d'opération au Québec sont actuellement fermées, disent-ils.

Ils accusent par ailleurs Québec de vouloir une médecine «fast-food», axée sur le volume. 

«Je pense aux patients, (...) il faut faire les choses différemment, (...) la situation actuelle n'est pas soutenable», a plaidé lors des débats le ministre de la Santé, Christian Dubé.

Furieuse, la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) annonçait déjà vendredi qu'elle contesterait la loi devant les tribunaux.

M. Dubé a invité les médecins à laisser retomber la poussière et considérer l'ensemble de la nouvelle loi, qui comprend 214 articles, avant de prendre des décisions.

Il s'agit du huitième bâillon du gouvernement Legault depuis son arrivée au pouvoir, en 2018. 

Avec des informations de La Presse canadienne