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Durant leur visite, les ministres prévoient rencontrer «des intervenants clés de la sphère politique et de l’industrie».
Le gouvernement du Canada a envoyé mardi deux de ses ministres à Washington pour plaider, auprès des Américains, en faveur d'un renforcement du partenariat avec eux en matière de défense.
Le séjour, qui s'échelonne sur trois jours, survient dans le contexte où le président des États-Unis, Donald Trump, en a récemment rajouté une couche en exprimant clairement sa frustration quant aux investissements, selon lui insuffisants, de plusieurs pays membres de l'OTAN, comme le Canada.
Le locataire de la Maison-Blanche, qui menace d'imposer des tarifs de 25 % sur les importations canadiennes à compter de mars, s’est souvent montré irrité par la cible manquée de 2 % du PIB pour les dépenses militaires. Il a ajouté, le mois dernier, que ce 2 % devrait passer à 5 %.
Le ministre canadien de la Défense, Bill Blair, doit rencontrer à Washington «des intervenants clés de la sphère politique et de l’industrie», et ce, en compagnie de son collègue François-Philippe Champagne, peut-on lire dans un avis aux médias.
M. Blair et le ministre de l'Industrie prévoient aussi aborder d'autres «sujets d’importance commune» que «le partenariat de longue date en matière de défense entre le Canada et les États-Unis».
Depuis Montréal, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a réitéré, comme le fait M. Blair depuis novembre, que le Canada, qui a promis d'atteindre le fameux 2 % d'ici 2032, s'affaire à accélérer le pas.
«Je pense qu’il va falloir dépenser plus en défense et beaucoup plus vite. Donc, ça, on le sait et ce n’est pas juste parce que Donald Trump en parle», a dit Mme Joly au cours d'une discussion devant public organisée par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
Au Canada, en 2024-2025, les dépenses militaires atteignent 1,35 % du PIB, selon une analyse du Directeur parlementaire du budget.
Mme Joly a soutenu, durant l'échange animé par le chef de la direction de la Chambre de commerce, Michel Leblanc, qu'Ottawa est déterminé à accroître ses dépenses en défense en raison de «tensions géopolitiques qu'on n'a pas vues depuis la Deuxième Guerre mondiale».
Elle a souligné que, depuis qu'elle est ministre des Affaires étrangères, le Canada a dû répondre à la guerre en Ukraine et à celle au Proche-Orient, en plus de composer avec le retour à la Maison-Blanche de M. Trump.
«Ça veut dire que le gouvernement fédéral, on va faire des investissements historiques en défense pour, bien entendu, dans le sud du pays, mais aussi, fondamentalement, dans le Nord, dans l'Arctique», a-t-elle résumé en revenant sur les engagements déjà pris par Ottawa.
Les ministres Blair et Champagne débutaient leurs rencontres communes mardi en fin d'après-midi, a-t-on fait savoir au bureau du ministre de l'Industrie. Tous deux devaient alors s'entretenir avec Matt Blunt, ancien gouverneur du Missouri et président du Conseil américain de la politique automobile.
Au cours des prochains jours, ils doivent rencontrer des sénateurs américains, de même que des représentants de quatre entreprises, dont le géant de l'aéronautique Boeing et la société spécialisée en technologies de défense Raytheon.
Le ministre de l'Énergie, Jonathan Wilkinson, se trouvait aussi à Washington mardi et il a prononcé un discours devant le groupe Atlantic Council. Il a fait un plaidoyer pour une «conversation positive» centrée sur l'idée d'une «alliance canado-américaine en matière d'énergie et de minéraux».
Le décret signé samedi par M. Trump prévoit des tarifs douaniers de 25 % sur les importations canadiennes sauf pour l'énergie, où la surtaxe est fixée à 10 %. Les tarifs devaient entrer en vigueur mardi, mais Washington a accordé un sursis de 30 jours à Ottawa.
«Une telle alliance permettrait aux États-Unis et au Canada d'atteindre notre vision commune pour des factures d'énergie plus abordables aux familles, (...), pour que l'Amérique du Nord soit le fournisseur d'énergie dominant dans le monde.»
Le ministre a, en guise de contraste, soutenu qu'une discussion portant sur la menace de tarifs douaniers est «perdante-perdante» («lose-lose»), adaptant l'expression anglaise «win-win».
Ottawa et Washington ont déjà un Plan d’action conjoint Canada–États-Unis sur les minéraux critiques. Annoncé en janvier 2020, son «objectif est de promouvoir l’intérêt bilatéral pour la sécurisation des chaînes d’approvisionnement des minéraux critiques nécessaires aux secteurs manufacturiers stratégiques, y compris les technologies des communications, l’aérospatiale et la défense ainsi que les technologies propres», peut-on lire sur une page web du gouvernement canadien.
Or, le ministre Wilkinson a insisté mardi sur certains minéraux, comme la potasse, qui ne sont pas identifiés comme étant «critiques» puisqu'ils n'entrent pas dans la fabrication des véhicules électriques. La potasse est plutôt une composante importante des engrais utilisés en agriculture.
«Le Canada est le plus grand fournisseur de potasse des États-Unis, répondant à la demande des fermiers pour leur recours aux fertilisants, ce qui signifie des aliments abordables, a-t-il dit. Cela permet aussi aux États-Unis d'éviter d'acheter de la potasse (...) de pays non fiables, comme la Russie et la Biélorussie.»
En termes de sources d'énergie, il n'a pas manqué de mentionner que le pétrole canadien est vendu aux Américains à bas prix et que l'électricité qui leur est acheminée aide au chauffage de nombreuses résidences.
L'Alliance nord-américaine proposée par M. Wilkinson mardi aurait une place, à part entière, pour le Mexique, a laissé entendre le ministre.
Questionné par un animateur devant public, il a soutenu que le partenaire dans l'accord de libre-échange connu sous son ancien acronyme ALENA est «choyé par des ressources similaires aux États-Unis et au Canada». Il a donné en exemple «beaucoup de pétrole» et une «capacité à aller chercher du gaz».
Comme pour les ministres Blair et Champagne, M. Wilkinson devrait rester à Washington jusqu'à jeudi.
- Avec des informations de Pierre Saint-Arnaud, à Montréal