Financé par le Québec et Ottawa, le fabricant de batteries pour les avions des écoles de pilotage H55 assure qu’il adopte une approche prudente pour éviter une répétition des récents revers de la filière batterie.
L’entreprise suisse évite de voir trop grand, trop vite, a expliqué son PDG, Martin Larose, en entrevue, jeudi, en marge de l’inauguration de sa nouvelle usine à Longueuil.
La stratégie est d’y aller «étape par étape» et d’être «très conscient des risques», a-t-il souligné. «On est encore relativement petit. On fait très attention à notre croissance. On veut garder ça d’une manière contrôlée.»
H55 a déjà des clients pour son usine située sur le site de l’Aéroport de Saint-Hubert. Elle développe un avion expérimental avec Pratt & Whitney, qui nécessite «une grosse quantité de batteries». Le spécialiste des stimulateurs de vol CAE, pour sa part, prévoit modifier 80 avions Piper avec l’aide de l’entreprise.
H55 a obtenu 20 millions $ de financement public. Le fédéral a accordé un prêt de 10 millions $, tandis que Québec a pris une participation en actions de 10 millions $. La valeur totale du projet est d’entre «30 à 40 millions $», a dit M. Larose.
Le projet n’aurait pu voir le jour sans l’appui des gouvernements, a-t-il affirmé. «Évidemment, la demande des clients nous a influencés, mais on ne serait pas ici si on n'avait pas eu le support du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial et du gouvernement de la ville de Longueuil.»
Le gouvernement Legault veut attirer des entreprises qui innovent dans le secteur de l’aviation, a expliqué la ministre de l’Économie, Christine Fréchette, en mêlée de presse. «H55 est en avant de la parade, je vous dirais, en matière d'électrification de l’aviation.»
L’entreprise compte une vingtaine d’employés sur son site québécois, mais elle pourrait faire d’autres embauches, selon le nombre de commandes réalisées, a dit M. Larose.
H55 a terminé une récente tournée promotionnelle aux États-Unis. Les perspectives sont-elles plus sombres au moment où l’administration Trump met des bâtons dans les roues aux énergies renouvelables et à l’électrification des transports?
L’industrie de l’électrification des transports «ne peut plus seulement se baser sur les plans de réduction du carbone» pour prospérer, a répondu le dirigeant.
«On doit offrir une solution à nos clients qui est avantageuse pour d'autres raisons, a-t-il ajouté. Avantageuse économiquement et avantageuses pour l'expérience de vol, dans notre cas.»
Pour une école de vol, un avion électrique propulsé par H55 peut coûter 500 000 $ US, comparativement à 375 000 $ US pour un appareil à combustion. L’école de pilotage rentabilisera toutefois sa mise sur cinq ans, grâce aux économies de carburant et d’entretien, a avancé M. Larose.
La défense et les vols régionaux
H55 pourrait un jour propulser d’autres avions que ceux destinés à la formation, mais le vol Montréal-Paris est encore lointain, a précisé M. Larose. «Je ne crois pas voir ça de mon vivant.»
Il serait toutefois possible de prendre un jour un vol régional à bord d’un appareil hydride, comme les voitures hybrides qui circulent sur nos routes.
L’appareil hybride pourrait d’ailleurs être intéressant pour le secteur de la défense, a mentionné le cofondateur de l’entreprise, André Borschberg. L’entrepreneur est connu pour avoir effectué le plus long vol sans ravitaillement sur un avion alimenté à l’énergie solaire.
Dans le secteur de la défense, un avion hybride pourrait parcourir de longue distance avec son moteur à combustion, mais passer à l’électricité pour le moment où il doit être silencieux pour ne pas être détecté. «Le nombre de projets potentiels qu'on peut faire avec ces technologies est énorme», a-t-il précisé.

