Trois citoyennes et le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) qui contestaient des modifications réglementaires ayant eu pour effet d’écarter la tenue d’un BAPE pour le projet d'usine de Northvolt, en Montérégie, pourront se faire entendre sur le fond, selon un jugement rendu jeudi par la Cour supérieure du Québec.
Les citoyennes et le CQDE avaient interpellé les tribunaux pour contester les changements réglementaires apportés par le gouvernement Legault avant l’annonce du projet de Northvolt.
Le Règlement relatif à l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement de certains projets avaient en effet été modifiés en juillet 2023 par Québec, ce qui avait permis à la première phase du projet Northvolt d’échapper à un examen du BAPE.
Avant juillet 2023, le règlement stipulait que les usines d’assemblage de batteries «dont la capacité maximale annuelle de production serait égale ou supérieur à 30 GWh» soient soumises à la procédure du BAPE.
Or, le gouvernement avait retiré les références à un seuil de production annuelle dans une version modifiée du paragraphe 39 du règlement sur l’évaluation des impacts sur l’environnement de divers projets.
De plus, ce règlement avait été modifié de façon à éviter une évaluation du BAPE aux usines de batteries qui produisent 60 000 tonnes métriques ou moins.
Or, la capacité de production prévue de l’usine Northvolt serait de 56 000 tonnes métriques.
«Le jugement qui est rendu aujourd’hui confirme que nous pourrons aller jusqu'au fond de cette question importante de la modification du règlement», a commenté Marc Bishai, avocat pour le CQDE, après le jugement.
Le CQDE et les demanderesses allèguent que ces changements aux règlements s’inscrivaient dans «un contexte d’investissements massifs du gouvernement dans Norhtvolt, créant un conflit d’intérêts apparent».
Ils allèguent également que ces changements ont été faits «pour accommoder Northvolt», qu’ils ont été «précédés de déclarations publiques favorables au projet» et que les modifications ont fait «l’objet de pressions politiques internes sur les fonctionnaires».
Le CQDE et les trois citoyennes pourront faire valoir ces arguments dans une audience sur le fond, en 2026 ou en 2027, selon le CQDE.
«Nous sommes soulagés, cette partie importante du dossier dépasse le projet Northvolt. Ce qui est en jeu, c’est le rôle du gouvernement du Québec et du ministère de l’Environnement dans le respect et l’application de nos lois et réglementations», a écrit Geneviève Paul, directrice générale du CQDE, après le jugement.
«Nous souhaitons que les tribunaux clarifient ce que nos décideurs doivent faire ou non, pour que les règles soient bien comprises dans toutes les situations similaires à l’avenir. C’est d’autant plus important dans un contexte de reculs en matière de participation du public aux décisions environnementales», a-t-elle ajouté.

