À son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump avait promis de mettre fin aux guerres dans le monde et de placer « l’Amérique d’abord ». Mais l’offensive jeudi d’Israël contre l’Iran a exposé au grand jour les lignes de faille au sein du mouvement « MAGA » du président républicain.
Quand le chef républicain de la Chambre des représentants, Mike Johnson, soutient qu’Israël, proche allié des États-Unis, était « clairement dans son bon droit » de mener ces frappes contre l’Iran, l’élue trumpiste Marjorie Taylor Greene décide d’aller à contre-courant en déclarant vendredi « prier pour la paix ».

La veille, avant les frappes, elle avait déjà exprimé son opposition à toute implication américaine.
« Tout ceux que je connais sont las des interventions des États-Unis et des changements de régime dans les pays étrangers », écrivait-elle sur X.
Leurs positions respectives sont emblématiques du fossé en matière de politique étrangère qui sépare des néoconservateurs, avides d’un interventionnisme américain sur la scène internationale, des figures « MAGA », bien plus isolationnistes.
« C’est une question épineuse pour Trump, qui s’est engagé de longue date à mettre fin aux "guerres éternelles" » des États-Unis, explique Larry Sabato, professeur de sciences politiques à l’université de Virginie.
« La base "l’Amérique d’abord" de Trump est divisée, avec une souche forte d’isolationnisme », souligne-t-il auprès de l’AFP, tandis que les « républicains de l’establishment » - qui prônent une politique étrangère proactive - « n’exercent plus autant d’influence qu’avant ».
« Schisme »
Quelques heures avant les frappes sur l’Iran, l’influenceur conservateur Charlie Kirk avait affirmé qu’« aucune question actuellement ne divise davantage la droite que la politique étrangère ».
« Je suis très inquiet, sur la base de ce que j’ai vu sur le terrain ces derniers mois, que cela provoquera un schisme massif dans le mouvement MAGA », avait-il ajouté.
Dans un sondage sur son compte X peu après l’annonce de l’opération israélienne, Charlie Kirk a demandé à ses 5 millions d’abonnés: « Les États-Unis devraient-ils être impliqués dans la guerre d’Israël contre l’Iran? ».
La réponse des plus de 350 000 votants est sans appel: 89 % s’y disent opposés.
Ancien conseiller de Donald Trump lors de son premier mandat, Steve Bannon a notamment dénoncé sur Fox News ceux qui « sautillent de joie actuellement » devant les frappes israéliennes. L’idéologue d’extrême droite a appelé à se souvenir des erreurs qui ont mené à la guerre en Irak en 2003, lorsque l’« on nous a menti » a-t-il dit.
Pour Tucker Carlson, ex-présentateur de Fox News, « Trump a fait campagne pour la présidentielle en tant que candidat de la paix », ce qui explique sa victoire.
« Une guerre avec l’Iran représenterait une profonde trahison de ses partisans », avait lancé la semaine dernière ce conservateur réputé proche des positions du Kremlin, avertissant qu’un tel conflit pourrait « très facilement devenir une guerre mondiale ».
Évangélistes
Mais leur sentiment ne fait pas écho à celui d’autres figures médiatiques de la droite américaine comme Mark Levin. Selon Politico, cet animateur de radio aurait fait du lobbying la semaine dernière auprès de Donald Trump à la Maison Blanche, pour presser le président américain de laisser Israël frapper l’Iran.
Le mouvement chrétien évangéliste, dont le soutien à Donald Trump en 2016 fut l’une des raisons majeures de sa victoire, est également un fervent soutien d’Israël tandis que de nombreux élus « MAGA » au Congrès sont davantage interventionnistes plutôt qu’isolationnistes, tel Andy Harris.
« Israël le droit de se défendre (…). Que Dieu bénisse notre allié », a déclaré ce chef du groupe parlementaire House Freedom Caucus, dont les membres se considèrent pour beaucoup comme des trumpistes de la première heure.
Face à ces divisions affichées au grand jour dans son camp, il reste à voir quelle ligne Donald Trump écoutera davantage.
Alors qu’il avait exhorté Israël à ne pas mener d’opérations contre l’Iran quelques heures avant les frappes de jeudi soir, pour laisser sa chance à la diplomatie, le président américain les a finalement qualifiées d’« excellentes » dans une interview vendredi à la chaîne ABC News.
Le républicain de 78 ans a également enjoint à l’Iran de « conclure un accord avant qu’il ne reste plus rien », et prévenu que les « prochaines attaques » seraient « encore plus brutales».