Les trois présumés passeurs interceptés à Stanstead la fin de semaine dernière resteront finalement rester derrière les barreaux au moins jusqu'au 28 août. Le dossier des trois hommes turcs a été repoussé, mercredi matin, au palais de justice de Sherbrooke. Ogulcan Mercin, Dogan Alakus et Firat Yukset sont accusés d’avoir traversé la frontière avec 44 ressortissants étrangers.
Les trois accusés ont comparu côte à côte par visioconférence avec l’aide d’un interprète.
La procureure de la Couronne, Annabelle Racine, s’est opposée à leur remise en liberté en argumentant que leur détention était nécessaire pour assurer leur présence en cour, pour préserver la protection des témoins et empêcher la récidive, et finalement pour assurer la confiance du public envers l’administration de la justice.
À la défense, Me Jonathan Poirier de l’aide juridique, est entré en contact avec les accusés pour la première fois lors de cette même comparution en raison des difficultés de communications liées à la langue.
«Je devrai prendre contact avec mes clients pour trouver le plan le plus raisonnable pour leur remise en liberté.»
Dans la nuit de samedi à dimanche, la GRC et la SQ ont intercepté un camion cube sur le chemin Haskell près de Stanstead. Après avoir ouvert les portes, les agents ont découvert 44 migrants, dont des enfants, qui étaient entassés dans le camion sans ventilation. Plusieurs d'entre eux étaient déshydratés.
Les trois Turcs seront de retour en cour le 28 août prochain.
Interdit d'entrer en contact avec «Tolda»
La juge Hélène Fabi a indiqué aux trois détenus qu'il leur était interdit d’entrer en contact, directement ou indirectement, avec une personne nommée Tolda.
S’ils contactent cet individu, a prévenu la juge, d’autres accusations seront portées.
Dogan Alakus a alors expliqué à la juge Fabi que la personne nommée Tolda était présente à bord du véhicule lors de l’arrestation des trois suspects.
Me Poirier a alors conseillé aux suspects «de ne pas parler», car ce qu’ils racontaient «pourrait être utilisé contre eux».
Lors de leur comparution mercredi matin, les trois hommes semblaient épuisés et baissaient souvent la tête. Deux étaient vêtus d’un t-shirt noir alors que le troisième, Ogulcan Mersin, portait une simple camisole.
En s’adressant à la juge au nom des trois accusés, Firat Yuksek a expliqué qu’il était «extrêmement frustrant» pour eux de ne pas avoir communiqué avec leurs familles depuis le moment où ils ont été arrêtés.
«Nos familles ne savent pas où nous sommes», a-t-il indiqué.
Les accusés ont ensuite expliqué qu’ils ne connaissaient pas les numéros de téléphone de leurs proches, et que ceux-ci étaient dans leurs téléphones, qui, eux, ont été confisqués par l’ASFC.
Des conditions «horribles»
Ogulcan Mersin, Dogan Alakus et Firat Yuksek ont été accusés d'avoir incité, aidé ou encouragé quelqu'un à commettre une infraction à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, ainsi que d'avoir aidé des personnes à entrer au Canada en dehors d'un bureau de douane désigné.
Le porte-parole de la GRC, Charles Poirier, a expliqué, lundi, que la police avait intercepté une fourgonnette vers 2 h 20 dimanche matin, après avoir reçu des informations concernant un groupe de migrants qui prévoyaient traverser la frontière en provenance des États-Unis.
Il a précisé que, parmi les migrants, figuraient une femme enceinte et des enfants d'à peine 4 ans.
Ils étaient déshydratés, «visiblement désemparés» et à l'étroit lorsque la police les a trouvés, a-t-il ajouté.
«Ils manquaient d'air, personne n'avait d'eau, et avec les enfants et l'espace restreint, ils ne pouvaient pas s'asseoir par terre, ils devaient se tenir debout», a-t-il expliqué lundi lors d'un entretien téléphonique. «Ils ont été laissés dans des conditions tout simplement horribles, vraiment.»
La grande majorité des passagers du camion étaient des ressortissants haïtiens, a-t-il précisé, ajoutant qu'ils avaient déclaré aux agents avoir traversé la frontière à pied. Le groupe a marché pendant deux heures avant que le camion ne les récupère.
Malgré les mauvaises conditions et la déshydratation, M. Poirier a confirmé qu'aucun des migrants ne semblait en danger immédiat.
L'ASFC a indiqué que la plupart des ressortissants étrangers ont été transférés au centre de traitement des réfugiés à Saint-Bernard-de-Lacolle, où ils sont soumis à des contrôles d'immigration.
L'agence n'a pas précisé ce qu'il est advenu des autres ressortissants étrangers, invoquant des raisons de confidentialité.
- Avec des informations de Morgan Lowrie et de Stéphane Blais
