C’est ce que j’avais écrit dans le magazine Châtelaine, jadis naguère. Je pense qu’avec la chronique «La garde partagée, c’est le meilleur des deux mondes», c’est la fois où j’ai reçu le plus de commentaires haineux.
La parentalité est une vache sacrée. Tu n’as pas le droit de dire qu’être parent, ce n’est pas toujours la plus belle affaire au monde. C’est interdit aussi de penser qu’être mère, ce n’est pas la chose qui te fait sentir la plus accomplie dans ton existence et que, parfois, tu as besoin d’une pause.
Oh, il y a bien eu le courant «mère indigne». Grand bien nous en fasse. On avait vraiment besoin d’entendre qu’être mère, c’était souvent fatigant, parfois irritant et franchement pas facile tous les jours. Sauf qu’après, c’est comme si on était tombé dans une spirale infinie de parents à boutte qui calent du vin sur Instagram.
Voyez le récapitulatif de Geneviève Pettersen au bulletin Noovo Le Fil 17 dans la vidéo qui accompagne ce texte.
À boutte, mais pas tout le temps
Moi, je revendique le droit d’être une mère moyenne, c’est-à-dire que je m’autorise à dire que, parfois, je suis au bout du rouleau pis que je n’en peux plus de répondre aux trente millions de demandes par jour. Par contre, je réclame aussi le droit d’affirmer haut et fort qu’être mère, c’est la plus belle chose qui me soit arrivée parce que ça me force à devenir une meilleure humaine. LES DEUX SENTIMENTS PEUVENT COHABITER.
Tout n’est pas noir au royaume des papas et des mamans, mes poussinots. Ce qui m’amène au sujet explosif des vacances. Levez la main ceux qui ont hâte de partir en vacances en famille, mais qui ont peur en même temps. Je vais lever la mienne, ça va vous aider à assumer, peut-être.
Ça fait des semaines que je rêve aux feux de camp, aux histoires de peur, à la baignade, à la plage, aux parties de chromino et aux festins partagés sous les étoiles. Ça fait des semaines, aussi, que j’anticipe les chicanes, l’impression qu’ils ne sont jamais contents, la bataille pour leur faire lâcher leurs écrans, l’épuisement et l’impression d’être plus fatiguée après mes vacances qu’après. C’est pour ça que je dis que, dans un monde idéal, ça prendrait quelques jours, une zone tampon, après les vacances avec les enfants pour que les parents puissent recharger leurs batteries eux aussi.
Je réfléchis, pis je comprends pourquoi ma mère pis mon père m’envoyaient en colonie de vacances quand j’étais petite. C’était pour avoir du temps à eux après en avoir passé avec moi. Je ne le prenais pas mal, je ne me sentais pas délaissée pour deux cennes. Je profitais aussi de ce temps à moi en dehors de la bulle familiale. Même chose quand j’allais passer quelques jours chez mes grands-parents.
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On se met trop de pression
Est-ce que les stories Instagram de familles heureuses au chalet ou toute la mythologie collective déployée autour des vacances d’été contribuent à exercer une pression indue sur les parents ? Je pense que oui. On n’a pas besoin de passer des vacances «parfaites» pour qu’elles soient mémorables. On n’a pas besoin de parcourir 1200 km en campeur sinon ça va être plate. Je veux dire, faites-le si ça vous rend heureux, mais ne le faites pas si vous accomplissez ça seulement parce que vous avez l’impression d’être «obligés».
Je n’ai jamais cru à ça, moi, le temps de qualité. J’ai toujours dit que c’était une façon pour les gens peu présents de se dédouaner : «je ne suis pas souvent là, mais quand je suis là check comment je suis là.» Non, les humains ont besoin de temps de quantité. C’est surtout vrai pour les enfants.
Ils se rappelleront peu des moments supposément extraordinaires. Ils vont se souvenir de tous les petits moments «sans importance» du quotidien où vous avez été là. Pour aller à l’épicerie, à la crémerie, pour se brosser les dents ou magasiner des souliers d’eau. Ils vont se souvenir des pique-niques au parc et de la fois où on a fait du vélo sur la piste cyclable près de la maison. Oh, ils vont se souvenir du voyage à Disney aussi, mais ce souvenir ne prendra pas plus de place dans leur tête que ce que je viens d’énumérer.
Moi je dis arrêtons de vouloir fiter dans des cases. Passons les vacances dont nous avons envie. Et si on ressent le besoin de passer un peu de temps sans enfant, ben ce sera ça. Personne ne sera un moins bon parent pour cette raison. Prendre une pause «de sa famille», ce n’est pas la fin du monde, surtout si c’est pour revenir plus fort.
Je le répète, et je me le répète par la même occasion : c’est OK d’être un parent «moyen». Pas moyen dans le sens de moyennement adéquat. Non, moyen dans le sens de c’est OK certain jour d’adorer son rôle et d’autres, d’avoir envie de prendre l’air. Ça aide à être un meilleur parent le reste de l’année.
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