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Difficultés d'apprentissage, anxiété, présence des écrans... Est-ce que nos enfants vont si mal que ça et est-ce que c’est notre faute? À ça, j’ai envie de répondre oui et non.
Et est-ce qu’ils vont si mal que ça?
Ces deux questions, je me les suis posées souvent, et plus encore suite à la lecture de l’excellent texte de Marie-Ève Fournier (Qu’est-ce qui cloche avec nos enfants?) publié dimanche dans La Presse. Si vous ne l’avez pas lu, je vous suggère d’y faire un détour avant de lire cette chronique.
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Voyez le passage de Geneviève Pettersen au bulletin Noovo Le FIl 17 dans la vidéo qui accompagne ce texte.
C’est indéniable, selon plusieurs experts et travailleurs de l’éducation, il semble y avoir plus d’enjeux qu’avant en ce qui concerne les difficultés d’apprentissage des enfants et leur niveau d’anxiété.
À chaque fois que j’entends ça, je me demande si ce n’est pas plutôt parce qu’on possède maintenant des outils et des paramètres pour expliquer ce qu’on choisissait simplement d’ignorer auparavant.
Dans les classes de mon enfance, il y avait deux ou trois enfants qualifiés de «tannants». On ne parlait pas de TDAH, de TSA, de dysorthographie, etc. Je trouve donc que c’est une assez bonne nouvelle qu’on ait des mots pour décrire les singularités des enfants et qu’on dispose, en théorie, d’outils pour les aider à passer au travers de leur cursus scolaire.
Je dis «en théorie» parce qu’en pratique, ce n’est pas ça qui se passe. Il n’y a pas de ressource en quantité suffisante et cela participe à la détresse des petits et du personnel enseignant. Mais ce n’est pas le sujet de cette chronique. Le sujet, c’est «est-ce que les enfants vont si mal?» qu’on le dit.
Il est beaucoup question d’anxiété et d’agressivité dans le dossier de Marie-Ève Fournier. Le parallèle qui est fait entre les écrans et le mal-être des enfants est aussi particulièrement éclairant.
L’idée ici n’est pas de démoniser les écrans. Non. Il y a des centaines de choses positives à tirer de la technologie. Mais force est d’admettre que beaucoup d’enfants et d’adultes passent beaucoup trop de temps scotchés à leur téléphone, leur ordi ou leur iPad. J’en suis.
J’ai partagé le texte de madame Fournier sur les médias sociaux. J’ai reçu plusieurs commentaires assez agressifs (ça doit être la faute aux écrans), mais une chose frappe: beaucoup de personnes sont persuadées que c’est la faute des parents si les enfants passent autant de temps devant des écrans ou expérimentent de l’anxiété de façon anormale. Selon eux, on aurait créé un climat anxiogène.
Je suis à moitié d’accord. Je suis un peu tannée qu’on pellette la dépendance aux écrans sur le dos des parents, comme je suis épuisée qu’on accuse le citoyen de ne pas assez faire d’effort pour protéger l’environnement.
Je fais ce parallèle pour illustrer qu’il y a dans ces deux réalités quelque chose qui nous dépasse. Comment faire mieux quand de grandes corporations et des intérêts politiques rament dans le sens contraire de ce qu’il faudrait faire pour solutionner un problème?
Il y a des limites à mes actions, comme mère et comme citoyenne. Faut garder ça en tête si on ne veut pas que la culpabilité nous ronge par en dedans.
Là, je ne suis pas en train de dire qu’on doit se déresponsabiliser complètement. Si ton enfant passe huit heures par jour à jouer à Fortnite ou à faire défiler des vidéos sur TikTok, ça se peut que tu aies ton rôle à jouer là-dedans. Mais, je ne pense pas que les parents sont les seuls coupables.
Ces machines et ces jeux sont faits pour créer une dépendance. Ce que les compagnies qui les développent monétisent, c’est le temps qu’on passe à fixer la lumière bleue. Et ils sont bons, vraiment bons, puisqu’on envisage désormais difficilement notre existence sans téléphone.
Ça serait plaisant que les parents arrêtent de se taper sur la tête. Oui, c’est facile de démissionner, parfois, et d’abandonner les enfants à leurs machines du diable. Et il serait avantageux de prendre conscience qu’on devrait passer plus de temps AVEC nos enfants. Mais le problème est, à mon sens, beaucoup plus compliqué que ça. C’est quelque chose qui nous dépasse.
C’est facile de dire «dans mon temps, on jouait dehors et les rues étaient pleines de monde». C’est parce que dans ton temps, mon minou, il n’y en avait pas d’écran. L’existence ne rivalisait avec rien.
Aussi, la pensée alarmiste selon laquelle les enfants ne vont plus à l’extérieur n’aide en rien à l’affaire. Je ne sais pas pour vous, mais moi, des enfants qui jouent dehors à longueur de journée, il y en a plein ma rue et plein les parcs près de chez moi. Alors, calmons-nous la dramatisation et le «c’était mieux dans le bon vieux temps».
L’anxiété, astheure. On va jouer à un jeu. Imaginez-vous à 10 ans. Imaginez comment vous vous sentiriez si on vous avait retiré de l’école à cause d’un virus ultra contagieux et que le monde au complet s’était arrêté pendant des mois à cause d’une pandémie.
Comment vous vous sentiriez si, à chaque fois que vous alliez sur Internet ou écoutiez les nouvelles, on parlait de la guerre et de la crise climatique ? Je veux être bien claire, je suis absolument persuadée que nous, les médias, devons parler de ces réalités. C’est notre travail et notre devoir d’informer la population.
Je dis juste que le climat dans lequel on évolue en ce moment est anxiogène en soi. On ne peut pas mettre les enfants dans du papier bulle et les préserver contre la réalité. Ça ne se peut juste pas. Alors, oui, ils sont peut-être plus anxieux à cause de ça? Qui ne le serait pas?
Après, c’est à nous, les parents, de discuter de tout ça avec eux et de décortiquer comment ils se sentent par rapport à tous ces événements. J’ai envie de dire, aussi, que notre façon de gérer notre propre anxiété aura un impact sur l’anxiété de nos enfants. Mais pas que. Encore une fois, il y a des facteurs extérieurs sur lesquels on n’a aucun contrôle.
Je reviens à mes deux questions de départs: est-ce que nos enfants vont si mal que ça et est-ce que c’est notre faute? À ça, j’ai envie de répondre oui et non.
Quelquefois, je me demande si à force de leur dire qu’ils sont ci ou ça, on n’amplifie pas le problème. Je me demande si on n’est pas en train de rendre «anormaux» des sentiments tout à fait «normaux» dans le contexte où on est.
Je ne suis pas une scientifique. J’observe seulement ce qui se passe autour de moi. Pis j’essaie de réfléchir à tout ça comme vous le faites assurément. Je ne détiens pas la vérité. Mais je suis intimement persuadée qu’on devrait se slaquer un tour.
Parce qu’à force de se dire que ça va mal tout le temps, c’est sûr qu’on finit par y croire.
Pour me raconter une histoire ou si vous voulez témoigner de quelque chose qui vous tient à cœur, écrivez-moi un courriel: genevieve.pettersen@bellmedia.ca