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«Les agents de stationnements sont constamment victimes de voie de fait de la part des citoyens. On parle ici de gens qui vont aller jusqu’à les taper au visage, les pousser, leur donner des coups de poing ou leur cracher dessus.»
Ça commence en face de chez moi. Comme trop souvent, je dois appeler des agents de stationnement parce que des voitures bloquent mon entrée. Ce n’est pas mêlant, c’est rendu que la madame qui travaille le samedi connaît mon prénom.
Elle arrive donc chez nous. La dame qui donne des contraventions, je parle. Quand un citoyen appelle pour faire une plainte, il doit aller à la rencontre de l’agent qui se présente pour valider son adresse et confirmer le motif de la plainte. C’est ce que je fais. Chaque fois.
Et chaque fois, je dois décider si je veux que l’agent donne un ticket ou si on fait remorquer le véhicule du contrevenant. Je trouve ça chien, faire remorquer quelqu’un, alors je choisis toujours la contravention. C’est «dull», mais c’est moins «dull».
La majorité du temps, la personne en faute, lorsqu’elle voit l’agente de stationnement lui coller une contravention, sort soudainement de «sa cachette», les bras en l’air, pour l’insulter copieusement et dire que ce n’est pas juste.
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Habituellement, un chapelet de sacres est prononcé et on se fait traiter de tous les noms. Trop souvent, le ton monte. Même que souvent, j’ai eu peur pour l’intégrité physique de l’agente et la mienne. Ça fait que maintenant, j’ai peur d’appeler. Les insultes, les menaces et la peur des représailles m’ont rendue très nerveuse.
La dernière fois que l’agente s’est présentée à mon adresse, je lui ai demandé si ça lui arrivait d’appeler la police. «Bien sûr. Mais souvent, c’est long avant qu’une patrouille se libère.» J’ai souhaité savoir ce qu’elle faisait dans ce temps-là. «Mon gros possible.»
J’ai joint Sylvain Sauvageau, directeur Surveillance, contrôle du stationnement et de la mobilité, pour parler de la violence verbale et physique dont semble être victimes les agents de stationnement dans l’exécution de leurs fonctions.
Ça fait 30 ans que M. Sauvageau travaille à l’agence de mobilité durable. Il a été agent de stationnement pendant 16 ans. Il connaît donc bien le terrain et est bien placé pour me parler des incidents qui touchent son monde.
Il commence par me dire qu’il est bien au courant qu’avoir un billet de stationnement n’est pas une expérience agréable, mais que la présence des agents est utile pour la sécurité et la fluidité des transports dans une ville.
J’ai obtenu des chiffres concernant les incidents violents qui touchent les agents de stationnement. De 2021 à aujourd’hui, il y a eu 51 incidents. Ça va des voies de fait à l’intimidation en passant par des entraves au travail de l’agent ou à des menaces.
Il faut savoir qu’il y a actuellement 259 agents de stationnements en fonction, dont 80 se sont ajoutés en 2022 pour assurer une surveillance plus optimale des voies cyclables, voies réservées, places à mobilité réduite sur rue tarifées et autres interdictions de stationnement.
L’agence de mobilité répertorie quatre accidents de travail pour 2022 et 2023 en lien avec une agression physique perpétrée par un citoyen. Sylvain Sauvageau me spécifie qu’il n’y a pas plus de violence qu’avant.
Les agents de stationnements sont constamment victime de voie de fait de la part des citoyens. On parle ici de gens qui vont aller jusqu’à les taper au visage, les pousser, leur donner des coups de poing ou leur cracher dessus.
Selon Sylvain Sauvageau, la progression des incidents est «stable», mais reste que la situation demeure préoccupante. Tellement préoccupante, que l’on consacre désormais une journée complète de formation sur la discussion et la façon de négocier avec une clientèle difficile.
Une journée complète sur les cinq jours que dure la formation pour devenir agent de stationnement: ça vous donne une idée de l’ampleur du problème.
Mais qu’est-ce qu’est censé faire un agent, justement, quand les tactiques apprises pendant sa formation ne fonctionnent pas et qu’il craint pour sa sécurité?
«Il ne faut pas se mettre à risque. On leur suggère de se placer en sécurité dans leur véhicule et de barrer les portes. On peut envoyer le constat par la poste et par huissier. Parfois oui, on appelle les policiers», m’explique M. Sauvageau.
Il se souvient d’ailleurs d’une expérience assez éprouvante du temps où il était lui-même agent de stationnement. «À mes tout débuts, je vais toujours m’en souvenir, c’était près du Complexe Desjardins, j’émettais un constat dans l’arrêt interdit à l’heure de pointe.
Le contrevenant arrive. Il n’était pas content. Il a commencé à m’insulter copieusement. À la suite de ça, il a embarqué dans son véhicule et a foncé sur moi. J’ai juste eu le temps de me projeter sur le côté. Malheureusement, il a quand même passé sur mes pieds avec sa voiture. J’ai été chanceux, dans ce temps-là, l’uniforme incluait des souliers à capes d’acier.»
Il me raconte ça, et ça me fait penser à une extension de ce qui pourrait être considéré comme un épisode de rage au volant.
Sylvain Sauvageau souligne au passage que le geste commis par le citoyen a été considéré comme une agression armée.
Oui, pour un constat qui s’élevait à l’époque à environ 80$, une personne a commis un geste criminel et s’est ramassée avec une poursuite au criminel.
Tout ça parce qu’un agent de stationnement effectuait son travail.
Pour me raconter une histoire ou si vous voulez témoigner de quelque chose qui vous tient à cœur, écrivez-moi un courriel : genevieve.pettersen@bellmedia.ca