Début du contenu principal.
C’est le choix qu’a fait l’avocate Sherbrookoise Michèle Lamarre-Leroux au cours des derniers mois. Celle qui a aussi vécu le processus judiciaire comme plaignante a décidé de lancer son propre cabinet et d’offrir un nouveau service aux victimes.
«Je ne parlerais pas d’une écoeurantite, plus que d’un choc de valeurs», lance Michèle-Lamarre Leroux lorsqu’on lui parle de sa réorientation de services. Elle continuera de défendre par l’entremise de son cabinet des personnes accusées de vols, de fraude, de conduite en état d’ébriété et bien d’autres, mais refusera maintenant de défendre des personnes accusées de violences sexuelles ou conjugales.
À lire également:
«Moi-même, je suis passée à travers le processus comme plaignante, donc j’ai pu le vivre aussi de l’autre côté du décor. Ça m’a permis de voir cette réalité-là et de voir les lacunes qu’il y avait dans tout ce processus-là pour les plaignantes qui passent à travers le système», explique-t-elle. Elle nomme le contre-interrogatoire comme un moment difficile, ou encore le stress de ne pas savoir ce qui va se produire, le matin-même du procès.
Depuis l’ouverture de son propre cabinet à Sherbrooke, l’avocate s’est donnée pour mission d’accompagner les victimes, au privé, et certains de ses services, comme l’accompagnement lors d’un témoignage au palais de justice, peuvent parfois être remboursés par l’État. Elle est d’ailleurs l’une des premières à le faire dans la région.
«De par mon bagage d'avocate de la défense, ça me permet d'avoir un point de vue privilégié pour répondre aux questions de la victime sur comment ça se passe, comment la défense pourrait penser. Je viens combler cet espace-là entre l'accompagnement psychosocial du CAVAC (le Centre d’aide aux victimes d’actes criminels, NDLR) et l'accompagnement juridique plus neutre du DPCP (le Directeur des poursuites criminelles et pénales, NDLR). Moi, c'est un accompagnement juridique, mais plus personnalisé avec la victime», détaille-t-elle. Outre l’accompagnement lors du témoignage, elle peut aussi préparer une victime qui s’apprête à porter plainte à la police.
«Cette première déclaration vidéo-là, c'est la base de tout dossier au niveau criminel, donc il y a beaucoup qui se joue là», lance-t-elle.
L’auteur de ces lignes ne peut s’empêcher de lui poser la question: pourquoi, lors de ses débuts comme avocate, il y a huit ans, avait-elle choisi d’œuvrer en défense?
«On a fait des choix de société d’être présumés innocents jusqu’à preuve du contraire. Il y a des règles de droit que l’on s’est donné à respecter et c’est important de les respecter pour tout le monde, au bénéfice de tous, parce qu’on ne sait jamais si c’est notre frère, notre ami, notre cousine qui va finalement être accusée et on va être bien content le jour où un proche va être accusé qu’on peut s’assurer que cette personne-là a eu des droits qui ont été respectés», répond-t-elle.
Elle ajoute aussi qu’un aspect du métier des avocats de la défense est peut-être sous-estimé par le public, soit le travail psychosocial auprès des accusés. «C’est notre travail aussi de les confronter par rapport à certaines choses.»
Maintenant qu’elle passe de la défense des accusés à l’accompagnement des victimes de violence sexuelle, Me Lamarre-Leroux sent que son métier rejoint davantage ses valeurs, mais une chose ne change pas : l’émotion reste toujours vive, d’un côté comme de l’autre.
«Peu importe qu’on soit en défense, comme procureure, ou comme avocate de la victime, ça reste des dossiers qui sont humainement énergivores. Ça prend beaucoup d’énergie, mais il faut être bien disposés, et on trouve une façon de trouver du beau dans le travail qu’on peut accomplir à travers ça», conclut-elle.