Les près de 200 logements abordables qui seraient laissés vacants volontairement à Pointe-aux-Trembles suscitent de vives réactions. La Ville de Montréal promet d’ailleurs de faire pression sur le propriétaire, au risque de l’exproprier.
Lors d’un court entretien hors caméra, le propriétaire des immeubles à logements situés sur les 24ᵉ, 25ᵉ, 26ᵉ et 27ᵉ Avenue avait insinué qu’il laissait de nombreux appartements vacants dans le but de les rénover éventuellement.
L’une des locataires n’y croit pas. Selon elle, pour rénover, le propriétaire devra démolir «absolument tout».
«On est encore au fusible, ça fait trois ans au moins que l’appartement où mon frère a habité est vide, il n'a même pas été nettoyé. C’est pas des jokes. Je connais des gens qui ont voulu louer […] il n’y a rien à faire», dit-elle.
Mais la Ville de Montréal n'a pas l'intention de laisser la situation perdurer. Noovo Info a obtenu une copie d'une lettre qui sera envoyée au propriétaire au cours des prochains jours, dans laquelle on lui demande de rendre des comptes et elle lui annonce aussi qu'elle va utiliser son droit de préemption. Ce serait une première pour l'administration municipale et une façon de donner l'exemple aux autres propriétaires.

Selon Marie-Claude Baril, conseillère d'arrondissement dans Pointe-aux-Trembles, le propriétaire est resté «très évasif» concernant son intention de rénover ses logements lorsqu’elle est entrée en contact avec lui.
«J’avais fait des recherches à savoir s'il y avait des permis qui avaient été émis pour des travaux, des rénovations, ce n'est pas le cas. Donc c'est un peu une demande à savoir comment on peut l'accompagner, s’il désire les louer ou s’il désire se départir de ses logements. On a mis un droit de préemption à la Ville de Montréal sur ces logements, donc on est intéressé», a-t-elle rapporté lors d’un entretien avec Noovo Info.
Luc Rabouin, candidat à la mairie de Montréal pour Projet Montréal, promet d’ailleurs de créer une taxe pour ces propriétaires récalcitrants s’il est élu à l’automne.
«Des situations comme ça, c'est inacceptable. Il y a des logements disponibles qui sont habitables et il y a quelqu’un qui volontairement ne les loue pas. On va les avoir à l'œil ces propriétaires-là», rapporte-t-il.

Le FRAPRU salut cette promesse et espère qu’elle inspirera les autres partis politiques municipaux de Montréal et des autres villes au Québec.
«C'est un non-sens de permettre et de constater qu'il y a autant de logements vacants alors qu'il y a des dizaines de ménages, de familles et de personnes seules qui cherchent activement en ce moment une solution», indique Carl Lafrenière, porte-parole du FRAPRU.
M. Rabouin reconnaît qu’il y aura des défis dans la mise en œuvre de cette future taxe puisque la Ville ne dispose pas des données sur les logements loués et les logements vacants.
«Ça va nous demander beaucoup d'efforts et évidemment, si on avait un registre national des loyers, on aurait toute l'information publique», soutient-il.
Selon lui, la Ville pourrait aller encore plus loin et entreprendre pour la première fois un processus d'expropriation.
«S'il y a des cas où on a besoin de le faire, on va les utiliser ces pouvoirs-là. Donc, si on avait un propriétaire qui laisse ces logements vides, puis on a une crise du logement, on pourrait envisager de l'acheter de force», souligne le candidat à la Mairie.

De son côté le cabinet de la ministre responsable de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, dit être «sensible à la situation» et souligne qu’il est «primordial d’augmenter l’offre de logements» au Québec.
«Nous souhaitons que chaque logement qui peut l'être soit disponible à la location», peut-on lire dans une déclaration écrite.
On souligne toutefois «qu’il s’agit de logements privés, et non de logements abordables subventionnés par la Société d’habitat».
Voyez le reportage de Véronique Dubé dans la vidéo.

