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Une juge prolonge l'ordonnance protégeant les étudiants étrangers d'Harvard

Le litige concernant les inscriptions internationales est la dernière escalade qui oppose la Maison-Blanche à l'université.

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ff98650d6416eb69f6685a882ddabac8704c817137c2ab109bb9d850534dd260.jpg Ryan Enos, professeur de sciences politiques à l'Université Harvard, prend la parole lors d'une manifestation contre les récentes sanctions du président américain, Donald Trump, contre Harvard, devant le Science Center Plaza, le mardi 27 mai 2025, à Cambridge, Massachusetts. (AP Photo/Leah Willingham)

Une juge fédérale a prolongé jeudi l'ordonnance bloquant la tentative de l'administration Trump d'interdire l'admission d'étudiants étrangers à l'Université Harvard.

La juge de district américaine Allison Burroughs a prolongé l'interdiction qu'elle avait imposée la semaine dernière en émettant une ordonnance restrictive temporaire concernant l'action gouvernementale.

La prestigieuse université a poursuivi le département de la Sécurité intérieure vendredi après que la secrétaire Kristi Noem lui a retiré son autorisation d'accueillir des étudiants étrangers sur son campus de Cambridge, dans le Massachusetts.

Jeudi, l'administration Trump a annoncé une nouvelle tentative de révoquer l'autorisation d'admission d'étudiants étrangers accordée à Harvard. Dans une lettre envoyée par le directeur par intérim des services fédéraux de l'immigration (ICE), Todd Lyons, le gouvernement a donné à Harvard 30 jours pour répondre aux motifs présumés du retrait, qui incluent des accusations selon lesquelles l'université se serait coordonnée avec des entités étrangères et n'aurait pas réagi suffisamment à l'antisémitisme sur le campus. 

Le litige concernant les inscriptions internationales à Harvard est la dernière escalade en date dans la bataille qui oppose la Maison-Blanche à l'université la plus ancienne et la plus riche du pays. 

En avril, Mme Noem a adressé une lettre à l'université, exigeant divers dossiers relatifs aux étudiants étrangers, notamment les dossiers disciplinaires et tout ce qui concerne les «activités dangereuses ou violentes». Mme Noem a expliqué que cette lettre faisait suite aux accusations d'antisémitisme sur le campus d'Harvard.

L'université affirme s'être conformée à ses exigences. 

Toutefois, le 22 mai, Mme Noem a envoyé une lettre affirmant que la réponse de l'université était insuffisante. Elle a annoncé qu'Harvard était exclue du programme fédéral permettant aux universités de parrainer des étudiants internationaux pour l'obtention de visas américains. Cette mesure a pris effet immédiatement et a empêché Harvard d'accueillir des étudiants étrangers pour la prochaine année scolaire.

Dans sa plainte, l'établissement universitaire a soutenu que le gouvernement n'avait pas respecté les procédures administratives et la réglementation régissant la révocation de l'éligibilité des établissements à accueillir des étudiants internationaux, notamment en leur accordant la possibilité de faire appel et un délai de 30 jours pour répondre. L'avis de mercredi est conforme à cette réglementation. 

Craintes chez les étudiants

Malgré l'ordonnance restrictive, les efforts de l'administration Trump pour empêcher Harvard d'inscrire des étudiants internationaux ont déjà créé un climat de «peur, d'inquiétude et de confusion profondes», a relevé mercredi la directrice des services d'immigration de l'université dans un document judiciaire.

Maureen Martin a indiqué dans le document que de nombreux étudiants internationaux avaient demandé un transfert et que certains étudiants nationaux avaient eux aussi exprimé leur intérêt pour un transfert ou un report, estimant que leur expérience éducative ne serait pas la même sans un corps étudiant international.

La directrice a rappelé que les étudiants internationaux d'Harvard arrivant à Boston étaient soumis à des contrôles supplémentaires par les agents des douanes et de la protection des frontières, et que ceux souhaitant obtenir leur visa se voyaient refuser leur visa ou subissaient des retards dans les consulats et les ambassades.

Si la sanction est maintenue, elle pourrait bouleverser certaines écoles doctorales qui recrutent massivement à l'étranger. Parmi les personnes menacées figurait la princesse Élisabeth de Belgique, qui venait de terminer sa première année d'études doctorales à Harvard. 

Certaines écoles étrangères ont rapidement proposé des invitations aux étudiants d'Harvard, notamment deux universités de Hong Kong. 

Donald Trump a fustigé Harvard sur les réseaux sociaux après que la juge Burroughs a temporairement suspendu l'action la semaine dernière, déclarant: «Le meilleur atout d'Harvard, c'est qu'ils ont fait le tour du marché et trouvé la meilleure juge (pour eux !). Mais n'ayez crainte, le gouvernement finira par GAGNER!». 

Washington a formulé de nombreux griefs contre Harvard, l'accusant d'être un foyer de libéralisme et de ne pas protéger les étudiants juifs du harcèlement. Le gouvernement exige des changements dans la gouvernance et les politiques d'Harvard afin de l'aligner sur la vision du président.

L'université basée à Cambridge a été la première à rejeter les demandes du gouvernement, affirmant qu'elles menaçaient l'autonomie qui a longtemps fait de l'enseignement supérieur américain un pôle d'attraction pour les meilleurs universitaires du monde. Dans deux procès, Harvard accuse le gouvernement de représailles contre l'université pour avoir repoussé des demandes politiques.