Une cour d'appel a suspendu lundi une décision de première instance qui empêchait le président Donald Trump de prendre le commandement de 200 soldats de la Garde nationale de l'Oregon. Cependant, il n'est toujours pas autorisé à déployer ces troupes, du moins pour l'instant.
La juge de district Karin Immergut a émis deux ordonnances de restriction temporaires au début du mois: l'une interdisant à Donald Trump de mobiliser les troupes pour les envoyer à Portland et l'autre lui interdisant tout envoi de membres de la Garde nationale en Oregon, après que le président eut tenté de se soustraire à la première ordonnance en déployant des troupes californiennes.
Le ministère de la Justice a fait appel de la première ordonnance et, par un verdict rendu lundi à deux voix contre une, une commission de la Cour d'appel des États-Unis pour le neuvième circuit a donné raison à l'administration. La majorité a estimé que le président avait probablement gain de cause lorsqu'il a affirmé avoir le pouvoir de fédéraliser les troupes, estimant qu'il était incapable de faire appliquer les lois sans elles.
Cependant, la deuxième ordonnance de la juge Immergut reste en vigueur, de sorte qu'aucun déploiement de troupes ne peut avoir lieu immédiatement. L'administration a déclaré que le raisonnement juridique sous-tendant les deux ordonnances de restriction temporaire était identique et, peu après la décision de lundi, elle a demandé à Mme Immergut de lever immédiatement sa deuxième ordonnance, ce qui permettrait à Donald Trump de déployer des troupes à Portland.
Le ministère de la Justice a fait valoir qu'il n'appartient pas aux tribunaux de remettre en question la décision du président quant au moment du déploiement des troupes.
«La décision de la Cour d'appel pour le neuvième circuit suspendant la première ordonnance de restriction temporaire constitue une modification législative importante qui justifie clairement la levée de la deuxième ordonnance de restriction temporaire de cette Cour», ont écrit les avocats de l'administration.
Des déploiements entachés de litiges judiciaires
Le procureur général de l'Oregon, Dan Rayfield, un démocrate, a indiqué qu'il demanderait un examen plus large des appels afin de réexaminer la décision.
«La décision d'aujourd'hui, si elle est maintenue, donnerait au président le pouvoir unilatéral de déployer des soldats de l'Oregon dans nos rues sans aucune justification, a expliqué M. Rayfield. Nous sommes engagés sur une voie dangereuse aux États-Unis.»
Le ministère de la Justice n'a pas immédiatement répondu à une demande de commentaires par courriel. Les efforts de Donald Trump pour déployer des troupes de la Garde nationale dans les villes dirigées par les démocrates ont été entachés de litiges judiciaires.
Un juge californien a statué que le déploiement de milliers de soldats de la Garde nationale à Los Angeles violait la loi Posse Comitatus, une loi de longue date interdisant généralement le recours à l'armée pour des missions de police civile. Vendredi, l'administration a demandé à la Cour suprême des États-Unis d'autoriser le déploiement de troupes de la Garde nationale dans la région de Chicago.
Des manifestations nocturnes, généralement de petite envergure, limitées à un seul pâté de maisons, ont lieu depuis juin devant le bâtiment du Service de l’immigration et des douanes des États-Unis (ICE) à Portland. Des foules plus importantes, comprenant des contre-manifestants et des instavidéastes en direct, se sont parfois rassemblées, et les agents fédéraux ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants.
L'administration a déclaré que les troupes étaient nécessaires pour protéger les biens fédéraux des manifestants et que l'envoi d'agents supplémentaires du département de la Sécurité intérieure pour les protéger signifiait qu'elle ne faisait pas respecter les lois sur l'immigration ailleurs.
La juge Immergut avait précédemment rejeté les arguments de l'administration, disant que les affirmations du président selon lesquelles Portland était ravagée par la guerre étaient «tout simplement déconnectées des faits». Mais la majorité de la cour d'appel, Ryan Nelson et Bridget Bade, tous deux nommés par Donald Trump, a estimé que la décision du président méritait davantage de déférence.
Mme Bade a écrit que les faits semblaient appuyer la décision de Donald Trump, «même si le président peut exagérer l'ampleur du problème sur les réseaux sociaux».
La juge Susan Graber, nommée par l'ancien président Bill Clinton, a exprimé son désaccord. Elle a exhorté ses collègues du neuvième circuit à «annuler l'ordonnance de la majorité avant que le déploiement illégal de troupes sous de faux prétextes ne puisse avoir lieu».
«Au cours des deux semaines précédant la publication du président sur les réseaux sociaux le 27 septembre, aucun manifestant n'a perturbé l'application des lois, a écrit la juge Graber. Il est difficile de comprendre comment une petite manifestation, sans perturbation, pourrait justifier l'incapacité du président à appliquer les lois.»
