Dès les prochaines semaines, des milliers d'enfants prendront la route de l'école et plusieurs d'entre eux seront confrontés à une dure réalité: se rendre en classe le ventre vide. C'est l'un des constats du Club des petits déjeuners qui observe un nombre record d'enfants fréquentant les programmes de petits déjeuners qu'il soutient.
Selon l'organisation, au moins un enfant sur deux au Québec affirme ressentir la faim dès son arrivée à l'école, presque tous les jours, ce qui a des effets négatifs, entre autres, sur la fréquentation et la ponctualité à l'école, l'humeur et le comportement des jeunes ainsi que sur les capacités d'apprentissage.
Pourquoi autant de jeunes quittent la maison le ventre vide? Plusieurs facteurs affectent le portefeuille des familles, a indiqué à Noovo Info Marie-Josée Lapratte, cheffe, relations gouvernementales et municipales (Québec) pour le Club des petits déjeuners.
«Oui, il y a l’insécurité alimentaire, le contexte fait en sorte qu’il y a de plus en plus de pression sur les familles, les prix augmentent, le coût de la vie augmente, ça, c’est un fait. Il y a aussi la routine matinale précipitée, les longs trajets en autobus, le fait qu’un enfant n’a pas faim en se levant, mais c’est en arrivant à l’école que la faim apparaît», a-t-elle expliqué.
C'est pour toutes ses raisons que le Club des petits déjeuners «c'est pour tout le monde», ajoute Mme Lapratte.
«Depuis le début, on vise les écoles en milieux défavorisés [...], mais une fois qu’on est dans une école, c’est ouvert à tous les enfants et c’est important cet effet universalité», a-t-elle souligné.
Selon des chiffres de Statistique Canada fourni par le Club des petits déjeuners, depuis 2019, la proportion d’enfants vivant dans un ménage touché par l’insécurité alimentaire au Québec est passée de 19,8 % à près de 28 % en 2024.
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Aujourd’hui, au Québec, près de 99 000 enfants bénéficient d’un petit déjeuner nutritif grâce à plus de 600 programmes d’alimentation scolaire soutenus par le Club, et la demande ne cesse de croître. À l’échelle du Canada, pour la même période, il s’agissait de 3 824 programmes d’alimentation scolaire et 655 638 enfants.
Les ados ont faim aussi
Si la présence du Club des petits déjeuners est bien connue dans les écoles primaires, moins de gens savent que le Club et des partenaires sont aussi présents dans certaines écoles secondaires.
C'est le cas notamment en Montérégie où le Club des petits déjeuners travaille avec les Complices alimentaires pour contrer la faim chez les ados.
La directrice générale des Complices alimentaires, Nathalie Collin, constate elle aussi une hausse de la fréquentation des élèves au déjeuner, et pas juste au niveau primaire.
«Dans nos écoles secondaires, c’est un besoin et un besoin criant», a-t-elle expliqué à Noovo Info, soulignant que les ados – en pleine croissance – ont aussi besoin d’un déjeuner complet avant d’aller en classe et pour réussir à l’école.
Les Complices alimentaires aidaient dans ses premières années 225 jeunes de niveau secondaire accrédité par le Club des petits déjeuners et aujourd’hui ils sont 350 jeunes «et les besoins sont encore là», a-t-elle souligné.
«Personne ne peut apprendre à l’école s’il a le ventre vide le matin, la concentration n’est pas là», a ajouté Mme Collin.
La faim, l'affaire de tous
En mars dernier, Ottawa et Québec ont signé une entente en vertu du Programme national d'alimentation scolaire (PNAS) selon lequel Ottawa s'engageait à verser 65M$ sur trois ans au gouvernement québécois pour l'aide alimentaire en milieu scolaire.
Cette somme s'ajoutait aux montants déjà réservés par le gouvernement du Québec pour soutenir l'aide alimentaire pour offrir des déjeuners, des collations ou des dîners à l’école et en service de garde.
«Nous, on a accueilli ça extrêmement favorablement, nous avons contribué, on a fait entendre nos voix pour que ça puisse se produire. On était le seul pays du G7 à ne pas avoir de programme national d’alimentation scolaire, maintenant c’est chose faite», a commenté Marie-Josée Lapratte.
Si cette initiative d'Ottawa était un bon pas pour les familles, la porte-parole du Club des petits déjeuners souligne que «ça ne règle pas tout».
«Ça va répondre à une mince partie des besoins et il y en a beaucoup encore à rejoindre [des enfants, des écoles] et nous avons besoin de tout le monde pour le faire. Au Club on dit depuis le premier jour que c’est l'affaire de tous de nourrir les enfants et on y croit encore», a-t-elle expliqué.
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Bien que le gouvernement du Québec verse des sommes pour soutenir l'aide alimentaire scolaire, il n'existe pas ici de «Programme d'alimentation scolaire universel». Le Chantier pour un programme d'alimentation scolaire universel au Québec (PASUQ) regroupe différents acteurs clés qui militent toutefois pour un tel programme qui garantirait «des collations et repas sains, durables et abordables» dans toutes les écoles publiques.
Marie-Josée Pratte y croit pour le Québec.
«Je carbure à ça et je ne suis pas la seule. Nous sommes des centaines voire des milliers à y croire et à œuvrer pour ça. Ça prendra le temps […] Plusieurs pays le font, je suis certaine qu’au Canada, au Québec, on est capable de faire ça pour nos enfants, pour les enfants d’aujourd’hui et les enfants de main», a-t-elle conclu.
Le Club des petits déjeuners invite la population québécoise à joindre le mouvement de solidarité et à croire au pouvoir du petit déjeuner en textant « CLUB » au 20222 ou en effectuant un don au clubdejeuner.org/rentrée.
