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Le programme «Appels amicaux» associe des participants comme Mme Goodall à des bénévoles formés de la Croix-Rouge qui les appellent, généralement une fois par semaine, pour placoter.
Wendy Goodall a quitté l'Ontario il y a deux ans pour les vastes prairies du sud de la Saskatchewan. Puis la pandémie de COVID-19 est venue encore rétrécir son univers.
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«Je ne connaissais personne ici, sauf ma fille et sa famille», raconte Mme Goodall, veuve d'une soixantaine d'années qui vit dans le village de Lipton, en Saskatchewan. «Si je devais contracter la COVID, mon médecin m'a dit que je n'y survivrais pas. C'est très déprimant de ne pas pouvoir sortir.»
Alors que s'éternisait la pandémie, le sentiment croissant de solitude chez Mme Goodall a incité un professionnel de la santé à la référer à un programme gratuit mis en place par la Croix-Rouge canadienne au début de 2020, alors que la première vague entraînait des confinements généralisés à travers tout le pays.
Le programme «Appels amicaux» associe des participants comme Mme Goodall à des bénévoles formés de la Croix-Rouge qui les appellent, généralement une fois par semaine, pour placoter. Aussi simple que cela puisse paraître, le programme _ offert en français et en anglais _ s'est avéré si populaire qu'il s'est étendu à toutes les provinces et aux Territoires du Nord-Ouest.
«Avoir cet appel et pouvoir parler à quelqu'un, c'est super», admet Mme Goodall, qui parle régulièrement à la même bénévole en Saskatchewan depuis septembre. «Si je n'avais pas cet appel, je ne parlerais à personne pendant toute la semaine.»
Au cours des six derniers mois, le programme a enregistré plus de 30 000 appels impliquant 500 bénévoles et 3000 clients, explique Chris Baert-Wilson, une directrice de la Croix-Rouge dans l'Atlantique et responsable du programme «Appels amicaux».
«Nous avons commencé au plus fort de la pandémie de COVID-19, en reconnaissant que les gens s'isolaient _ et même s'ils ne s'isolaient pas, ils ne pouvaient pas voyager», explique-t-elle. «Et plusieurs personnes n'ont pas vu de membres de leur famille depuis très longtemps. Les gens se sentent mal, isolés et seuls.»
La plupart des participants, qui doivent avoir au moins 18 ans, sont des aînés. Certains veulent simplement que l'on s'assure rapidement que tout va bien, d'autres souhaitent un rapport plus significatif. Dans tous les cas, les bénévoles sont jumelés à des clients en fonction d'intérêts communs, une caractéristique clé que Mme Goodall apprécie beaucoup.
Pour les cas plus complexes, les bénévoles peuvent aider les clients à trouver, dans leur communauté, les ressources dont ils ont besoin en matière de santé physique et mentale, ajoute Mme Baert-Wilson.
Sans ce genre de compagnie sporadique et de soutien émotionnel, les personnes âgées sont particulièrement vulnérables à un déclin mental, explique le docteur Simon Sherry, professeur au département de psychologie et de neurosciences de l'Université Dalhousie, à Halifax.
«Lorsque nous privons nos personnes âgées d'interactions sociales, il y a des dommages correspondants pour leur santé cognitive», a-t-il déclaré, faisant référence aux mesures de confinement, qui ont maintenu les gens isolés.
«Quelque chose comme un appel téléphonique et la connexion humaine qu'il fournit est extrêmement important. Les humains sont des animaux sociaux: nous avons besoin d'appartenance et de connexion pour être bien.»
Une étude de 2010 de l'American Psychological Association a conclu qu'un isolement prolongé comporte les mêmes risques pour la santé que fumer 15 cigarettes par jour.
Mais ce serait une erreur de croire que la solitude généralisée et l'isolement social qui ont donné naissance au programme «Appels amicaux» constituent un nouveau phénomène, précise le professeur Sherry. De nombreuses preuves suggèrent que la solitude est à la hausse depuis déjà un certain temps dans les sociétés occidentales.
La prolifération des ordinateurs personnels, des téléphones intelligents et des jeux vidéo a contribué à la déconnexion sociale, dit-il. «Nous vivons depuis un certain temps dans un état de privation sociale et émotionnelle.»
Peu de temps après le début de la pandémie et l'imposition de mesures de confinement, les jeunes Canadiens se sont tournés vers les textos, les médias sociaux et la visioconférence pour maintenir les liens. Mais la plupart des personnes âgées ne sont pas à l'aise avec ces technologies, explique le professeur Sherry. C'est pourquoi la force du programme «Appels amicaux» réside peut-être dans son extrême simplicité.
«Une dame a dit que même si elle parlait à un bénévole seulement au téléphone, cela lui donnait envie de se lever du lit et de s'habiller», raconte Mme Baert-Wilson, de la Croix-Rouge.
Au Québec, le programme des «Appels amicaux» s'adresse aux aînés qui sont déjà rattachés à l'un des centres intégrés universitaires de santé et des services sociaux (CIUSSS) partenaires de la Croix-Rouge du Québec. Une recommandation d'un fournisseur de soins de santé, de services sociaux ou communautaires d'un CIUSSS partenaire est nécessaire pour s'inscrire au programme.
En date du 19 novembre, seuls les CIUSSS du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal et de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal étaient partenaires de la Croix-Rouge dans ce programme.