Début du contenu principal.
De plus en plus de jeunes adultes et de familles avec des enfants prennent part à ce loisir.
Les reportages et documentaires mettant en scène le naturisme mettent invariablement en scène des adeptes plus près de l’âge de la retraite que de leurs années sur les bancs d’école. Cet échantillon est-il représentatif des adeptes de cette pratique? Notre journaliste a enfilé le (non) habit d’un naturiste le temps d’une journée pour le découvrir.
«T’as bien choisi ta journée pour une première expérience de naturisme.»
Ce commentaire ironique, je l’ai entendu quelques fois lors de mon passage au centre écologique et naturiste La Pommerie, à Saint-Antoine-Abbé en Montérégie.
Il faut dire que la température ne se prêtait en effet pas beaucoup à la nudité. En ce lundi de la Fête du travail, le vent nous donnait un avant-goût de l’automne, avec une température ressentie à peine au-dessus de la barre des 15 degrés. J’ai d’ailleurs été surpris de voir de nombreuses personnes se promener en manteau sur le site.
Le naturisme ce n’est pas d’être nu à tout prix, mais bien d’être confortable, m’a-t-on expliqué. La nudité est obligatoire sur le site, mais seulement lorsque la température le permet. Lorsqu’il pleut ou qu’on a froid, on peut se couvrir au besoin.
Celui qui m’explique tout ça c’est le copropriétaire de l’endroit, Arnaud Beauchamp, qui me servira de guide pour mon après-midi d’initiation au naturisme.
À La Pommerie, on observe une augmentation de fréquentation de de la part d’une clientèle plus jeunes, notamment les familles. Auparavant, le centre ne comptait qu’une famille parmi ses membres et les visiteurs venaient surtout lors d’événements spéciaux s’adressant spécifiquement aux familles. Arnaud Beauchamp observe toutefois un changement de cap depuis environ cinq ans, si bien que cette année, une dizaine de familles sont membres et environ 20 à 30 enfants sont présents sur le site chaque weekend.
Selon lui, cet engouement s’explique notamment par le fait que le naturisme s’inscrit bien dans des mouvements sociaux qui sont dans l’air du temps.
Il cite en exemple la positivité corporelle, le mouvement #MeToo et la mouvance queer comme des tendances sociales qui favorisent la démocratisation du naturisme.
«Il y a eu tellement de mouvements qui ont eu lieu dans les dernières années, qui ont été dans la même lignée que ce que nous on promouvoit depuis des années, qui est un peu d'accepter nos différences dans notre diversité», explique-t-il.
Au fil de notre parcours en voiturette de golf à travers le camping, nous croisons certes plus de personnes de plus de 50 ans que de jeunes, mais ces derniers sont tout de même incontestablement présents.
On fait la rencontre d’un homme de 26 ans qui pratique le naturisme depuis ses 18 ans. Contrairement à d’autres rencontrés, ce ne sont pas ses parents ou des membres de sa famille qui l’ont initié à la pratique. D’aussi loin qu’il se souvienne, il a toujours apprécié être nu et il apprécie la liberté que lui procure cette activité. Il souligne également la force des liens d’amitié qu’il a créés au sein de la communauté naturiste.
Lorsque je lui propose de témoigner à la caméra dans le cadre de ce reportage, il hésite. La plupart de ses proches ne savent pas qu’il pratique le naturisme et il craint leur jugement.
Un peu plus loin dans le camping, Camille – 31 ans – et son conjoint, des saisonniers à la Pommerie s’affairent à préparer le BBQ avec un couple d’amis vingtenaires qu’ils reçoivent pour le weekend. La fille de l’autre couple est une collègue de Camille, la seule au travail à qui elle a confié pratiquer le naturisme. Le couple de nouveaux initiés, qui en sont à leur deuxième expérience de naturisme, semble beaucoup apprécier l’expérience. Pour Camille aussi, naturisme rime avec liberté.
«Il y a une liberté humaine par rapport à la société de juste se sentir bien avec son corps, avec la nature», explique-t-elle.
Pour Arnaud, le fait de se mettre nu nous oblige à se départir d’une identité sociale qui peut être pesante.
«Pour nous, ce c'est pas juste de se mettre nu, c'est de se mettre à nu, donc il y a vraiment un processus d'ouverture et de vulnérabilisation», explique-t-il.
Selon lui, le fait de se mettre à nu permet de s’exposer et d’afficher les parties de soi – et de son corps – qu’on aime moins.
Il cite en exemple des personnes handicapées ou des femmes qui ont subi une ablation du sein qui ont appris à accepter leur corps en pratiquant le naturisme.
«On a des gens qui ont des cicatrices, des particularités corporelles différentes. Puis, à force d'être exposé à ça, ça permet une acceptation plus grande et une normalisation un petit peu des corps qu'on voit jamais nulle part», expose-t-il.