L'Office québécois de la langue française (OQLF) a fait marche arrière après avoir tenté d'obliger un pub montréalais bien connu à changer son enseigne.
L'organisme avait demandé au Pub Burgundy Lion d'ajouter le français à son enseigne, car «burgundy» est un mot anglais.
Cependant, après des protestations du public, l'OQLF affirme maintenant qu'une analyse plus approfondie démontre que l'affichage du pub est bel et bien conforme aux règles linguistiques du Québec.
«Cette situation est regrettable et nous sommes sensibles aux réactions qu'elle a suscitées, tant de la part de l'entreprise que du public», a écrit l'OQLF jeudi dans une déclaration. «Nous ferons tout notre possible pour que des situations similaires ne se reproduisent plus.»
Toby Lyle, copropriétaire du Burgundy Lion, avait refusé de modifier son enseigne, arguant que le nom du pub était un clin d'œil au quartier environnant de la Petite-Bourgogne. Ce quartier était historiquement le centre de la communauté ouvrière noire anglophone de Montréal, et a été le berceau des grands noms du jazz Oscar Peterson et Oliver Jones.
«Ils ne l'auraient pas appelé Petite-Bourgogne, a pointé M. Lyle lors d'une entrevue. Ils l'auraient appelé Little Burgundy.»
Il avait également refusé les demandes de l'organisme de surveillance linguistique de modifier les noms de certaines régions productrices de whisky sur le site web du pub, notamment les Highlands et les Lowlands d'Écosse, arguant de l'absence de traduction française.
Plus tôt cette semaine, l'organisme de surveillance linguistique a ordonné au pub d'élaborer un plan pour résoudre les problèmes. Mais après que Toby Lyle a rendu le différend public, il a déclaré que l'OQLF avait donné suite jeudi et s'était «profondément excusé». Il estime que l'attention médiatique a incité l'organisme à changer de cap.
Les nouvelles règles linguistiques du Québec, entrées en vigueur en juin, exigent que le français occupe deux fois plus d'espace que les autres langues sur les enseignes de magasins, ce qui signifie que les entreprises dont le nom est anglais doivent ajouter des termes génériques ou des descriptions en français. Il existe toutefois une exception pour les noms de lieux reconnus dans une langue autre que le français.
L'organisme de surveillance affirme maintenant qu'il était «prématuré de demander des modifications à l'affiche», car il n'avait pas encore décidé si le pub enfreignait les règles. «Après analyse, il semble que l'affiche soit conforme», a déclaré l'organisme jeudi.
M. Lyle a précisé que l'organisme lui avait assuré que les régions productrices de whisky seraient également exemptées de sanctions.
Le copropriétaire du pub a expliqué qu'il risquait de s'aliéner certains de ses clients en s'exprimant publiquement sur le sujet. Depuis le début de la couverture médiatique, le pub a reçu plusieurs critiques négatives en ligne, affirmant qu'il ne respectait pas la langue française.
«Mais, à un moment donné, j'ai pensé que ce serait un manque de respect envers la communauté anglophone et le quartier que de simplement accepter et de se laisser faire», a-t-il argué.
M. Lyle a qualifié les règles linguistiques de «poudre aux yeux» — une tentative du gouvernement du Québec «pour nous détourner des problèmes qui doivent vraiment être réglés».
Cependant, il a ajouté que l'OQLF avait également signalé quelques autres problèmes de traduction sur le site web du pub, qui ont depuis été corrigés.
Ce revirement de l'organisme de surveillance survient quelques mois après son retour en arrière sur une autre intervention très médiatisée concernant un mot anglais. Ce printemps, l' Office québécois de la langue française a jugé qu'il était désormais «partiellement légitime» d'utiliser le mot «go» pour encourager les équipes sportives.
Ce revirement faisait suite à l'indignation publique suscitée par la décision de la Société de transport de Montréal de remplacer «Go! Canadiens Go!» par «Allez! Canadiens Allez!» sur les autobus, après avoir été contactée par l'organisme de surveillance de la langue au sujet d'une plainte d'un citoyen.
Dans ce cas, la réaction a incité le ministre de la Langue française, Jean-François Roberge, à intervenir, déclarant que l'expression «Go Habs Go» fait partie de la culture québécoise et que toute plainte future concernant ce slogan serait rejetée.
